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VERLAINE, Paul.
Poëmes saturniens.
Paris, Alphonse Lemerre, 1866
.
In-12 de (4) ff., 164 pp. la dernière non chiffrée : cartonnage japonisant à la Bradel, couvertures
conservées
(reliure de l'époque)
.
Édition originale tirée à 505 exemplaires : un des 491 sur vélin blanc.
Premier recueil publié par Verlaine.
Il a été en partie financé par sa cousine, Elisa Dujardin, inspiratrice probable de quelques-uns
de ses vers : elle devait mourir peu après la publication du livre. Pour un recueil tiré à cinq cents
exemplaires, dont les frais s’élevaient à huit cents francs, l’éditeur des Parnassiens demandait un
apport initial de deux cents francs, puis un remboursement par billets échelonnés tous les trois
mois. L’ouvrage parut dans l’indifférence, malgré les éloges de Sainte-Beuve, de Victor Hugo ou
de Mallarmé évoquant “un métal vierge et neuf”. En 1883, le tirage n’était pas encore épuisé chez
l’éditeur.
Exemplaire d'Auguste Poulet-Malassis, avec envoi autographe signé :
à monsieur Poulet-Malassis
hommage de vive sympathie
Paul Verlaine
Précieux témoignage du lien unissant deux figures majeures de la littérature française du
XIX
e
siècle.
La provenance de l'éditeur des
Fleurs du Mal
est d'autant plus piquante que le titre du recueil de
Verlaine, placé sous l'invocation de Saturne, était peut-être “inspiré d'un sonnet de Baudelaire
qui, avant de paraître dans la troisième édition des
Fleurs du Mal
(1868), avait paru dans
Le Parnasse
contemporain
en mars 1866 :
Jette ce livre saturnien / Orgiaque et mélancolique
” (Christian Galantaris).
Deux ans plus tard, en 1868, Auguste Poulet-Malassis devait publier à Bruxelles sous le manteau
un recueil de six sonnets consacrés à l'homosexualité féminine, le deuxième livre de Verlaine :
Les Amies
. Tirée à 50 exemplaires, l'édition originale fut condamnée au pilon par le tribunal
correctionnel de Lille, en mai 1868.
Exemplaire conservé dans une jolie reliure japonisante de l'époque
exécutée pour un intime de Verlaine.
L'exemplaire ne figure pas dans la vente après décès d'Auguste Poulet-Malassis (1878). Une simple
note au crayon sur le second plat de couverture, de la main du relieur à qui fut confié ce précieux
volume, explique cette absence. En effet, cette inscription dit : “
M. Caze japonais
” – c'est-à-dire
Robert Caze (1853-1886) qui fit relier plusieurs éditions originales de Verlaine, son ami, dans ces
cartonnages japonisants qu'il affectionnait. Poulet-Malassis lui a sans doute offert ce volume, paru
quand le collectionneur n'avait que 13 ans et qui lui manquait certainement. Cela explique qu'il
ne figure pas dans la vente de 1878 et qu'il soit recouvert d'un type de cartonnage qui n'était pas du
goût de l'éditeur de Baudelaire. Les livres de la bibliothèque Poulet-Malassis étaient en effet soit
reliés (en maroquin ou en demi-maroquin) par Lortic ou Amand, soit brochés.
“Un métal
vierge
et neuf ”
Mallarmé