45. CÉLINE (Louis-Ferdinand). L
ETTRES DE PRISON
suivies d’un synopsis de ballet inédit.
Copenhague,
1945.
In-8, maroquin rouge janséniste, dos lisse, tête dorée, non rogné, couverture et dos, étui
(
D. H. Mercher
).
3 000 / 4 000
€
Édition originale, tirée à 53 exemplaires.
U
N DES
3
PREMIERS EXEMPLAIRES SUR
J
APON NACRÉ
(n° B), contenant chacun une lettre autographe de Céline ;
celle-ci, signée Destouches, est datée du
Mercredi 27 février 1946
, 4 pages in-12 carré.
Lettre pathétique, à Bende Johansen une élève de sa femme et surtout la jeune danoise qui avait recueilli le
chat Bébert après l’arrestation de ses maîtres.
Emprisonné au Danemark, il se lamente : …
Pensez que depuis, 10 semaines que je suis en prison je n’ai reçu
en tout et pour tout que 2 lettres de Lucette !
…Toutefois :
J’ai déjà vécu 53 ans, je vivrai bien encore quelques
semaines de plus pour voir d’une façon ou d’une autre la fin de cette épouvantable aventure… Je ne souffre
pas sauf de la tête du bras et des vertiges comme d’habitude. Mais c’est une vieille histoire qui ne guérira plus
– que j’emporterai dans la tombe…
Il repense à sa femme :
… Nos entrevues sont trop courtes pour tout ce
que nous aurions à nous dire. J’arrive chaque fois pour la voir tout ahuri, tout ébloui par la lumière, à peine
retrouvais-je mes esprits que tout est déjà terminé et je redescends dans ma solitude… Je ne m’ennuie pas. Et
puis je pense à notre abominable drame, toujours palpitant là en suspens, et il suffit à lui seul à remplir les
jours et surtout les nuits…
Il termine sur des compliments :
J’espère qu’à présent vous êtes une parfaite
danseuse et une linguiste accomplie et forcément devenue plus belle car voici le printemps, je le vois à travers
mes barreaux…
46. CÉLINE (Louis-Ferdinand). Lettre autographe signée
Dest
. à André Dézarrois,
Copenhague
,
le
24-4
[1947], 2 pages sur un feuillet in-4, écrites recto-verso à l’encre noire, c/o K. Mikkelsen,
45
A
Bredgade, Copenhague, sous chemise demi-maroquin noir moderne.
3 000 / 4 000
€
T
RÈS BELLE LETTRE AUTOBIOGRAPHIQUE D
'
EXIL
,
INÉDITE
.
Elle est adressée à André Dézarrois, haut fonctionnaire et notable, que Céline appelle ici
cher Seigneur
. Il le
connaissait depuis 1934 et avait été son hôte à Saint-Malo. Rappelons que Céline, après son odyssée à
Sigmaringen, se trouvait alors emprisonné à Copenhague, où il ne sera admis en résidence surveillée que deux
mois plus tard.
On retrouve dans cette lettre au style haletant tout le petit monde de Céline : ses ennemis (l'Ambassade,
G. de La Charbonnière) et surtout ses amis (Mikkelsen, M
e
Naud, Henri Mahé, Daragnès, Marcel Aymé, Marie
Bell, Gen Paul). Sa mère,
aveugle, est morte de chagrin
pendant qu'il était à Sigmaringen… Quant à lui :
j'ai
été bien étrillé ! martyrisé par tous les bouts… Le martyr comporte l'outrage et le glaviot des imbéciles. J'ai
été gâté. Et puis 17 mois de cellule. J'en sors enfin. J'en émerge rompu. J'ai perdu 47 kilos. Et puis 2 ans de
travail perdus ! On m'a tout brûlé à Paris. Et puis l'Allemagne. On ne peut plus être malheureux. Plus
malchanceux… Je végète à l'hôpital. Mais traqué ici même par la presse communiste…
Il parle ensuite de son avocat Mikkelsen, admirable défenseur, puis lui demande de mettre M
e
Naud en
relations avec son ami Henri Mahé :
Là je compte un admirable ami…
Cependant il doute :
Mais que peuvent-
ils ? Vous recevrez là l'inepte réquisitoire qui me condamne à je ne sais quel supplice en vertu de je ne sais
quels crimes !
Toute la seconde partie de la lettre est occupée par une longue évocation émue des deux êtres qui partagaient
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