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les collections aristophil

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WAGNER RICHARD (1813-1883).

MANUSCRIT MUSICAL autographe,

Violoncello.

Columbus

, [1835]; titre et 3 pages in-fol.

Autograph manuscript with music. Cello. Columbus, [1835];

title and 3 pages in-fol.

Very rare, a piece composed in Wagner’s early years,

with the cello part of Columbus opening.

15 000 / 20 000 €

Très rare manuscrit de jeunesse, partie de violoncelle de l’ouverture

Columbus

(WWV 37).

Wagner écrivit l’ouverture de

Columbus

pour un drame historique

de son ami et camarade de classe Theodor APEL (1811-1867), sur la

vie de Christophe COLOMB, qu’il fit représenter au Stadt-Theater

de Magdebourg où le jeune compositeur de vingt-et-un ans venait

d’être nommé directeur musical. Il en parle longuement dans

Ma vie

,

signe de l’importance qu’il accordait à cette œuvre de jeunesse. «La

pièce d’Apel me semblait renfermer beaucoup de bonnes choses;

elle représentait les luttes et les déboires du grand navigateur avant

son départ pour son premier voyage de découvertes. Le drame

finissait au moment pathétique où le vaisseau, sortant de la rade de

Palos, fait voile vers la conquête du Nouveau Monde. […] Je composai

pour l’œuvre de mon ami un morceau d’orchestre final et un petit

choeur que les Maures, chassés de Grenade, devaient chanter en

quittant leur nouvelle patrie. Je me décidai, en outre, à y ajouter une

ouverture que j’écrivis avec une rapidité presque présomptueuse.

J’en fis l’esquisse tout entière un soir chez Minna [Planer, actrice du

théâtre, et sa future épouse], en permettant à Apel de s’entretenir à

son gré, à haute voix, avec ma bien-aimée. L’effet que devait pro-

duire ce morceau, composé – hélas – si précipitamment, reposait

sur une idée simple, mais rendue frappante par mon interprétation.

L’orchestre dépeignait, par des figures qui n’avaient rien de très ori-

ginal, l’Océan et le vaisseau qu’il portait. Un motif violent, ardent et

langoureux à la fois, se distinguait seul dans les flots de l’ensemble.

Cet ensemble se répétait, puis s’interrompait brusquement pour faire

place à un motif joué pianissimo, doux et résonnant sous le lointain

frémissement des violons dans l’aigu. J’avais commandé trois paires

de trompettes de différentes tonalités pour jouer ce motif admirable

et séduisant comme un mirage. Elles devaient le rendre par les

nuances les plus délicates et dans les modulations les plus diverses :

c’était la terre espérée que cherchait le regard du héros, la terre qu’il

avait déjà cru entrevoir plusieurs fois, qui toujours disparaissait dans

l’Océan et qui enfin, sous le ciel du matin, se montrait réellement

aux yeux des navigateurs tel le monde immense de l’avenir. Les six

trompettes s’unissaient alors dans la tonalité principale et faisaient

retentir le motif en une magnifique allégresse. […] Mon ouverture fut

saisissante, et reçue par des tonnerres d’applaudissements. La pièce

elle-même fut jouée sans dignité et gâtée surtout par un comédien

vaniteux, Ludwig Meyer […] On ne la rejoua pas, il est vrai; toutefois

elle me donna, à moi, l’occasion d’augmenter ma popularité auprès

du public de Magdebourg par l’exécution de mon ouverture, que

l’on redemandait dans les concerts».