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les collections aristophil
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CAMUS ALBERT 1913 1960
ÉTUDE SUR LA PESTE D’APRÈS THUCYDIDE ET LUCRÈCE.
Manuscrit autographe, (milieu des années 1940).
4 pages ½ in-4.
12 000 / 15 000 €
Important manuscrit d’Albert Camus comportant de nombreuses
corrections autographes et ajouts dans lequel il disserte sur Thucydide
et Lucrèce, observateurs grecs et romains des eets de la peste.
Cette version du texte n’a apparemment jamais été publiée.
A-t-elle été menée avant la rédaction de « La Peste », publiée pour
la première fois en 1947 ?
Dans l’édition des Œuvres complètes de l’auteur aux éditions de
La Pléiade, une autre version de ce texte fut publiée sous le titre :
« Commentaire de Stephan sur Thucydide et Lucrèce. Fragment
du chapitre V de la 3
ème
partie ». Le manuscrit de cette version est
détenu par la BNF.
Le manuscrit présenté ici contient quelques corrections qui ne sont
pas publiées dans l’édition de la Pléiade.
Camus indique : «Thucy précise et Luc enseigne. Thucy écrit que les
hommes mourraient comme des bêtes. Luc ajoute que leur gorge
toute noire distille une sueur de sang, que les crachats rares, menus,
couleur de safran et sales sont arrachés avec peine du gosier par
une toux rauque et qu’enfin un hoquet ininterrompu tue le patient et
met le comble à son épuisement » …
Camus fait part de sa totale empathie face à la sourance et l’horreur
provoquées par la peste. Il se moque des prières de Lucrèce à Dieu :
… « A nous d’ajouter la prière, Dieu des brebis, je t’adore dans les
hoquets et les crachats… Dieu des brebis, voici le sel de ma sueur de
sang. Et le Dieu des brebis approuve et gronde, rumine et se délecte.
Je leur envoie la mort en troupeau, accompagnée d’une odeur infecte
pour que personne ne songe à toucher ces victimes réservées.
Et comme dit Luc, les oiseaux et les bêtes sauvages s’écartent alors
de cette proie. »
Camus se range plutôt du côté de Thucydide, l’historien objectif qui
note que les scientifiques ne peuvent rien pour arrêter l’épidémie.
Camus partage son désespoir et malgré tout sa quête d’un remède.
Ce remarquable texte d’Albert Camus apporte un éclairage d’un grand
intérêt sur l’un de ses chefs d’œuvre, la Peste.