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MALEBRANCHE NICOLAS (1638-1715).
L.A.S., Livry proche de Melun 9 juin [1708?], au physicien
Louis du PUGET, «en belle-cour a Lyon»; 4 pages et quart in-4,
adresse avec cachet de cire rouge brise (petite dechirure par
bris de cachet reparée avec perte de quelques fins de lignes).
Longue lettre scientifique
commentant le
Nouveau système,
ou Nouvelle explication du mouvement des planètes
de Philippe
Villemot (1707).Il remercie de l’envoi du livre de Philippe
VILLEMOT (1651-1713, astronome). «Il y a beaucoup d’esprit et dinvention
dans le livre de M. Villemot mais jy trouve des endroits obscurs et qui
me paroissent faux. Je ne l’ai encore lu que legerement et a la haste.
Son principe des forces centrifuges nest pas nouveau il a été propose
et demontre par Mrs NEWTON HUIGENS Saurin de l’Hopital &c quil
me paroit quil navoit pas vus, par la manière dont il le demontre. Ainsi
il peut en être regarde comme l’inventeur. Mais le systeme quil batit
sur ce principe ne me paroit pas si solide et si bien lie que celui de M.
DESCARTES avec lequel il a pourtant quelque rapport»... Ce serait une
grosse affaire que d’entreprendre une critique de tout le livre; il dira
seulement ce qu’il pense de ce que l’auteur appelle Bouillonnement, et
qui est un des fondements de son systeme: «L’auteur préténd que les
parties superieures du fluide qui circule sont obligées de refluer vers
le centre parce que la force centrifuge des spheres superieures est
plus grande que celle des inferieures [...]. Mais sa raison ne me paroit
pas bonne car il suffit que chaque point ou petite partie dune sphere
inferieure ait plus de force centrifuge qu’une egale partie voisine de la
surface superieure pour prendre sa place. Or l’auteur convient [...] et
cela est demontre que chaque point inf[erieur] a plus de force centrifuge
quun point superieur. [...] on ne peut pas conclure de la que chaque
partie superieure puisse chasser chaque partie inferieure et refluer vers
le centre»... Il propose une expérience d’huile et d’eau, dans un cone
renverse, et dessine un schéma pour l’illustrer... A supposer même
que la demonstration de l’auteur fut bonne, «il me paroit evident que
la matiere fluide ne reflueroit point vers le centre. Elle iroit assurement
ou elle trouveroint moins de resistance, cest a dire dans le plan même
de sa circulation; mais parce que les spheres inferieures pressent
également les superieures les superieures circuleroient d’autant plus
promtement qu’elles seroient plus comprimées par les inferieures, car
les corps ne trouvent point de resistance quand ils sont entre dautrès
qui leur cedent la place»... Malebranche souhaite cependant ne pas
être nomme, si du Puget parle a Villemot de cette difficulte, «car je nai
pas assez de loisir pour philosopher par lettres, et cette occupation
ne me convient pas»... Il signé «Malebranche P[rest]re de loratoire».
«Ayant continue la lecture du livre», il ajoute un long post-scriptum: «l’au-
teur attribue a DESCARTES p. 170 un sentiment que Descartes na point
et rejette même par la même raison que lui 4 part[ie] de ses Principes. [...]
Ce quil dit aussi contre Descartes du flux et reflux ne me paroit
pas assez equitable ny son athmosphere de la Lune bien prouve.
La Lune seule suffit il me semble pour le flux et reflux non par un seul
passage ou tour mais par plusieurs pour donner a la terre le balan-
cement nécessaire au flux et reflux. [...] M. Villemot auroit peutêtre
mieux fait de ne point parler de la distribution de sa matiere primitive
ny daucune hypothese et de ne point même se servir des signés V
parce que cela ne laisse pas dembarrasser d’abord un lecteur. Après
avoir demontre les propriétés nécessaires a son sujet des forces
centrifuges il auroit pu deduire de l’expérience ou des observations
astronomiques les propriétéz de notre tourbillon»... Il en donne un
exemple: «Les observations des astronomes nous apprennent que les
quarrez des temps des revolutions des planétés sont entreux comme
les quarrez des distances du centre commun», ce qu’il developpe
avec de nombreuses formules de calcul, et un schéma, pour elaborer
son raisonnement sur la force centrifuge, avant de conclure: «Au reste
plus je lis le livre de M. Villemot plus s’augmente en moi l’estime que
vous m’en avez inspirée. Je vous prie de l’en assurer et de lui offrir mes
respects. Je suis a demi persuade de son bouillonnement - et que les
objections que vous avez vues ici peuvent estre aisement eclaircies
mais cette matiere demande bien de la meditation et plus de loisir et
d’esprit que je n’en ai»...
Provenance
Collection Albin SCHRAM (Christie’s, Londres, 3 juillet 2007, n° 525
).
8 000 - 12 000 €
TB
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