3
LITTÉRATURE
1.
Laure
P
ermon
, duchesse d’ABRANTÈS
(1784-1838) mémorialiste ; veuve du général Junot duc d’Abrantès (1771-1813),
elle fut la maîtresse de plusieurs écrivains romantiques. L.A.S., Paris samedi 18 octobre [1834 ?] ; 4 pages in-8. 100/150
Son ami
H
esse
, Directeur général de l’Instruction Publique à Darmstadt, est en visite à Paris : « Il a vu Paris comme pouvait le voir un
étranger entouré d’amis comme je puis l’être, qui se sont entremis de tout leur pouvoir pour lui faire emporter dans sa patrie un beau
souvenir de notre patrie ». Elle voudrait aussi lui montrer la Manufacture de Sèvres : « c’est moi qui suis le
directeur
en chef des
tournées
savantes ». Son oubli « n’est pas pardonnable à une
ayeule
, qui n’est pas encore imbécille, et qui ne radote pas tout à fait », et elle prie de
lui faciliter l’entrée à la Manufacture dimanche…
O
n
joint
une L.A.S. d’Anne Thoynard comtesse d’
E
sparbès
(1805) ; une L.A.S. de Sophie de M. à la veuve de Bernardin de Saint-Pierre
(1816 ?) ; et 4 L.A.S. d’Hortense
C
ornu
(1862-1874).
2.
Émile Chartier dit ALAIN
(1868-1951). 3
manuscrits
autographes signés,
Propos d’un Normand
, [1908-1909] ; 2
pages in-8 chaque (le 1
er
au crayon).
400/500
S
ur
le
cinématographe
(propos publié dans
La Dépêche de Rouen
du 1
er
juillet 1908). « Le cinématographe pénètre partout, s’impose
partout, non pas parce que le public le désire, mais parce que les producteurs ont des appareils et des vues à placer. Le public est un
bon diable »…
S
ur
l
’
art
, 2 textes
publiés dans
La Dépêche de Rouen
des 4 et 25 mai 1909 et recueillis dans
Préliminaires à l’esthétique
(Gallimard,
1939). – Sur les limites de l’Art. « Il y a trop d’artistes »... Notre éducation esthétique « nous a rendus très indulgents. […] Il y a une
chose que l’on devrait dire, c’est que le commencement, dans les beaux-arts, n’est jamais difficile. On arrive très vite au passable. […]
Toutes ces œuvres d’art sont bien écrites, bien peintes, bien sculptées ; et ce n’est rien du tout »… – Sur l’Art dans ses rapports avec la
Raison : « Nos cathédrales seraient bien laides si elles n’avaient pour nous plaire que les statues des saints et des rois, ou les monstres
des gargouilles. Mais tous ces ornements faits pour plaire sont heureusement perdus dans l’ensemble. Ce sont les lignes tout à fait
simples sévères et dénudées de la grande nef qui sauvent tout. Moins une cathédrale est ornée plus elle est belle quand elle est belle.
[…] La superstition fut le premier moteur, j’en conviens ; mais c’est la Raison qui fut l’architecte »…
3.
Émile Chartier dit ALAIN
.
M
anuscrit
autographe signé,
Propos d’un Normand
, [1910] ; 2 pages in-8.
300/400
T
rès
beau
texte
sur
T
olstoï
(publié dans
La Dépêche de Rouen
le 20 novembre 1910, et recueilli dans la 4
e
série des
Cent Un Propos
en 1914). « Comment dessiner Tolstoï ; dans quel trait l’enfermer ? C’est un Univers. C’est l’Univers commun où nous sommes. Ils
disent : génie étrange, âme slave. J’aperçois justement le contraire ; toute son œuvre est pour tous, directement et immédiatement pour
tous. Ni subtilité ni raffinement ; c’est réellement génial parce que c’est réellement ordinaire. [...] c’est la Raison commune en liberté
dans l’Univers ; mêlée à l’Univers. Si je dis qu’il est Biblique, ou Évangélique, ou Lyrique, je voudrai dire toujours la même chose.
[...] Pèlerinage en commun dans la Patrie commune. Fraternité et salut pour tous, dans tous les sens à la fois. Telle est la magie de ce
magicien. »
4.
Émile Chartier dit ALAIN
.
M
anuscrit
autographe signé,
Propos d’un Normand
, [1912] ; 2 pages in-8.
200/250
M
éditation
sur une
pensée d
’A
uguste
C
omte
(texte publié dans
La Dépêche de Rouen
du 1
er
juillet 1912) : « “J’ai toujours représenté la
souveraineté du peuple comme une mystification oppressive et l’égalité comme un ignoble mensonge”. Je veux bien méditer là-dessus ;
mais je prétends aussi résister à un mouvement secret de passion, qui jetterait joyeusement la Fraternité par-dessus bord. […] Dès qu’un
homme est un peu instruit, l’image d’un peuple grossier, livré aux passions, écrasé et abruti par le métier, paie tout de suite celui qui
la laisse seulement se former ». Alain cite
G
oethe
à l’appui de cette thèse, ainsi que
La République
de
P
laton
: « Vous y trouverez une
espèce de mépris féroce pour le chaudronnier mal débarbouillé qui prétend se marier à la philosophie. […] L’égalité est-elle un ordre de
fait ? Mais y a-t-il un ordre de droit sans égalité ? La justice n’est-elle pas toujours un bel effort contre l’inégalité naturelle ? »…
5.
Jacques AUDIBERTI
(1899-1965).
M
anuscrit
autographe ; 8 pages in-4 numérotées I-VIII (fentes, bords effrangés et
taches en 1
ère
page).
200/300
M
éditation
fantaisiste
,
avec de nombreuses ratures et corrections. « La raison d’être du monde, chaque religion, chaque philosophie
l’enferme dans une calebasse particulière, cafetière atomiste, burette jésuite, gourde marxiste. Tout comme l’eau, la raison d’être du
monde se prête, elle se plie aux contours, même les plus saugrenus, de la vaisselle qui l’incarcère. Mais, son profil personnel ? Quel est-
il ? Son portrait ? Comment l’obtenir ? Qu’il s’agisse de l’eau, qu’il s’agisse de la raison d’être du monde, le mieux, pense l’abhumaniste,
le mieux serait de verser la fluide matière à même une solidité plate, lisse, imperméable. Qu’elle s’y répande sans gêne ! Nous tiendrons
pour son effigie exacte et suffisante la forme qui, là, se dessinera. Et aussitôt, livrée à l’étalement excentrique horizontal, la raison
du monde envahit la plateforme glissante si nous l’épanchâmes. De s’étendre, de s’élargir sans limite la nappe liquide s’amincit. Elle
s’amincit jusqu’à s’évanouir. Adios ! La table redevient sèche. Notre soif agenouillée caresse de la langue cette surface d’aridité. Devons-
nous vivre à quatre pattes ? Non ! debout ! La surface se lève en même temps que nous »… Etc. Le manuscrit est resté inachevé (ou
incomplet de la fin).
On joint une L.A.S. de Marcel AYMÉ, Paris 5 juillet 1933, [à Max
F
ischer
] (1 p. in-4), le remerciant de son livre
Détours
: « j’ai fort
apprécié la fine observation des choses et des gens, que vous présentez sous un aspect neuf, le rebondissement des idées et des images
mêmes »...