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beaux-arts
succèdent : « je suis très, très fatigué et énervé par cette préparation
– tableaux à revoir continuellement, redoutant toujours de laisser
des fautes trop apparentes, etc… ». Il expose aussi à Londres : gros
succès dans la presse, « mais les amateurs anglais sont restés gelés
et peu encourageants ! ». « Masson le banquier de la rue Taitbout
m’a acheté un tableau »… « Le nouveau ministre des Beaux-Arts sort
de mon atelier accompagné de tout un état-major; il a été enchanté
du tableau de René qu’il lui a acheté ».
Il occupe à Paris un atelier boulevard Raspail et un autre au Dépôt des
marbres, 182 rue de l’Université (où Rodin avait aussi le sien), avant
l’expropriation du Dépôt en 1901, ce qui le rend furieux : « C’est une
infamie qui m’écœure ». Il voyage aussi beaucoup pour son travail, et
on le suit en Hollande, en Bretagne, en Provence, sur la Côte d’Azur
où il va faire des études « pour mon dernier panneau de la salle à
manger ». Mais il n’oublie pas le Sud-Ouest : « Nous avons de beaux
coins à peindre à Albi et à Castres et je n’oublie pas St Cirq », dont
il loue la lumière et les couleurs.
Il évoque les commandes officielles, dont on peut suivre l’élaboration :
à Toulouse « où les maroufleurs sont en train de placer mes toiles »
(juillet 1909); ses peintures pour l’Hôtel de Ville et la préfecture de
Cahors : « Je n’en ai pas parlé avec Paul Léon [directeur des Beaux-
Arts] ; je préfèrerais que de Monzie les lui demande », et il s’inquiète
de leur financement (17 décembre 1922). « J’ai apporté dernièrement
mon esquisse des Vendanges dans l’escalier de la Préfecture » (sep-
tembre 1925). « Je commence le gd panneau de la Préfecture, ayant
confiance dans les engagements de la rue de Valois » (29 mai 1926).
Outre les officiels comme Paul Léon et Anatole de Monzie, député
et sénateur du Lot, puis ministre, sont aussi présents ses amis Henri
Marre, Maurice Sarraut et Jean Rivière, ainsi que Jean JAURÈS,
qu’il représentera dans sa toile
les Rêveurs
pour l’Hôtel de Ville de
Toulouse : « J’ai rapporté de chez Jaurès en outre des études faites
d’après lui, un excellent souvenir. C’est certainement un homme très
supérieur, sa modestie son exquise politesse et les conversations
que nous avons eues le soir en promenant sous la douce lueur des
étoiles m’ont absolument séduit »…
Le ton de la correspondance évolue et devient peu à peu amical.
Henri Martin, très exigeant pour les travaux, demande de plus en plus
de services à son ami, et en fait son factotum jusqu’à lui demander
d’acheter des billets de train, du fromage, du vin, de la charcuterie, etc.
Il fait le portrait des enfants Toulouse. Les deux hommes échangent
des nouvelles de leur famille, femme, et enfants notamment de leurs
fils qui sont au front. Il se réjouit de la fin de la guerre : « J’aurais bien
voulu être des privilégiés qui, ont pu assister samedi dans la Galerie
des Glaces à la signature du traité de paix […] De même la séance
de la Chambre d’hier. Ça devait être très important cette lecture de
Clemenceau »…
On joint
6 lettres de sa femme Marie à Mme Toulouse, et 2 de son
fils Jac à Émile Toulouse