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les collections aristophil

746

RACINE Jean

(1639-1699) [AF 1672, 13

e

 f].

L.A.S. « Racine », Paris 27 octobre [1682], à son beau-frère

Antoine RIVIÈRE, contrôleur du grenier à sel à La Ferté-

Milon ; 2 pages et quart in-8, adresse (petit trou par bris de

cachet enlevant quelques lettres, trace d’onglet sur la 1

ère

page affectant quelques débuts de lignes).

20 000 / 25 000 €

Touchante lettre familiale avant la naissance de sa nièce et filleule

Marie-Catherine Rivière

.

[Racine est resté très attaché à sa sœur Marie et à ses parents de

La Ferté-Milon. C’est là qu’il a envoyé en nourrice sa fille, Anne dite

Nanette

, née trois mois plus tôt le 29 juillet 1682 ; les deux autres

enfants, Jean-Baptiste et Marie-Catherine (quatre et deux ans), sont

auprès de lui à Paris et s’amusent avec des alouettes envoyées par

Antoine Rivière. Les Rivière attendent à leur tour à un enfant : ce

sera Marie-Catherine dite

Manon

, que Racine tiendra sur les fonts

baptismaux avec sa cousine Vitart. Une des plaies de l’époque est le

passage des gens de guerre, que les villageois sont tenus de loger ;

Racine va user de ses relations pour tenter d’exempter de cette

corvée son beau-frère (qui était médecin de l’hôpital et contrôleur

du grenier à sel), ainsi que la nourrice à laquelle il restera fidèle au

point de la nommer dans son testament.]

« Je vous suis fort obligé, Monsieur, de l’honneur que vous me faites

de vouloir que je tienne vostre enfant. Je me rendray pour cela a

la Ferté Milon, dès que j’auray sceû que ma sœur est accouchée.

Je pars demain pour aller a Fontainebleau, ou je ne serai que sept

ou huit jours. Je vous prie de faire mes complimens a ma cousine

Vitart et de lui tesmoigner la joye que j’ay d’estre son compere. Si

le temps le permet le moins du monde je meneray ma Femme, qui

aussi bien a une grande envie de voir sa Fille. Je suis bien obligé a

mon cousin Regnaut de la bonté qu’il a d’avoir quelque esgard pour

nostre nourrice dans les passages de gens de guerre. Je vous prie

de lui dire que je la lui recommande de bon cœur, et que j’auray une

extrème reconnoissance de ce qu’il fera pour elle. Pour vous si on

vous incommodoit sur ce sujet, je vous prie de me le mander, car

je n’espargneray ni mes pas ni mes soins pour vous exempter tout

autant que je pourray. Il y a des villes ou le Medecin est tousjours

exempt en qualité de Medecin de l’hospital. Informez vous tout dou-

cement de cela et sans en faire de bruit. Car peutestre je pourrois

vous faire donner cette exemption pour tousjours en cette qualité.

Sachez comment on fait ou a Chasteauthierry ou a Crespy. Adieu,

Monsieur, je souhaitte à ma Sœur un heureux accouchement. Ma

femme lui baise les mains et a vous aussi. Elle meine demain ses

enfans a Melun où elle demeurera quatre ou cinq jours tandis que je

seray a Fontainebleau. Nos enfans vous remercient de vos aloüettes.

Ç’a esté une grande réjouissance pour eux. Mais je voudrois que vous

ne nous envoyassiez point tant de biens a la fois »…

Œuvres complètes

(Bibl. de la Pléiade), t. II, p. 464.

Provenance

 : M. PACQUENOT (de Soissons), arrière-petit-neveu de

Racine par sa femme (inscription p. 4).

L’Académie française au fil des lettres

, p. 68-71.

RACINE Jean

 : voir n

os

505, 721.

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