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Lettres & Manuscrits autographes
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26 mai 2020
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VERLAINE Paul (1844-1896)
L.A.S. « Paul Verlaine », Paris 3 janvier 1888, à son ami Edmond
LEPELLETIER ; 4 pages petit in-8 à l’encre rouge (deuil).
« Toujours à l’hôpital, où je ne m’améliore, “quant à la jambe”,
qu’insensiblement en diable. Cependant ma santé générale est bonne
– et, au dehors, nombre d’articles bienveillants semblent présager à
mes publications futures –
mes chantiers sont pleins
– quelque accueil
pécuniaire
auprès des éditeurs et, si possible, en attendant ceux-ci,
auprès des rédactions. Je compte toujours sur tes bienveillants efforts
en ma faveur pour “collocage” mien éventuel ès asile honorable et
petits
ménages déguisés
, si l’infortune doit me poursuivre à ce point en cette
année qui s’entame ». Il craint qu’un nouveau médecin le fasse « déloger
plus tôt que je ne le voudrais pour mes commodités financières ». Il
n’aura de l’argent qu’en avril-mai. « Vanier ne pourra disposer d’ici-là,
en ma faveur, que de 200 à 250 francs. Quelques articles par ci par là,
nouvelles ou vers, pourront grossir un peu cette somme bien modeste,
et avec du courage !! Mais à tout hasard, ou plutôt contre tout hasard,
je tâcherai de rester ici le plus possible ». Il a écrit à ce sujet au Dr
Jullien. « En un mot je ferai tous mes efforts en vue d’une prolongation
de séjour salutaire à tous les points de vue, car je travaille en paix au
moins, en ce Broussais très calme ».
Il annonce que son volume
Amour
va bientôt paraître : « La pièce qui t’y
est dédiée a paru dans
La Vogue
en 1886. C’est intitulé :
Ecrit en 1875
.
Cela a trait à ma “villégiature” de Mons, en 1873-74-75. Je t’aurais bien
envoyé une copie, mais mon manuscrit est chez Vanier, et tu sais quelle
pauvre mémoire des vers miens et autres est la mienne ! J’espère que
tu aimeras ça. C’est genre
Nocturne Parisien
et
Grognard
, à toi déjà
dédiés dans les
Poèmes Saturniens
et
Jadis et Naguère
».
Il termine en recommandant un employé à l’économat de l’hôpital, M.
Vally, qui a été révoqué...
700 - 800 €
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VERLAINE Paul (1844-1896)
P.S. « P. Verlaine » avec date et adresse autographes, « 27 mars 1888
14 rue Royer Collard » ; le document est de la main de son éditeur Léon
VANIER (1847-1896) ; 2 pages in-4.
«
Compte Paul Verlaine
», des ventes de ses œuvres, des paiements
faits à Verlaine et des sommes dues. La réimpression des
Fêtes galantes
et de
Romances sans paroles
rapporte 125 francs par titre (« compte
soldé »).
Les Poètes maudits
, « 2
e
série & 1 & 2
e
séries réunies » valent
250 francs, versés en 8 fois, entre le 15 novembre 1886 et le 1
er
avril 1887,
par des sommes allant de 5 francs à 70. « Reste à traiter pour
Amour
,
Parallèlement
& [
rayé : Poésies
de Rimbaud à 125
f
chacun] »… Les 250
francs dus à l’auteur pour
Amour
et
Parallèlement
lui sont versés en 25
fois entre le 7 avril 1887 et le 27 mars 1888 ; les montants varient de 3,30
à 50 francs. Verlaine a signé la quittance du solde de ces deux titres.
1 000 - 1 200 €
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VERLAINE Paul (1844-1896)
L.A.S. « P. Verlaine », Paris 17 février 1889, à son ami Edmond
LEPELLETIER à Bougival ; 3/4 page oblong petit in-4, adresse au dos.
Il remercie Lepelletier de son article de
Paris
« où il est question de
moi en termes amusants et affectueux. [...] En attendant je saisis cette
occasion de te remercier, cette fois
absolument
, de ton bon souvenir.
Ce qui m’avait, je l’avoue, agacé dans l’article du 12 courant, c’était
de “me lire”, comme qui dirait me voir, “
crevant de misère
”, à l’hôpital
légendaire et “connot”, au fond, – de Gilbert, H. Moreau et toute la lyre
poitrinaire et intéressante dont il m’emmerderait d’être tenu pour un
pinceur convaincu. On est, vois-tu bien, par moments très susceptible
étant données certaines positions »... Il donne son adresse à l’Hôpital
Broussais.
400 - 500 €
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VERLAINE Paul (1844-1896)
MANUSCRIT autographe signé « Paul Verlaine »,
Chronique de l’hôpital
,
[1891] ; 2 pages grand in-8 sur papier administratif de l’Assistance
publique (petites fentes aux plis réparées au papier gommé).
Chronique d’un des nombreux séjours de Verlaine dans les hôpitaux
.
[Publiée dans la revue
Le Chat noir
du 20 mars 1891, elle fut recueillie
dans
Mes Hôpitaux
(Léon Vanier, 1891), où elle est la quatrième des
Chroniques de l’hôpital
.] Le manuscrit présente des ratures et corrections.
« Le lit que j’occupe
cette fois
à l’hôpital Labrousse et qui porte le n° 27
bis de la salle Seigle, a cette particularité que, de mémoire de malade,
aucun de tous ceux qui y ont dormi, sauf deux ou trois originaux de qui
je grossirai peut-être le nombre, n’y est pas mort, ce, avec un touchante
régularité d’exemple donné et suivi. Un tel funèbre privilège n’est pas
sans entourer cette couche trop bien hospitalière d’une considération
vaguement respectueuse [...] Moi, je n’avais pas le choix. S’agissait
de prendre ou de laisser. Dans un sens, laisser m’eut presque tenté,
tandis que prendre c’était de plus mauvais gîtes évités, et je pris.
[…] Il était là, mon prédécesseur, quand j’entrai dans la salle. Ni beau,
ni laid, ni, à vrai dire, rien. Une forme étroite et longue, entortillée dans
un drap avec un nœud sous le cou, et pas de croix sur la poitrine, à
même le matelas sur le lit de fer sans rideaux [...] Une civière, dite
boîte à
dominos
, [...] on y mit le paquet et en route pour l’amphithéâtre. Quelques
instants après j’étais installé dans le “poussier” tout à l’heure mortuaire
[...] D’ailleurs, c’est extraordinaire vraiment comme ici, on se familiarise
avec cette chose au premier abord familière et terrible et pourtant si
banalement consolante et libératrice, la mort. […] On a presque peur,
le pauvre inoffensif cadavre épouvante ou comme. […] Depuis, même
avant mes actuelles mistoufles, la triste et si bête ! expérience m’a gardé
comme ces sortes de délicieuses, au fond, émotions. Mais, nom de nom
de mille noms de nom ! j’ai fait des progrès dans le scepticisme »… Etc.
2 200 - 2 500 €
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