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Une passion française

En hommage, je collectionne les livres qui ont fait partie de ma formation. J’ai par exemple

la première édition d’

Ulysses

, un

Finnegans Wake

avec la signature de Joyce et beaucoup de

Français car, dans ma jeunesse, j’ai été très influencé par la littérature française.

J’ai les deux éditions de

Sylvie

, celle de

La Revue des Deux Mondes

et

Les Filles du feu

. J’ai travaillé

pendant quarante ans sur Nerval, que j’ai ensuite traduit en italien. Ma passion pour

Nerval a commencé lorsque je suis venu à Paris pour la première fois, à l’âge de vingt ans.

À Paris, deux choses m’avaient frappé : les jeunes qui s’embrassaient sur la bouche en

pleine rue – en Italie vous étiez arrêté par la police – et tous ces gens qui lisaient dans le

métro. Alors j’ai feuilleté, chez les bouquinistes, les livres les plus petits pour pouvoir les

lire dans le métro. Je suis tombé sur une petite édition de

Sylvie

. C’est de là que date ma

passion pour Nerval.

Débuts d’une collection

Je crois avoir commencé à collectionner après la publication de mon premier roman,

Le Nom de la Rose

, avec lequel j’ai gagné de l’argent. Je me suis dit : qu’est-ce que je fais avec

cet argent ? Si j’achète des bons du Trésor, je ne le vois pas, il disparaît…Mais si j’achète

des livres, je les ai là ! Il y a deux questions stupides. L’une est : combien avez-vous de livres,

suivie de : avez-vous tout lu ? L’autre est : qu’est-ce que la sémiotique ? À Londres, à la

radio, on m’a posé cette question, sans comprendre qu’il faudrait deux ou trois ans pour

expliquer…

J’ai répondu : dans votre pays, le premier qui a parlé de sémiotique a été John Locke,

en 1690, et avant lui John Wilkins a écrit un livre qui peut être considéré comme un traité

de sémiotique. En face de la station de radio, il y avait un libraire : je suis entré et j’ai vu le

Wilkins, 500 dollars, je l’ai acheté et c’est comme ça que j’ai commencé, en 1985.

L’inconscient bibliophilique

À propos de livres anciens que j’ai achetés avant de collectionner : sans doute vous

souvenez-vous que, dans

Le Nom de la rose

, il est question d’un manuscrit de la

Poétique

d’Aristote contenant la section perdue sur la comédie. J’avais décrit ce manuscrit,