3
M
ARCEL
PROUST
CORRESPONDANCE INÉDITE À LOUIS D'ALBUFERA
U
NE
CORRESPONDANCE
PERMETTANT
DE
RÉÉVALUER
ENCORE
LE
RÔLE
D
'« A
LBU
»
AUPRÈS
DE
P
ROUST
,
fourmillant de détails sur la vie quotidienne, affective et littéraire de l'écrivain. Elle offre en
outre un éclairage nouveau sur certains aspects de sa vie, notamment sur ses démarches
infructueuses pour tenter d'être admis dans des clubs du grand monde.
E
NSEMBLE DE
81
LETTRES DONT
75
INÉDITES
.
La correspondance de Proust au marquis d'Albufera
n'était que partiellement connue : la famille du destinataire en avait publié quelques-unes
dans
Le Figaro littéraire
en 1966 et 1971, Philip Kolb avait intégrées celles-ci dans son édition
de référence de la
Correspondance
(1970-1993) avec plusieurs encore inconnues pour un total
de 33, avant que Françoise Leriche n'en livre 14 inédites en 1998, dont 6 du présent ensemble.
C
ONFIDENT
DES
ANNÉES
CRÉATRICES
DE
M
ARCEL
P
ROUST
, L
OUIS
S
UCHET
D
'A
LBUFERA
descendait du
maréchal d'Empire par son père et de Lucien Bonaparte par sa mère, une Cambacérès. Marquis
puis duc (1925) d'Albufera, il épousa en octobre 1904 une Masséna alliée aux Ney et aux Murat.
Marcel Proust semble l'avoir rencontré en 1903, par l'intermédiaire de Bertrand de Fénelon ou
d'Antoine Bibesco : ils nouèrent alors une amitié sincère qui, malgré le caractère complexe de
l'écrivain, dura plus de quinze ans. Si Marcel Proust lui faisait parfois peu charitablement
sentir sa propre supériorité intellectuelle, il lui reconnaissait des qualités de cœur, et se montra
avec lui d'une grande gentillesse – malgré quelques injustes éclats. Louis d'Albufera, fut ainsi
longtemps son ami le plus proche après Reynaldo Hahn : ils partagèrent leurs joies et leurs
peines les plus intimes, et Marcel Proust fut admis dans le secret de la relation du marquis
avec une jeune femme du demi-monde, Louisa de Mornand.
« "F
ILLE
PERDUE
"
DE
LA
B
ELLE
-É
POQUE
», L
OUISA
DE
M
ORNAND
rencontra Louis d'Albufera vers
le mois de décembre 1900. Née Louise Montaud dans une famille nombreuse au statut
incertain, elle se faisait appeler Louisa de Mornand en société et, dès son adolescence, vécut
en ménage à Paris avec un riche Américain marié, John Howard Johnston, auprès de qui elle
avait probablement été « placée » par sa mère, et dont elle eut un enfant en juillet 1900. Quand
ce Johnston perdit son épouse en 1901, il décida de rentrer aux États-Unis mais Louisa de
Mornand refusa de l'accompagner et le laissa partir avec l'enfant qu'elle venait d'avoir de lui
en juillet 1900.