204
VERLAINE (Paul)
Dans les limbes.
Paris, Léon Vanier, 1894.
In-12, demi-veau rose glacé à coins
à la bradel, dos lisse orné d’une guirlande
florale, d’un vase et d’une lyre, couverture
et dos conservés, tranche de tête dorée
(Reliure E. Carayon).
Edition originale dont a été tirée 20 exem-
plaires sur Japon, celui-ci le n°20 signée
par Léon Vanier.
Rare exemplaire enrichi du manuscrit auto-
graphe signé de la pièce V du recueil, au verso
d’une feuille de soins de l’assistance publique
et de deux portraits gravés de Verlaine, l’un
par Lazard, sur Watman, daté 1888, l’autre
d’après David Estoppey, gravé sur bois par
Maurice B[aud], tiré sur papier de Chine.
Alors qu’il était à l’hôpital Broussais, Ver-
laine eut l’idée d’un nouveau recueil poétique
amoureux mais cette fois très chaste : Dans
les limbes dont il précisait « Les limbes, c’est
l’hôpital avec une visiteuse. ». La visiteuse en
question était Philomène Boudin, dite Esther,
une prostituée de 33 ans que Verlaine avait
rencontré en 1890, pour qui le poète conçut sa
dernière passion. Cet amour fait de ruptures et
de réconciliations fut humilié, jaloux, orageux
mais sincère. Le poème autographe joint à
cet exemplaire offre un tableau saisissant de
ce que fut leur relation : « Tu m’as donné, non
point à tort, Mais certes avec juste raison, Ce
surnom d’Infernal, c’est fort Bien : n’as-tu pas
toujours raison ? En effet, malgré la sincère,
Plus pur sincère, entière amour, Que je te voue
et tout entière, Sincère que soit cette amour,
Mon caractère diabolique Parfois ne sait pas
abaisser Un orgueil vraiment babélique Qui,
lui, ne veut pas s’abaisser. Ah ! courbe-le, mon
caractère, Piétine-le donc sous le tien : Mon
cœur, t’est là pour partenaire. Mon âme est
là pour ton soutien. Mon cœur qui t’a donné
ma vie, Mon âme dont tu tiens les sceaux !
Pardon pour mes péchés d’envie, De colère, et
tous crimes sots. D’ailleurs je les expie assez
Toutes ces mes infractions Loin de toi, sauf
en laps pressés, Par de telles privations ! ».
Très bel exemplaire sur japon, superbement
relié par Emile Carayon (1843-1909). Ce grand
relieur au travail impeccable était surtout
réputé pour son emploi des matières écono-
miques comme la percaline. Il livre ici une très
fine reliure en veau glacé d’une délicatesse
exquise.
Provenance
Ex-libris Pierre Duché; ex-libris EAP.
4 000 - 5 000 €
81
Livres & Manuscrits
20 février 2020