Previous Page  104 / 290 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 104 / 290 Next Page
Page Background

102

112. HuYSMANS (Joris-Karl). Lettre autographe signée à Octave Mirbeau, [avril ? 1888], 3 pages in-12 carré

(154 x 116 mm), sous chemise demi-maroquin noir moderne.

1 500 / 1 800 €

B

ELLE ET CuRIEuSE LETTRE SuR

L’A

BBÉ

J

ULES

.

Bien que tous deux naturalistes, puis membres de l’Académie Goncourt, Huysmans et Mirbeau, qui s’étaient rencontrés

vers 1875, ne se fréquentaient guère. Ils avaient peu d’affinités, cette lettre est la seule connue de Huysmans à Mirbeau.

quand il reçut

L’Abbé Jules

, paru en avril 1888, Huysmans laissa passer du temps avant de remercier Mirbeau, peut-être

pour ne pas le heurter ; sa réponse est en effet assez paradoxale : il reproche à l’auteur d’avoir fait de l’abbé Jules un prêtre,

ce qui est pourtant la base même du roman. Cette lettre pourrait aussi faire présager de la future évolution religieuse de

Huysmans.

Mirbeau lui ayant écrit, il s’excuse de son retard :

mais de convention tacite, il était entendu que l’horreur de s’écrire des

lignes était absolue, immense.

Il a lu le roman et avoue tout de suite :

Il me déconcerte un peu, en tant qu’abbé — Je vois

pardieu bien que vous l’avez fait sardonique et que vous l’avez mystérieusement campé ! Sa vocation — si tant est qu’il

en ait une — étonne sa famille, car elle ne s’explique point — son séjour à Paris reste dans l’ombre et suggère d’hyper-

boliques et sacrilèges ruts — mais c’est là ce qui m’arrête. Il me semble qu’un prêtre arrivé comme celui-là à une rosserie

telle et à un pareil sadisme, deviendrait, fatalement, défroqué

[...]

La soutane gardée étonne.

Le grand écueil, pense-t-il en

effet, c’est la psychologie des prêtres :

Je ne crois pas que le prêtre puisse être fait par des romanciers — qui ne sont pas

prêtres. C’est si particulier, si étrange ! — une cervelle maniée, pétrie, pendant des années, toujours dans le même sens,

la physionomie, l’allure, la marche même restent ineffaçables, tant c’est puissant.

Il évoque ensuite un ami

qui croyait avoir la vocation — après une retraite, en quelques heures, il avait été sondé, éclairé,

par un psychologue de la Chartreuse plus fort à coup sûr que l’ami Bourget

[Paul Bourget]

.

Bref, pour l’abbé Jules,

inaptitude absolue à la prêtrise

, décrète-t-il :

J’eus

[sic]

donc mieux aimé l’abbé Jules pas prêtre.

Il reconnaît cependant

de grandes qualités au roman :

Il y a dedans une certaine fièvre, des vues rouges, un galop de pouls, des craquements de

doigts, des cris qui mettent le livre à part. Puis la langue, dans la scène par exemple où l’abbé se jette sur la fille, charrie

des braises

[...]. Il le loue enfin pour ses peintures d’intérieurs :

ce sens de la maison de province, de l’intimisme des

chambres un peu froides, vous l’avez comme personne. Dans le Calvaire

[1886]

, c’était manifeste déjà — et les jardins

autour ! La retraite de l’abbé revenu chez lui est étonnante, il y a là un enclos que j’ai relu, d’un charme tout pénétrant.

Lettre inédite, absente des

Lettres à Théodore Hannon

(éd. P. Cogny et Ch. Berg, Saint-Cyr-sur-Loire, Christian Pirot, 1985

et des

Vingt lettres à Théo Hannon

(éd. J.-P. Goujon, À l’écart, 1984).

113. HuYSMANS (Joris-Karl). C

ERTAINS

. G. Moreau – Degas – Chéret – Wisthler [sic] – Rops – Le Monstre –

Le Fer, etc.

Paris, Tresse & Stock, 1889

. In-12, maroquin rouge, janséniste, doublure de maroquin de même

couleur serti d’un filet doré, gardes de soie rouge, doubles gardes de papier peigne, tranches dorées sur

témoins, couverture, étui (

Georges Mercier s

r

de son père

).

15 000 / 20 000 €

Édition originale. L’ouvrage contient les meilleurs articles de Huysmans en tant que critique d’art.

u

N DES

15

EXEMPLAIRES SuR JAPON

,

SECOND PAPIER APRèS

10

HOLLANDE

.

S

AVOuREuX ENVOI AuTOGRAPHE DE

H

uYSMANS À SON AMI

L

ÉON

H

ENNIquE

:

Voici, mon cher Hennique,

un peu de sadisme mystique

et une nausée sur les temps actuels

ton J.-K. Huysmans

Huysmans rencontra Léon Hennique (1851-1935) en 1876 : le romancier naturaliste faisait ses débuts dans

La République

des Lettres

, périodique créé par Catulle Mendès. Les deux écrivains devinrent rapidement des amis proches (ils se

tutoyaient même, fait rare chez Huysmans). Tous deux firent partie du groupe de Médan et composèrent ensemble une

pantomime sur le thème de Pierrot, publiée en 1881 mais jamais représentée sur scène.