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CÉLINE, Louis Destouches, dit Louis-Ferdinand.
Mort à crédit
. Roman.
Paris, Denoël et Steele, 1936
.
Fort in-8 [210 x 138 mm] de 698 pp., la dernière non chiffrée : broché, couverture de papier crème ;
étui-chemise moderne en toile noire.
Édition originale. Exemplaire du service de presse sur papier d’édition.
Le roman d’inspiration autobiographique fut éreinté lors de sa parution : on dénonça l’obscénité
de ce “florilège de vespasienne”. L’éditeur Robert Denoël en avait pourtant retiré les passages les
plus audacieux tout en se lamentant : “Nous avions manqué le Goncourt nous ne raterons pas la
correctionnelle.”
Au verso de la dédicace à Lucien Descaves figure cette note imprimée : “À la demande des éditeurs,
L.F. Céline a supprimé plusieurs phrases de son livre, les phrases n’ont pas été remplacées.
Elles figurent en blanc dans l’ouvrage.”
La mévente de son roman devait durablement affecter Céline.
Envoi autographe signé sur le faux-titre :
A Andre Gide
Tres sincere
hommage
LF Celine
Gide a noté au crayon, au recto du premier feuillet blanc, les neuf pages correspondant aux passages
du livre qui l’ont particulièrement marqué. De même, on relève de discrets traits de crayon en marge,
témoins de sa lecture attentive.
Traces d’usure dues à la piètre qualité du papier : petite restauration dans la marge intérieure du
premier cahier.
Une provenance inattendue.
Dans une page de son
Journal
consacrée à la publication de
Bagatelles pour un massacre
, André Gide
revient sur son admiration pour
Mort à crédit
: “Une entre-lecture cursive m’avait d’abord fait
considérer
Mort à crédit
comme fort inférieur au
Voyage au bout de la nuit
, que j’avais lu avec un
épatement inégal, mais par moment (vers la fin du livre surtout) considérable. Sur l’insistance d’un
ami, j’ai repris le livre tout entier (je parle de
Mort à crédit
) sans plus en sauter une phrase, et pour
me convaincre qu’il ne le cède en rien au premier. J’y trouve même, de-ci, de-là, des accents d’une
sensibilité singulière ; et je ne parle pas du portrait de la Mistress anglaise, de ses amours inavouées,
de son suicide, qui me tapent un peu sur les nerfs, mais de cette figure de l’oncle, d’abord à peine
esquissée, qui réapparaît vers la fin du livre avec une habileté consommée, et qui m’apparaît bien plus
neuve que celles, si réussies pourtant, du père et de la mère, ou celle, un peu conventionnelle,
de l’inventeur. Ce n’est pas la réalité que peint Céline, c’est l’hallucination que la réalité provoque ;
et c’est par là qu’il m’intéresse.”
“
Ce n’est pas
la réalité
que peint
Céline, c’est
l’hallucination
que la réalité
provoque
”
(André Gide)
La note, rédigée vers 1939, est d’autant plus remarquable que dans
Bagatelles
Gide était
sévèrement malmené et ses préférences sexuelles dénoncées de manière odieuse : “Monsieur
Gide en était encore à se demander tout éperdu de réticences, de sinueux scrupules, de fragilités
syntaxiques, s’il fallait ou ne fallait pas enculer le petit Bédouin, que déjà depuis belle lurette le
Voyage
avait fait des siennes.”
D’où le surprenant “Très sincère hommage” adressé trois ans plus tôt à celui que Céline
qualifiait en privé de “cuistre tarabiscoté”…
20 000 / 30 000 €