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44

L’

ORGANE DU

G

OUVERNEMENT

JUSQU

À

LA

FIN DE

LA MONARCHIE

:

créée peu après la journée des dupes (novembre

1630), la

Gazette

fut dès le départ une arme de propagande au service du pouvoir royal – que Renaudot sut

utiliser avec une vraie liberté. Sous Louis XIV, elle subit la censure préalable des ministères de la Guerre, de la

Marine et des Affaires étrangères, puis fut directement rattachée au ministère des Affaires étrangères en 1761.

I

NSTRUMENT

ET

INDICE

DE

L

ÉLABORATION

D

UN

ESPACE

CULTUREL

NATIONAL

.

Initialement diffusée à Paris, la

Gazette

t bientôt l’objet d’expéditions vers la province et même, durant une longue période, d’impressions

dans différentes villes, pour réduire les délais et les coûts : « évolution majeure, la lecture de la

Gazette

s’est

progressivement élargie à tout le territoire national, indice de la lente émergence d’une opinion provinciale

et de l’élaboration d’un espace culturel national » (Feyel,

ibid.

).

Portant sous l’Ancien Régime le titre de

Gazette

(1631-1671) puis de

Gazette de France

, le périodique fondé

par Renaudot fut d’abord hebdomadaire (1631-1761) puis bi-hebdomadaire. Il adopta une forme épistolaire,

suite de nouvelles venues de différentes villes, françaises ou étrangères. Les fascicules furent généralement

accompagnés jusqu’en 1682 par un cahier annexe intitulé

Nouvelles ordinaires

(traductions de

Gazette

étrangères, d’abord par Jean Epstein), et, de manière irrégulière, par des

Relations

et des

Extraordinaires

,

nombreux jusqu’au milieu des années 1670 : traitant plus à fond des événements saillants, ces cahiers

annexes contribuèrent largement au succès de la

Gazette

, notamment en périodes de guerre et sous la

Fronde. Le volume des livraisons en a ainsi de 1635 à 1663 puis diminua jusqu’en 1678.

Théophraste Renaudot obtint dé nitivement un privilège en 1635, grâce auquel, jusqu’à la Révolution,

aucune feuille d’information générale, politique ou économique ne put se créer sans l’assentiment du

propriétaire de la

Gazette

à qui il fallait en outre payer redevance. Après la mort de Théophraste Renaudot,

en 1653, ce privilège resta dans sa famille jusqu’en 1749, et les titulaires successifs en furent : de 1653 à

1672, son ls Théophraste II Renaudot, sieur de Boissemé, avocat au Parlement de Paris ; de 1672 à 1679,

François Renaudot, neveu du précédent ; de 1679 à 1720, l’oratorien Eusèbe Renaudot, orientaliste et

académicien, frère aîné du précédent ; de 1720 à 1747, Eusèbe-Jacques Chaspoux, seigneur puis marquis de

Verneuil, secrétaire de la chambre et du cabinet du roi, introducteur des ambassadeurs et princes étrangers,

arrière-petit- ls du fondateur et neveu du précédent par sa mère Claire Renaudot ; de 1747 à 1749,

Eusèbe Félix Chaspoux de Verneuil, ls du précédent et remplissant les mêmes of ces, qui, faisant face

à des dif cultés nancières, dut vendre le privilège. Il y eut ensuite une dizaine d’années de ottement,

le privilège passant à Pierre-Nicolas Aunillon (de 1749 à 1751), premier président de l’élection de Paris,

bientôt disgracié, puis à Denis-Louis de Rabiot, seigneur de Meslé (de 1751 à 1761), d’abord associé à

Louis-Dominique Le Bas de Courmont, nancier devenu fermier général. En n, en 1761, le ministère des

Affaires étrangères s’en porta directement acquéreur, et plaça selon les époques le périodique en régie

directe ou en affermage.

La rédaction de la

Gazette

fut d’abord essentiellement assurée par Théophraste Renaudot, qui travailla

à partir des envois de divers correspondants, comme l’héraldiste Pierre d’Hozier, les frères Dupuy (qui lui

transmettaient les lettres du savant Peiresc), Jean Epstein, des généraux en campagne, ou encore parfois

Louis XIII et Richelieu eux-mêmes. Après la mort de Théophraste Renaudot, des personnalités très diverses

s’en chargèrent successivement, dont, entre 1674 et 1678, le diplomate Gabriel Lavergne de Guillerague

(également écrivain et auteur des célèbres

Lettres portugaises

), l’académicien Eusèbe Renaudot, le chimiste

Jean Hellot, l’écrivain et directeur du

Mercure

Pierre Remond de Sainte-Albine, l’homme de lettres

Jean-Baptiste Suard, ou encore l’abbé Jean-Louis Aubert.