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FLAUBERT GUSTAVE (1821-1880)

Lettre autographe signée adressée à Louise COLET

pendant la rédaction de Madame Bovary

S.l., 15 juin 1853, 4 pages grand in-4 à l’encre, signée « Ton

G. », enveloppe avec suscription et cachet de cire rouge au

chiffre de FLAUBERT (notes manuscrites de L. COLET au

dos).

30 000 / 40 000 €

Magnifique lettre de Flaubert à sa « bonne Muse » et maîtresse Louise

Colet, poétesse française, écrite en pleine nuit. En pleine rédaction

de

Madame Bovary

, il rend compte ici de ses progrès : « me sentant

ce matin, en grande humeur de style, j’ai [...] empoigné ma Bovary,

et j’ai esquissé trois pages dans mon après-midi [...]. Le mouvement

en est furieux & plein » ; il offre même ici la primeur d’un dialogue

entre Homais et Bovary qui « réuni[t], je crois toutes les bêtises que

l’on dit en province sur Paris ». Flaubert évoque également les « sots

& violents tracas » éprouvés par Louise Colet : en conflit avec l’un

de ses anciens amants Octave Lacroix, secrétaire de Sainte-Beuve,

cette dernière compte sur Leconte de Lisle (ici appelé Delisle) pour

lui servir de champion et s’opposer en duel à Lacroix.

Selon Flaubert, « sur de pareilles merdes [il faut] passer de suite

l’éponge [...]. Mais si tu tiens le moins du monde à ce que le sieur

Lacroix ou le gd Sainte-Beuve reçoive quelque chose sur la figure

ou autre part tu n’as qu’à me le dire, c’est une commission dont je

m’acquitterais avec empressement ». Flaubert prône le sang-froid en

cette occasion : « c’est que c’est toujours ce maudit élément passionnel

qui nous cause tous nos ennuis. [...] -- oui il faut se brider le cœur. Le

tenir en laisse comme un bouledogue enragé. Et ensuite le lâcher tout

d’un bond dans le style, - au moment opportun. Cours, mon vieux,

cours aboie fort & prends au ventre ». Il la rassure sur son bon droit

dans cette affaire et sur son talent, notamment concernant le poème

La Paysanne

, paru au début de l’année : « Tu t’étonnes d’être en but

[sic] à tant de calomnies, d’attaques, d’indifférence, de mauvais-vouloir.

Plus tu feras bien, plus tu en auras. C’est là la récompense du bon, &

du beau. On peut calculer la valeur d’un homme d’après le nombre

de ses ennemis et l’importance d’une œuvre au mal qu’on en dit ».

Document exceptionnel.

FLAUBERT,

Correspondance

, II, La Pléiade, p.353sv.

provenance

Christie’s France, 20/11/2007

les collections aristophil

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