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200. NERVAL (Gérard de). L
ETTRE AuTOGRAPHE SIGNÉE À SON PèRE
, le D
r
Étienne Labrunie ; signée
Gérard
Labrunie
, datée
Nismes le 24 décembre
[1843], 3 pages in-8 (209 x 134 mm) sur un bifeuillet de papier pelure,
à l’encre brune, adresse autographe et marques postales au verso :
Monsieur le Docteur Labrunie / Rue
St Martin n° 72 / à Paris
; sous chemise demi-maroquin noir moderne.
4 000 / 6 000 €
B
ELLE LETTRE ÉVOquANT LE
V
OYAGE EN
O
RIENT
.
À peine rentré de son long voyage en Orient
(décembre 1842-décembre 1843), Nerval écrit à son
père, de Nîmes. Il regrette de ne pouvoir être à Paris
pour sa fête [saint-Étienne, 26 décembre], mais
annonce son retour à Paris pour le nouvel an :
À
l’âge que j’ai, on ne se sépare pas de son seul parent
sans quelque peine et c’est aussi un grand plaisir de
savoir qu’on va le retrouver et pour longtemps
. Il
évoque son futur
Voyage en Orient
:
J’ai placé
avantageusement mon voyage d’Égypte qui fera un
volume avec gravures
[projet qui n’aboutira pas] […]
j’ai d’un côté le Caire de l’autre Constantinople
bien étudiés tous les deux l’un durant cinq mois,
l’autre durant quatre
. Il préférerait cependant une
édition en volume plutôt que l’insertion dans un
journal car
Les journaux donnent de l’argent pour le
moment mais quand tout est fini, l’on se trouve au
dépourvu, fatigué seulement et malade quelquefois
.
Le récit de son retour prend la forme d’une chro-
nique : très bien reçu à Marseille par son ami Méry
(Joseph Méry, écrivain), il a ensuite visité Toulon où
il a retrouvé son ami Camille Rogier, qu’il avait vu
à Constantinople
.
Ils ont visité Arles, Beaucaire et
Nîmes :
Je n’ai de manteau que mon manteau arabe
qui était trop chaud en Égypte et paraît trop clair
par ici, mais je m’entortille encore dans ta robe de
chambre et dans ce qui me reste de garde-robe après
tant de pérégrinations, je présente un mélange de
luxe oriental et de mode européenne arriérée fort
réjouissant
... Nerval explique pourquoi il n’a
presque pas utilisé son daguerréotype :
Les composés
chimiques nécessaires se décomposaient dans les
climats chauds ; j’ai fait deux ou trois vues tout au
plus.
Il évoque ses amis peintres Dauzats et Rogier,
dont les dessins valent mieux que ceux du daguer-
réotype. Oh ! si j’étais peintre !... On m’a dit à Marseille que ce que j’ai écrit à Théophile sur l’Égypte avait paru dans
les Beaux-Arts
. En fait, cette lettre à Théophile Gautier parut dans
La Sylphide
.
Son père, Étienne Labrunie, est la seule personne avec qui il ait régulièrement correspondu, notamment au cours de ses
voyages, et plus tard pendant les dernières périodes d’internement à Passy, chez le docteur Blanche, en 1853 et 1854. La
correspondance avec son père est l’une des plus importantes sources biographiques sur Nerval. Cette lettre, où il explique
avoir hâte de rentrer, montre à quel point il s’attache à son seul parent, malgré l’absence de réponse du docteur Labrunie
de toute l’année 1843.
Collection Jules Marsan.
Œuvres complètes
, éd. J. Guillaume et Cl. Pichois, Pléiade, t. I, 1989, p. 1410-1411. — A. Marie,
Gérard de Nerval,
le poète et l’homme
. Hachette, 1914, p. 207-208.
Traces de pliures.
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