Background Image
Previous Page  360 / 476 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 360 / 476 Next Page
Page Background

145

ROUSSEL, Raymond.

Locus Solus.

Paris, Alphonse Lemerre, 1914

[24 octobre 1913].

In-8 : demi-chagrin vert, dos à nerfs, initiales

M.P.

dorées en pied, non rogné, tête dorée,

couvertures et dos conservés

(reliure postérieure).

Édition originale.

Daté sur la page de titre de 1914,

Locus Solus

a été achevé d'imprimer le 24 octobre 1913.

L'ouvrage fut un échec : “En librairie, résultat nul”, note Raymond Roussel dans

Comment j'ai écrit

certains de mes livres

.

“Le seul écho que

Locus Solus

semble avoir rencontré dans la presse au moment de sa parution

est l'article du

Gil Blas

du 10 janvier 1914, signé Robert de Montesquiou. (…) C'est à partir de

la publication de

Locus Solus

que ces deux mondains, par ailleurs si éloignés, littérairement et

humainement, ont été en correspondance et se sont, semble-t-il, rencontrés en de rares occasions”

(Bibliothèque nationale,

1913

, nº 190).

Exemplaire imprimé sur papier du Japon, enrichi d'un singulier envoi autographe signé :

à Marcel Proust

témoignage de

cordiale sympathie

Raymond Roussel

25 avril 1914

La rencontre de ces deux écrivains, aux œuvres si éloignées, séduit autant qu'elle intrigue –

semblant faire écho à celle avec Robert de Montesquiou.

Il n'y a, de prime abord, rien en commun entre

Locus Solus

ou les

Impressions d'Afrique

et l'univers

de la

Recherche

. Et pourtant les affinités, sociales comme psychologiques, existent bel et bien entre

les deux hommes. Elles ont été relevées avec précision par Michel Leiris : “Rapports entre Proust

et Roussel : gens de la même époque, tous deux de la bourgeoisie riche, et homosexuels.

Chez l'un et chez l'autre, même goût des ‘imitations’. Même façon de voir les choses au microscope.

Même culte des souvenirs d'enfance. Hantise de l'écoulement du temps et de la mort. Refuge, non

pas en Dieu, mais dans un univers bien à soi, qu'on s'est créé de toutes pièces.

Çà et là, mêmes échappées dans le vaudeville, dans le comique trivial, voire scatologique.

Façons comparables de se calfeutrer : l'un dans sa chambre garnie de liège ; l'autre, en bateau,

dans sa cabine. Même absence de conformisme, sous des dehors ‘bien-pensants’.

Manière analogue d'être subjugué par l'auréole historique de certains noms nobiliaires

(féodalité chez Proust, premier Empire chez Roussel).”

Roussel naquit boulevard Malesherbes, à deux pas des Proust. Issu du même monde,

fréquentant des amis communs tels que Reynaldo Hahn et Madeleine Lemaire, il est inévitable

qu'il ait rencontré l'auteur des

Plaisirs et les Jours

. On sait qu'il lui envoya son premier livre,

La Doublure

, hommage auquel Marcel Proust répondit par ces mots : “Comme l'Enfant-Héros

de la Fable, vous portez sans faiblir le poids d'un prodigieux outillage poétique. Vous avez,

ce qui est rare aujourd'hui, le souffle, et vous écrivez, sans perdre haleine, cent vers comme un

autre écrit dix lignes.”

1 9

1 3