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les collections aristophil

je ne l’entendais pas assez bien, et elle est

partie, et elle [est] revenue se mettre sur le

bord de mon oreille. Et là je l’entendais très

bien. Elle chantait: Bizi, Bizi, Bïnbizi de la

bourricoute, Bizi, Bizi, tant pis pour lui, Bou-

carou de la Boucaroude, tant pis pour toi si

tu m’écoutes, Bizi, Bizi, Bïnbizi ! Je suis la

très méchante mouche»…

Vendredi [avril

1922]

, séjour à Vence [chez Catherine Pozzi]:

belle description de la vue du Baou des

Blancs autour de Vence, où il corrige les

épreuves de

Charmes

: « je crois que ce sera

très bien

. C’est d’un 17

me

un peu éhonté. Tous

ces bois anciens, culs de lampe, etc. et les

beaux caractères – cela fait classique»…

[Octobre

1922]

, voyage à Londres pour inau-

gurer une plaque en l’honneur de Verlaine

et faire une causerie sur « Poésie et Langage»

chez Lady Colefax: « Qu’est-ce que tu veux !

Il faut vivre !» Et il signe: « Papa Commis

voyageur en crachats, salive».

[Août 1923]

,

séjour en Auvergne au château de Chazeron,

promenade à Châtel-Guyon… « Vous vous

moquez de votre Père – ce qui est assez

dans votre nature, mais qui n’est point de

son goust. Il n’est pas dans l’ordre que votre

illustre Auteur vous doive de vous écrire le

premier ains c’est à vous mademoiselle ma

fille, qu’il appartenait de me rendre vos

devoirs. […] souffrez que je vous donne la

battue, la fessée majeure, et la pincée

jusqu’au noir, vous estimant heureuse que

ne vous fasse jeter aux carpes du vivier par

mes valets et aultres pourboiromanes»…

[1924

?], visite à l’Aquarium de Monaco:

« Affreuses et élégantes murènes, qui sont

des serpents à museau pointu, couleur jaune

et tachetés, dont la nage est d’une souplesse

et d’un dangereux extraordinaires. Leur chair

est empoisonnée (dit la notice), leur morsure

est envenimée – et cependant on les mange.

Il y a des êtres paradoxaux et fols comme

les limules qui sont une casserole en émail

verdâtre avec la queue, sous laquelle un

vague crabe semble collé. La casserole est

dix fois trop grande pour le crabe y adjacent.

Les mâles se reconnaissent à ceci qu’ils se

font tirer la casserole par les femelles. Il y a

des araignées très horribles qui grouillent,

des soles qui se dégagent du sable auquel

elles se confondaient. Un poulpe qui dormait

et de gros poissons avec des yeux comme

les tiens qui venaient me regarder en face à

travers le cristal»… Il envoie deux

dessins

de

poissons à l’encre de Chine.

[20 février 1924]

,

conférence à Monaco, et séjour au palais.

[Début 1925]

, séjour à

la Polynésie

sur la

presqu’île de Giens chez la comtesse de

Béhague… Une lettre est ornée d’une

aqua-

relle

représentant la fenêtre de sa chambre

avec vue sur la mer… « À 20 ans j’étais déjà

célèbre. À 21 j’étais inconnu. À 25, un type,

un bizarre; à 28 un P.C. de 1800

frs;

à 30, un

époux bureaucrate; à 40 un père de famille

à patron; à 50, un poète hermétique; – à 54

l’homme du monde et éminent essayiste et

académicien, successeur de France, double

de Jean Aicard, tout, quoi ! – À 90 ans il

entra dans les ordres et fut canonisé par

Chocolat VIII en 1987 (environ). Sa momie

est conservée au Palais de Monaco à côté

du bocal où flotte un gros veau marin cru

Lefèvre, selon la légende. Mais de cette

momie miraculeuse un doigt de pied est à

Cette – Église S

t

Louis. Un tibia à Bastia. Les

boyaux à Montpellier au Musée Fabre. Voir

les guides et le Michelin. Toute la famille et

la descendance sont dispensées de faire

maigre le dimanche, et caca les veilles de

fête»…

En 1927, Agathe se marie (carte de faire-part

des fiançailles jointe) et devient Mme Paul

ROUART.

1er mai 1927

, il fait suivre une lettre

de Florence Blumenthal.

La Polynésie [juin

1929]

, visite du yacht le

Tenax

de Mme de

Béhague, « le comble du confortable contenu

dans une coque sévère et trapue d’ancien

militaire. 11 nœuds seulement. Mais ceci suffi-

sant pour croisières. […] Je peins des nudités.

C’est plus facile que les fleurs et pots. D’ail-

leurs les fleurs m’embêtent. Tout le monde

sait ça. J’ai fait un Narcisse (naturellement)

avec une grosse lune orangée qui lui éclaire

le dos. Il est couleurs de dragée. Très zoli. J’ai

fait une Ève au Serpent qui est un amour»…

Une lettre est illustrée d’un

dessin

à la plume

du yacht.

[3 septembre 1929]

, à Rome, visite

de la Bibliothèque Vaticane.

[Novembre 1929]

,

audition d’

Amphion

chez Ida Rubinstein.

