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La contribution de Sonia Delaunay est totalement abstraite,
excepté la carte géographique du Transsibérien en tête du
poème et la Tour Eiffel accompagnée de la grande roue en
pied.
L’interprétation de figures oblongues, courbes et circulaires,
procure une impression de dynamisme et d’éblouissement. Il
s’agit en effet de traduire en couleur le rythme et l’émotion du
poème.
La typographie, inédite pour l’époque, faite de caractères, de
corps, de polices et de couleurs différents, accompagne cette
volonté de créer un langage nouveau.
Sonia Delaunay relate ainsi sa rencontre avec Blaise
Cendrars :
Le mercredi, Apollinaire recevait ses amis dans son
nouvel appartement. A une de ses soirées, j’ai vu, assis sur
son grand divan, un petit jeune homme frêle et blond, Blaise
Cendrars
[…]
Peu après, Cendrars m’apporta La Prose du
Transsibérien et de la petite Jehanne de France et, très
emballée par la beauté de ce texte, je lui proposai de créer un
livre haut de deux mètres une fois déplié. Je m’inspirai du
texte pour une harmonie de couleurs qui se déroulait
parallèlement au poème. Les lettres d’impression furent
choisies par nous, de différents types et grandeurs, choses qui
étaient révolutionnaires pour l’époque. Le fond du texte était
coloré pour s’harmoniser avec l’illustration.
[…]
Les
contrastes de couleurs, expliqua Guillaume Apollinaire,
habituaient l’œil à lire d’un seul regard l’ensemble d’un
poème, comme un chef d’orchestre lit d’un seul coup d’œil les
notes superposées dans la partition
, parfaite définition de ce
que Sonia Delaunay et Blaise Cendrars entendaient par
« peinture simultanée ».
Le poème de Blaise Cendrars en lui-même s’inscrit également
dans l’avant-garde littéraire. Les 445 vers libres insufflent un
vent de liberté tant par leur style que par leur propos. Par ses
expérimentations formelles,
La Prose
incarne idéalement la
modernité inventive et constructive des avant-gardes et de leur
révolution plastique. Nous sommes en 1913,
La Prose
, comme
manifeste du simultanéisme, se place au cœur des débats
contemporains du cubisme, de l’orphisme, du futurisme, du
suprématisme… dans leur quête d’un langage nouveau propre
à retranscrire un monde en mutation.
Blaise Cendrars et Sonia Delaunay, le poète et le peintre, dans
un désir commun abolissant toute frontière, nous offrent une
belle leçon de fraternité artistique.
Sans doute n’y eut-il pas de plus bel exemple de collaboration
et de transversalité, données essentielles dans l’art aujourd’hui.
A
DMIRABLE EXEMPLAIRE
,
D
’
UNE IRRÉPROCHABLE FRAÎCHEUR
.
Petite fente restaurée sur 6 centimètres.