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224

les collections aristophil

184

[TITANIC].

C

ANDEE HELEN CHURCHILL

(1858-1949).

Femme de lettres et décoratrice américaine.

MANUSCRIT autographe,

The North Atlantic. TITANIC 

;

40 feuillets in-4 ou in-8 à l’encre bleu-vert (env. 22 x 14 cm ;

trace de rouille en page 1) ; en anglais.

30 000 / 40 000 €

Exceptionnel témoignage de première main par une rescapée du

terrible naufrage du

Titanic

, paquebot réputé insubmersible, dans

la nuit du 14 au 15 avril 1912.

Marqué par quelques élans emphatiques, le récit de cette passagère

de première classe, quinquagénaire divorcée et féministe, fut une

des sources d’inspiration du film

Titanic

de James CAMERON

(1997), elle-même donnant ses traits au personnage de Rose. Le

manuscrit, parfaitement lisible, comporte des indications d’interlignes

et d’insertions d’additions, à l’usage des typographes, ainsi que

quelques ébauches et notes raturées.

L’auteur commence par un souvenir d’enfance : la découverte d’un livre

d’explorations arctiques dont les illustrations lui donnèrent l’ambition

de voir de près un iceberg… Puis il met en scène le drame, rappelant

qu’en 1912, les avions ne surveillaient pas les régions arctiques. Sans

préavis, une banquise se brisa et envoya un jour un navire de glace

dans l’Atlantique nord.

« And I was to see an iceburg »

(« Et je devais

voir un iceberg »)…

Partie de New-York pour séjourner économiquement en Espagne, Helen

Candee fut heureuse d’être invitée à Paris par des amis. Mais elle y

reçut un télégramme angoissant : son fils avait eu un accident, et les

chirurgiens conseillaient qu’elle revienne immédiatement. Elle trouva

place dans le premier navire disponible, le plus grand jamais lancé : le

Titanic

. Elle consacre plusieurs pages à la vie à bord du plus luxueux

paquebot du monde, aux agréments du paquebot, et l’insouciance qui

y règne, à la qualité des passagers, à des remarques prémonitoires

de plusieurs d’entre eux... Après un dernier verre au restaurant Ritz du

navire, elle se retira dans sa cabine :

« The ship’s engines thumped a

harmony, and sang a melody. You can always hear music on a ship

with the engines going. I was in my bathgown ready for a stinging hot

bath. The music of the engines was beating and singing, rhythm and

harmony. Then the shock came. Ararat’s mount with the Ark stuck

fast on top of it, was the mental image. The impact was below me. It

toppled me over. We had struck the top of a mountain in the sea, a

mountain never before discovered. It must be so. With the door of the

cabin thrown open two or three things were sinister, a silence absolute,

a brilliance of light as in a ball-room, and an utter absence of human

presence »…

(« Les machines du navire frappaient une harmonie, et

chantaient une mélodie. On peut toujours entendre de la musique

sur un navire, avec les machines en marche. J’étais dans ma robe de

chambre, prête à un bain chaud revigorant. La musique des moteurs

frappait et chantait, rythme et harmonie. Puis vint le choc. Le mont

Ararat avec l’arche figée tout en haut, en était l’image mentale. L’impact

eut lieu sous moi. Il me renversa. Nous avions heurté le sommet d’une

montagne dans la mer, une montagne jamais encore découverte. Ce

devait être cela. La porte de la cabine grande ouverte, deux ou trois

choses paraissaient sinistres, un silence absolu, un éclairage brillant

comme dans une salle de bal, et l’absence absolue de toute présence

humaine »). Elle éprouva un besoin aigu de parler à un autre être

humain, mais le steward la renvoya dans sa cabine, en lui assurant qu’il

n’y avait rien… Deux messieurs de sa connaissance vinrent s’enquérir

d’elle, et ils firent ensemble le tour du navire, observant l’insouciance

des stewards, l’absence d’officiers, des joueurs de cartes au fumoir,

une cheminée unique qui relâchait sa vapeur, la forte gîte du bâtiment,

le sens troublant d’une tragédie… Elle décrit le lent rassemblement de

« And I was to see

an iceberg (...) »

Helen Candee Churchill