[Nice 24.VII.1933]

, amusante lettre agrémentée

de vers de mirliton contant les cérémonies

d’ouverture du Centre méditerranéen, signée:

« Comte Salloppier de Saint Luc (et autres

lieux) Père de recalé, Mangeur d’honneur

des Palaces de la côte Fournisseur de S.S.».

[Marseille 16.III.1932]

, tournée de conférences

à Avignon, Lyon, Grenoble; visite de l’aéro-

port de Lyon qui l’impressionne.

Florence

[23.V.1933]

, conférence devant la Princesse

de Piémont; dîner à sa droite…

Nice 1934

,

installation à l’Hôtel Ruhl, avec

dessin

à la

plume de la vue sur la mer et le Mont Boron.

[Août 1935], sur sa petite-fille Martine (née le 2

janvier)… « Mes garçons ne pensent pas assez

que j’ai l’âge où ils me devraient supporter.

On va sur les 64. C’est un chiffre. Tout le le

dit, excepté 1° ces messieurs; 2° mon senti-

ment que je n’ai encore rien fait»…

Munich

[7.XI.1936]

, conférence à Munich, visite de la

Pinacothèque…

[Marseille 20.V.1938]

, il fait une

cantate [

Cantate du Narcisse

] avec Germaine

Tailleferre.

[Genève 18.VII.1939]

, conférences

à la Société des Nations, « dans cette vaste

salle de l’immense bâtisse – où il y a ça et

là des W.C. admirables, incomparables»…

[Mai 1940]

, inquiétudes sur la guerre: « Cet

Hitler commence à me faire mal au thermo-

mètre»…

1942

, séjours au château de Montro-

zier (Aveyron) chez Robert de Billy…

30 juin

1943

,

photo dédicacée

: « à ma petite Agathe

son auteur peut-être favori Paul Valéry».

Jeudi

, lettre écrite par-dessus un

dessin

de

Narcisse, détaillant l’arrivée d’une caisse de

victuailles envoyée par la Roumanie.

[Avril

1944]

. « Impossible de rien faire. C’est le vide

mental absolu. Une nouveauté sinistre dans

mon histoire. […] D’autre part, le pauvre Faust

[

Mon Faust

] est là. J’ai rouvert son énorme

dossier […] cette pièce ne se dégage pas. Elle

ne peut se défaire de son vice initial – qui

est d’avoir été entrepris sans but déterminé

– et d’avoir vécu de réplique en réplique»…

D’autres lettres parlent de son travail sur

Mon

Faust

.

[1er août 1944]

, il raconte la lecture de

Mon Faust

chez Jean Voilier. Dimanche

[27

août 1944]

, sur la libération de Paris: « Tu

aurais joui, entr’autres choses, du siège du

réservoir, avec reddition des boches, qui sont

descendus, les mains à la nuque croisées,

sous les huées et les injures, ce qui était de

trop, dans l’avenue comblée de chars Leclerc.

Les maisons de l’avenue sont criblées, car il y

a à présent des gens invisibles qui tirent tout

à coup des toits. […]. Alors interviennent les

soi-disant défenseurs qui arrosent les façades

de jets de mitrailleuse et de mitraillettes»…

Récit du défilé de la victoire, auquel il assiste

des balcons du

Figaro

avec son fils François,

fusillades…

[13 juin 1945]

, dernière lettre à

Agathe, dictée à sa femme avant sa première

hémorragie: « Je n’en puis plus de n’exister

que par gênes, souffrances, et remèdes plus

ou moins désagréables auxquels, d’ailleurs,

je ne crois pas»…

ON JOINT 14 lettres à son gendre Paul

ROUART

, la plupart L.A.S. (dont 3 cartes

postales, une lettre dactyl., une réparée au

scotch, environ 20 p.), 1926-1932 et s.d., dont

nous citerons cet extrait d’une lettre écrite de

la Polynésie, quand Agathe s’est fait couper

les cheveux: « elle s’est fait rogner les tifs ?

– Je la déshérite. J’espère du moins qu’elle

l’a fait comme j’aime que ce soit fait. Pas de

Jeanne d’Arc, mais razibus comme toi et

moi. C’est beaucoup plus joli que le genre

couvre oreilles. Les femmes sont folles – car

d’ici peu nous arriverons à la dame chauve.

Tu vois ça ! Des seins et un genou ! Enfin…

c’est bien le Crépuscule des Dames !

Damer-

dammerung

!»…

On joint aussi 6 photographies

représentant

Paul Valéry, dont 2 avec la petite Agathe, et

une avec ses enfants Claude et Agathe; un

dessin de Georges d’ESPAGNAT représentant

la petite Agathe lisant (mine de plomb et

crayon de couleurs, 12,5 x 14,5 cm, accident);

plus une carte postale a.s. de Paul VALÉRY à

sa mère Mme Valéry de Grassi; une L.A.S. à

sa cousine Pauline Sperati au sujet du bap-

tême d’Agathe, dont elle est la marraine; une

L.A.S. à André Gide (1907) lors d’une maladie

d’Agathe (lettre un peu passée); et 2 L.A.S.

à la bonne Charlotte LECOQ (1918 et 1926).

EXPOSITION

Paul Valéry

, Bibliothèque natio-

nale, 1956 (n

os

212, 214, 219, 221, 224, 226).