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les collections aristophil
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PROUST Marcel
(1871-1922).
2 L.A.S. « Marcel Proust », [mars-avril 1922], à Robert de
FLERS ; 6 et 4 pages in-8.
1 500 / 2 000 €
Curieuses lettres de Proust, lecteur du
Figaro
.
[Début mars]
. Il est très malade mais ne veut pas avoir « recours à la
machine de ma Lozeroise de Montjezieu » [sa dactylographe Yvonne
Albaret, nièce de Céleste], pour donner à Robert [rappelé au
Figaro
par
le nouveau propriétaire François Coty] un conseil : « Je suis abonné
du
Figaro
depuis plus de trente ans. Toujours quand l’abonnement
expirait, on se présentait à domicile pour recevoir le montant du
nouveau. Pour la première fois depuis trente ans j’ai appris que mon
abonnement était fini par le seul fait que je n’ai pas eu de
Figaro
. […]
Avec votre système, vous vous trouverez perdre – avec un
Figaro
mille fois mieux fait que l’ancien – un grand nombre d’abonnés. Les
gens sont négligents, vous n’allez pas à eux, ils n’iront pas à vous. Leur
Figaro
quotidien était une habitude. […] on verra qu’on peut très bien
se passer de
Figaro
. […] Je ressentirais un chagrin personnel si les
efforts de Prestat ou de Latzarus pour vous couler, vous enlevaient
seulement (par votre faute) cinquante abonnés. Et même si tu en as
dix mille de plus qu’eux, je préfère que tu en aies dix mille cinquante
de plus. […] Fais encaisser, fais encaisser ! »…
[29 avril]
. Il remercie Robert « de la façon infiniment gentille dont
tu as présenté dans
le Figaro
un extrait de mon livre [
Sodome et
Gomorrhe II
]. Je ne puis comprendre ce qui a fait choisir à Gallimard
ces lignes […] Mais ton petit préambule m’a fait littéralement déborder
de reconnaissance, de tendresse. Je t’exprime l’une et l’autre, immé-
diatement, bien que hors d’état d’écrire depuis quatre jours. […] tu n’es
pas au courant des brusques et terribles variations de ma santé ; et tu
pourrais porter, quand mon cœur est si plein de toi, un faux jugement
d’ingratitude. Je me rends très bien compte par la lecture fréquente
du
Figaro
des faux jugements causés par l’ignorance où on est tenu
sur les changements survenus dans les choses qu’on juge. J’aime
beaucoup les articles de CAPUS où les choses semblent vues en
profondeur et clairement, avec les contours arrêtés et décisifs d’un
morceau de cristal de roche. Seulement quand il a démontré à la
première page, more geometrorum, pourquoi le discours de Bar-
le-Duc [de Raymond Poincaré] éclaire et réconcilie définitivement avec
nous M. Lloyd George, on apprend à la dernière heure du même
numéro que ce ministre a critiqué en termes malséants les propos
de M. Poincaré et qu’il est à peu près brouillé avec M. Barthou.
Malheureusement le beau cristal de roche ne [peut] plus changer
de lignes comme ces inmodifiables pointes sèches d’HELLEU que
tu ne veux pas voir retracer mes traits. Et il faut un nouveau minéral
lucide, profond, à cassures brusques, pour le lendemain. Ce qui ne
veut pas dire qu’on puisse faire mieux que Capus mais peut’être que
les choses, et surtout les choses quotidiennes, et encore plus si elles
sont lointaines, […] ne se laissent pas réduire à la beauté translucide
d’un art péremptoire, aux contours décidés. Et dans ce dissentiment
entre les choses et le “papier” lumineux du directeur, à mon avis ce
n’est pas les choses qui ont l’avantage »... Il évoque pour finir la mort
de Paul DESCHANEL : « Le triste évènement a tellement vérifié jusque
dans les moindres détails ce que j’avais écrit au pauvre Deschanel
que je t’aurais donné sur lui, mort hélas, un article vivant »...
Correspondance
, t. XXI, p. 76 et 146.