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119

VIVIEN, Pauline Mary Tarn, dite Renée.

Cendres et poussières.

Paris, Alphonse Lemerre, 1902.

In-12 : demi-maroquin mauve à coins, dos à nerfs, tête dorée

(reliure de l'époque).

Édition originale du deuxième livre de Renée Vivien.

Exemplaire unique ayant appartenu à Natalie Clifford Barney, annoté par elle à l'encre ou au

crayon, puis offert à Renée Vivien dont elle fut l'amie, l'amante et l'inspiratrice.

Natalie Clifford Barney et Renée Vivien ont formé un des couples littéraires parmi les plus

célèbres. Elles se rencontrèrent en novembre 1899 : Pauline Tarn, future Renée Vivien, tomba

éperdument amoureuse de la jeune Américaine, “plus souple qu'une écharpe, dont l'étincelant

visage brille de cheveux d'or, de prunelles bleu de mer, de dents implacables” (Colette).

Barney hantera les deux premiers recueils de Renée Vivien,

Études et préludes

(1901) et

Cendres et

poussières

(1902) : l'amante y est célébrée à la fois comme inspiratrice, lys, femme fatale ou comme

tentatrice démoniaque...

Cependant, au moment de la publication du deuxième recueil en mai 1902, les deux femmes

vivaient une première rupture. Natalie Barney était retournée aux États-Unis où elle renoua avec

une ancienne amie, Eva Palmer.

À son retour à Paris, fâchée de n'avoir pas reçu

Cendres et poussières

(que Renée Vivien lui avait

pourtant bien envoyé outre-Atlantique, mais qui ne lui parvint que plus tard), Natalie Barney fit

l'acquisition d'un autre exemplaire et chercha à renouer avec l'auteur. Cette dernière ayant refusé

de la recevoir, Barney imagina de lui offrir ce second exemplaire “

alourdi de sincérités

”, c'est-à-dire

copieusement annoté dans les marges et enrichi de quelques poèmes composés à son intention.

L'entreprise de séduction parvint à ses fins, triomphant de celle qui se voulait intraitable.

Le ton est donné par la note intitulée “P.S.” inscrite en tête d'

Invocation

, première pièce du recueil :

Je puis un peu me séparer de ce livre de toi maintenant que celui que tu m'as envoyé – trop loin – m'est

revenu... Celui-ci je l'ai eu, je suis allée le chercher tout de suite en arrivant à Paris ce triste Vendredi du

treize mai – et je crains de l'avoir un peu trop alourdi de sincérités, de retours et de tout le reste –

mais au moins tu y trouveras, en guise de petits lauriers sur presque chaque page toutes mes appréciations !

– impressions, critiques... louanges... et bien d'autres choses qui ne savent s'écrire… ni se montrer...

mais qui y sont cependant et profondément senties ! mais ne cherche pas tu pourrai

[sic]

trouver...

et pourtant ne pas comprendre...

On trouve, au verso de ce feuillet, un long poème autographe de Natalie Barney écrit directement

en anglais à l'intention de Renée Vivien, signé des initiales N.C.B. et daté du 16 mai 1902, soit

trois jours après l'infructueuse visite de Natalie à Renée. Le poème présente des passages biffés

et corrigés. Une seconde composition autographe, en anglais, a été placée en regard du poème

d'amour

Locusta

(page 82). À la page 110, Natalie commente le poème

Lassitude

qui l’avait tant émue

lors de leur première rencontre en compagnie des sœurs Shillito : “

Enfin le voilà ce poème que j'aime

depuis si longtemps... car tu me l'as dit le premier soir au bois, de ta voix tendre et douce que j'entends encore - que

j'entendrai toujours - ah ! ce petit - je ne t'ai pas ‘laissé dormir de la mort la plus belle’ ! "Mais que meure et s'éteigne au

seuil des portes closes l'écho triste et lointain des sanglots de jadis.

Les pages 116 et 117 sont enrichies d'un très beau poème autographe, en français, composé par

Barney en écho à

Épitaphe

:

L'exemplaire

de Natalie

Clifford

Barney