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à sortir de sa condition et rêvant d’être poète, mais se trouvant embarqué dans une carrière théâtrale qui tourne au ridicule et
à l’échec, de même que ses amours ; condamné à la pendaison pour l’assassinat de sa femme, l’exécution tourne à la farce, son
bourreau n’étant autre que son épouse Pierina. Citons le compte rendu de Rachilde dans le
Mercure de France
(1
er
décembre
1916) : « Cette histoire pourrait tout aussi bien s’appeler : la merveilleuse psychologie du rêve mise en regard de la piteuse
réalisation de l’action […] Rien de plus vivant, ni de plus éternel que cette légende, et jamais celui qui voulut la graver sur
le marbre des palais de Vicence ne fut plus maître de son ciseau. La simplicité et la noblesse des lignes qui nous restituent le
pauvre acteur poète est incomparable. […] Tito Bassi vit dans une échoppe de savetier, sa mère était lingère chez la noble dame
Vallarciero, mais il porte en lui le démon de l’enthousiasme et il veut se créer des circonstances à le bien employer. […] C’est son
effort à la fois inutile et si noble qui le rend la risée du peuple. Mais le résultat, quand tous les roquets de la censure donneraient
de la voix sur lui, est justement ce qui doit inquiéter le moins un homme bâti pour être habité par le rêve »…
On joint une petite photographie originale (6,8 x 9,3 cm) d’Henri de Régnier assis, coiffé d’une perruque poudrée, le bas
du visage caché derrière un tricorne, avec au verso ce quatrain autographe : « Dites, ce personnage à la Vénitienne / Est-il un
Vendramin, un Corner, un Venier / Ou, tel qu’il fut jadis dans sa vie ancienne, / Celui qui maintenant est Henri de Régnier ».
Reproduit en page précédente
183.
Ernest RENAN
(1823-1892). L.A.S., Paris 6 février 1881, à un ami ; 1 page in-8.
200/250
Son ami lui avait montré à la Bibliothèque « une de ces curieuses monnaies intermédiaires entre l’islam naissant et le
christianisme, où la croix était réduite à une sorte de tronçon émoussé », qu’il aimerait citer « à propos des rapports entre
l’islamisme et les anciennes sectes judéo-chrétiennes »...
184.
Pierre REVERDY
(1889-1960). Poème autographe,
Filet d’astres
; 2 pages et demie in-4 à l’encre de Chine.
1 000/1 200
Beau poème de
L
a
G
uitare
endormie
(1919), recueilli en 1945 dans
Plupart du temps : poèmes 1915-1922
.
« La seule clef du ciel entre les rochers blancs
C’est l’aigle
Quand la lame de fer coupe la vague en deux
Ma main écrit ton nom sur la glace déserte
Un navire indécis navigue vers mes yeux
Les rayons du soleil tombent en lourdes tresses
Au bord du matin blanc »...
Reproduit en page 63
185.
Rainer Maria RILKE
(1875-1926). L.A.S. « R.M. Rilke pour M. Rodin »,
182, rue de l’Université
19 avril 1906, à
Gustave Geffroy, « homme de lettres » ; 2 pages in-8, enveloppe.
1 200/1 500
Pour l’inauguration du
P
enseur
de Rodin, devant le Panthéon, le 21 avril 1906. « Monsieur Rodin me charge de vous
écrire qu’il craint de se fatiguer trop en passant Samedi matin chez vous ; puisque l’Inauguration aura lieu à 2 heures déjà,
M. Rodin croit de faire mieux en vous proposant un rendez-vous Samedi, entre Midi et Midi et demi, au Café de la rue Soufflot
(coin du Boulevard Saint-Michel). M. Rodin espère que cela vous conviendra ainsi qu’il déjeunera avec vous dans cet endroit
pour aller ensuite ensemble à l’Inauguration »...
Reproduit en page 63
186.
Auguste RODIN
(1840-1917). L.A.S., 28 mars 1885, [à Anatole France ?], et livre avec dédicace autographe,
1911 ; 1 page in-8, et volume broché grand in-8.
500/700
28 mars 1885
. « Mon bon Génie Vous êtes encore venu me voir, et je n’y étais pas, je n’ai pu prendre de force nouvelle, dans
votre bonne parole et dans votre cordiale poignée de main »…
Auguste Rodin,
L’Art. Entretiens réunis par Paul Gsell
(Paris, Bernard Grasset, 1911, mention de Troisième édition sur la
couv.). Sur le faux-titre, sous l’envoi autographe : « A Anatole France / Auguste Rodin », on a monté une carte de visite a.s.
de Paul Gsell pour présenter au Maître « de la part d’Auguste Rodin le livre sur l’
Art
que je viens de publier en collaboration
avec lui ».
Reproduit en page 63
187.
Romain ROLLAND
(1866-1944). 2 L.A.S., 1909-1912, à une amie ; 3 pages et demie in-12 et 1 page in-8.
200/300
22 janvier 1909
. Sa lettre l’a ému : « Oui, nous sommes tous, dans la vie, de pauvres petits, bien livrés, bien malheureux
souvent : il faut nous secourir les uns les autres ; il faut nous entr’aider à parvenir à cette sérénité de l’âme, où l’on ne se ferme
pas les yeux sur le fond tragique de la vie, mais où on l’accepte avec courage, avec paix, – avec reconnaissance pour les bonnes
et belles choses qu’on y goûte, et dont une des meilleures est l’amitié ». Il viendra l’écouter « de tout cœur » chanter les œuvres
de Paul Dupin…
13 novembre 1912
: « C’est bon de sentir votre fidèle sympathie, qui nous a suivis, mon Christophe et moi,
jusqu’au bout, sans se décourager. Oui, il faut rester jeunes, malgré tout, malgré tous ; il ne faut pas se laisser rider le cœur par
les méchants »…