En 1913, Segalen ne connaissait de Natalie Clifford Barney que son surnom : “l'Amazone”,
la mystérieuse destinataire des chroniques que Remy de Gourmont publiait dans le
Mercure de France
depuis janvier 1912. En revanche, avant de recevoir cet exemplaire, Natalie connaissait déjà
Stèles
,
qu'elle appréciait beaucoup depuis que Gourmont – déçu par
Les Immémoriaux
mais enchanté par le
recueil chinois – les lui avait fait découvrir. C'est même Gourmont qui demanda à Segalen de lui
envoyer un exemplaire du recueil afin de protéger le sien “qu'elle avait voulu [lui] voler :
vous l'avez rendue si fébrile !” (lettre à Segalen du 8 février 1913).
Lorsqu’il rédigea cette dédicace, Segalen résidait dans la province du Hunan, où il soignait,
depuis octobre 1912, le fils du président de la République, Yuan Che Kai, victime d'une mauvaise
chute de cheval. Il fit parvenir l'exemplaire à sa femme Yvonne, restée à Pékin, pour qu'elle
le remette à la poste française. La lettre qu'il lui écrit le 4 mars 1913 mentionne, mot pour mot,
la dédicace à l'Amazone (
Correspondance
, II, p. 97).
Mouillures et auréoles claires, rousseurs et petit éclat à un coin de la seconde tablette.
En français dans le texte
, Paris, 1990, nº 340 : “En même temps qu'il écrit sa première stèle, le 24 septembre 1910, Segalen
commence à rédiger l'admirable texte préliminaire en s'arrangeant ‘pour que tout mot soit double et retentisse profondément’. Il
compose ainsi un très lucide art poétique et, par la formule ‘jour de connaissance au fond de soi’, se rattache à la famille des poètes
pour qui la poésie est moyen de connaissance et tentative pour forcer les portes du monde.”
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