les collections aristophil
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adéquates… Il parle ensuite du comte Tosti,
qui « est vrayment poëte, et le feu de nos
plus fameux autheurs auprès du sien n’est
que de la glace. Je ne scay si les muses de
la nouvelle Italie sont si belles ailleurs que
dans ses odes, ny si Horace luy même a
marché si hardiment sur les principes de
Pindare. Ce sera dans ceste haute et magni-
fique poésie que j’yray chercher le génie qui
m’est nécessaire […] pour laisser une pièce
qui monstre que Paris n’est pas plus le pays
d’Apollon que Thoulouse »…
Sur la dernière page, Maynard a noté de sa
main des bons mots et épigrammes :
« A la court de Rome, un pigmée devient
soudainement geant.
Les muses ont augmenté leur escurie, elles
n’avoyent qu’un cheval, elles ont aujourdhuy
un asne de plus.
Je ne croy pas que le malheur et moi puis-
sions jamais nous separer, depuis que je suis
au monde il ma toujours suyvy, et il n’y a
point dapparence qu’il me quite pour le peu
de temps que jay a vivre »… Etc.
Provenance
: ancienne collection Jean
HANOTEAU ; citée par Raoul Bonnet dans
l’
Isographie de l’Académie française
: « Les
lettres de Mainard sont
rarissimes
».
quand mon nom seroit aussy obscur que
le vostre est illustre, vous lui avés departy
assés de lumière pour eblouyr mes rivaux,
et indubitablement ce que vous me faites
obtenir de la faveur publique, faira la plus
belle partie de mon oraison funèbre. Ceux
qui me cognoissent scavent assés que mes
joyes ne sont pas secrettes et que ma morale
n’est pas assez forte pour resister aux ten-
tations de la prospérité, c’est une verité si
certaine que depuis six jours je ne fay autre
chose qu’escrire aux amys que j’ay dans le
grand monde, le soing que vous avés eu
de me rendre celebre, il y a de l’apparence
que la publication d’une grâce si signalée
ne sera pas avantageuse à ma fortune, ceux
de qui j’attendois quelque establissement
ne voudront plus songer à faire réussir mes
esperances, après qu’ils auront cognu que le
present que vous m’avés fait sera tousjours
mis devant leurs gratifications, et que tous
puissants et tous ambitieux qu’ils sont ils ne
me scauroyent rien donner qui ne fut infe-
rieur a la gloire »… Il travaillera à laisser une
marque durable de sa reconnaissance, ce
sera désormais toute sa « meditation » : il fait
des vœux que « les scavantes filles » qu’il a si
longtemps suivies, payent sa persévérance en
lui inspirant des pensées et des expressions
690
MAUPERTUIS Pierre-Louis Moreau
de
(1698-1759) philosophe, astronome
et physicien [AF 1743, 8
e
f].
L.A.S. « Maupertuis », Berlin 14 août
1750, à Françoise de GRAFFIGNY ;
1 page in-4, adresse avec cachet de
cire rouge aux armes (petite déchirure
sans perte de texte).
1 000 / 1 500 €
Invitation de la part de Wilhelmine,
margrave de Bayreuth, sœur de son pro-
tecteur, Frédéric II.
« Une grande princesse capable de vous
connoitre, et digne de vous posseder s’est
adressée à moy pour vous engager à venir
vivre avec elle en Allemagne. Je puis vous
la nommer, c’est Madame la Margrave de
Bareuth. Comme vous connoissés déjà sa
persone et sa cour, de reputation, je n’ay
pas besoin de vous dire que c’est une des
princesses de l’Europe qui a le plus d’esprit,
et que sa cour est peut etre celle ou l’on
trouve le plus d’agrements réunis »… Il l’invite
à faire elle-même ses conditions. Lui-même
gagnerait beaucoup à ce « marché » : « 1°
d’avoir obligé S.A.R. 2° je serois plus près
de vous d’une centaine de lieues, et aurois
quelquefois le plaisir de vous voir icy »…
Prudent, il recommande le silence, « en cas
de refus »…
691
MAYNARD François
(1582-1646)
poète,
membre fondateur
de
l’Académie française [AF 1634, 14
e
f].
L.S. « Mainard » (minute) avec
MANUSCRIT autographe, [vers 1635,
à Jean de Gaubert CAMINADE,
président du Parlement de
Toulouse († 1637)] ; 5 pages et 1 page
autographe in-fol., sur 3 feuillets
réglés provenant d’un recueil.
3 000 / 4 000 €
Très rare lettre, pour exprimer sa recon-
naissance d’avoir été distingué parmi les
illustres de son temps, suivie d’une page
autographe d’épigrammes
.
Ce que son correspondant a fait pour le
placer entre les illustres du temps l’a mis
dans une grande confusion : il ne peut se per-
suader qu’il dût être traité avec un honneur
qui n’a été fait qu’à deux écrivains admirés
du siècle précédent, « et presque je croy que
vostre jugement a voulu faire une faute, pour
me faire de la réputation. Vous avés rafiné l’art
d’obliger, et vos libéralités […] sont quelque
chose de plus que celles des princes : ils
donnent le bien, et vous donnés la gloire ;
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