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: ces fameux émaux cloisonnés sur âme d’argent (n°
191
à
214
) ; le grand kovch de
Feodor Ruckert, qui travaillait habituellement pour Fabergé (n°
206
) ; la tabatière en argent de Fabergé (n°
228
) ;
les services impériaux de Catherine II (n°
173
-
177
) et de Nicolas II (n°
180-181
) ; les œufs de Pâques, provenant
de la manufacture impériale de porcelaine (n°
231
-
233
) ; la séduisante Jeune esclave sculptée par Marie Dillon (n°
259
) ; les tableautins de Serge de Solomko (n°
268
-
269
), dont ce jeune enfant qui orne la couverture du présent
ouvrage ; les peintures d’Alexandre Benois (n°
264
) et de sa fille Hélène (n°
265
) ; les illustrateurs Alexeieff,
Lebedieff, Somoff, Bilibine, Tcherkessof, Choukhaeff ... (n°
289
à
308
), dont des gouaches originales d’Annenkoff
(n°
289
) et de Zworykine (n°
290-291
); les compositions de Narbut (n°
300
, exemplaire d’Alexandre Benois) ; les
illustrateurs d’avant-garde (n°
309
à
329
) ; et enfin, les peintres miniaturistes de notre époque, qui ont puisé dans la
plus lointaine tradition artistique russe de Palekh pour peindre, avec une étonnante précision de détail, des épisodes
des contes de Pouchkine ou des icônes religieuses (n°
345
à
366
).
Et c’est là que tu pourras voir, camarade lecteur, une chose bien étonnante : les objets les plus récents de ce livre
répondent aux plus anciens. Les uns et les autres, ce sont des icônes. Plus précisément, le dernier objet (l’icône de
la
Vierge au buisson ardent
, peinte par Catherine Schanitsyna en
2003
, n°
366
) reprend l’iconographie du premier.
Voici une vraie révolution, au sens astronomique : la planète revient à son point de départ. Et chose plus surprenante
encore : la présence, entre ces deux icônes, du « soleil noir » dont nous venons de te parler (n°
329
), et qui a
exactement la même taille graphique que l’icône lumineuse de M
me
Schanitsyna (regarde ci-dessous la photographie
que nous avons prise, en posant tout simplement l’icône sur la page en vis-à-vis du « soleil noir ») ; c’est comme s’il
s’agissait d’un astre maudit qui aurait voulu un temps éclipser la lumière jaillie des icônes, et dont la retombée dans
l’obscurité profonde laisse à nouveau cette clarté libre de nous atteindre et notre cœur libre de s’en émouvoir. Cette
victoire de la Lumière, n’est-ce pas la révolution par excellence ?
Puisses-tu donc, ami lecteur, au terme de ta promenade parmi ces témoins vivants de l’art & de l’histoire russes,
t’approprier les regards qui scandent cet ouvrage : le regard farouche du soldat inflexible qui défend hardiment la
terre russe de Sébastopol (détail de la peinture de Musyka, n°
140
) ; le regard paisible d’Alexandre à Paris (n°
104
) ;
le regard mélangé de fierté & de nostalgie du capitaine de Cosaques (n°
149
) ; le regard
rimbaldien
d’Alexandre
Sérébriakoff (n°
281
) ; le regard tout cloîtré de la jeune esclave (n°
259
) qui semble protéger sa dernière liberté, celle
de son âme ; le regard aboli de ces portraits miniatures dont l’identité s’est perdue, et celui immortel de ces icônes
innombrables ; et surtout, ce regard pur & magnifique dont Serge de Solomko, qui fut miniaturiste chez Fabergé,
anima le visage de l’enfant qu’il peignit sur sa petite plaque d’ivoire et que nous avons choisi pour illustrer notre
couverture. Que regarde cet enfant ? l’apparition subite, dans les cieux pétersbourgeois, d’un archange environné
de gloire, ou la simple lumière de l’automne qui allume un buisson ardent parmi le feuillage doré des bouleaux
de Carélie ? Plus qu’un enfant particulier, c’est l’enfance elle-même dont Solomko nous offre la vive teneur. Et ne
pourrions-nous pas y voir comme le symbole de la Russie, appelée à toujours regarder jeunement vers le haut, alors
que tant d’autres nations penchent vers la terre morbide le front livide et rabougri de leur destin achevé ? L’histoire
parlera comme elle a déjà parlé ; mais veuille bien, cher lecteur, partager dès à présent le plaisir que éprouvons à voir
dans l’enfant de Solomko comme une icône de la Russie que nous aimons.
Roch de Coligny & Goula Marette




