7
Lettres & Manuscrits autographes
•
26 mai 2020
Beaux-arts
2
1
BERNARD Émile (1868-1941)
L.A.S. « E. Bernard », Samedi, à une amie [Mme Marie DUCHATEAU] ;
2 pages in-4, vignette gravée sur bois.
Belle lettre ornée d’une vignette décorative
.
Il poursuit avec acharnement toutes ses besognes – son Ronsard, son
Baudelaire et ses tableaux avec « Armène » [sa maîtresse Armen Ohanian]
– mais ses cartes lui rappellent des souvenirs de Dieppe d’il y a 30 ans ;
il recommande Arques, dont l’église est une merveille. « Heureusement
que nous avons encore en France les châteaux et les lieux sacrés. Votre
nom vous vouait aux premiers et votre foi aux seconds. D’ailleurs, vous
savez si bien découvrir
l’esprit
des choses que, partout où vous irez,
votre imagination vous fournira des sensations et des sentiments. Vous
êtes des heureux de la terre qui
vivent
, c’est-à-dire
voient
et
entendent
.
J’ai très bien aperçu, à travers les quadrillés de votre papier, cette
solitude, la plage, la mer, les falaises,
les chemins creux tapissés de
mousse
. Puisque vous êtes véritablement
nichée dans la verdure
point
ne m’étonne que vous habitiez chez des
Fauvettes
»… C’est charmant
de lire son livre sur l’Égypte [
Le Parnasse oriental
, 1903], mais l’
Imitation
de J.-C.
ou une « méditation de François de Sales au style âpre » ou
Ernest Hello eût mieux convenu… Il lui souhaite « un bain salutaire de
solitude et de pensée. Votre grande âme passionnée ne peut que se
retremper en présence de ces deux facteurs bienfaisants, trop ignorés
de nos stupides progressistes à rebours »…
300 - 350 €
2
BOURDELLE Émile-Antoine (1861-1929)
L.A.S. « Bourdelle », Paris 24 avril 1897, à son ami et mécène,
Jean de MARIGNY ; 6 pages in-8.
Il exprime longuement ses condoléances pour la mort en couches
de Mme Gabriel Depeyre, belle-sœur de Mme de Marigny. « J’ai eu
l’embarras de montrer mon émotion profonde à ces tristes nouvelles, car
je dois souvent voiler mon impression sous un éloignement un masque
de réserve mondaine. Ici je n’ai pu et malgré moi devant l’horrible vérité
je découvre un peu de cette âme qu’il vaut mieux dérober aux yeux »…
Il livre des réflexions sur la douleur, la disparition du bonheur, la fragilité
de la vie humaine... « Hommes et peuples nous allons chancellants.
La matière est contre l’esprit, l’égoïsme contre le cœur ! Heureux seuls
ceux qui savent souffrir sans amertume, il faut faire bon visage à toute
douleur. Le seul bonheur, au-dessus de toute atteinte, que ce soit divin
que ce soit humain, c’est la bonté, la bienveillance pour tout et pour tous,
l’acceptation souriante de la vie avec toutes ses conséquences »… S’ils
étaient seuls, ils voyageraient ensemble dans la patrie de la beauté,
« la grande et courageuse Grèce »… Cette pensée suscite d’amères
réflexions sur la guerre gréco-turque en cours : il incrimine l’avidité et
les « valeurs ottomanes qui gonflent les cœurs à la place de la pitié.
Chrétienne notre Europe allons donc ! Chrétienne notre caste gouver-
nante ! Allons donc – l’Église c’est la Bourse ! Messe ordinaire, esprits
de basses bêtes jouisseuses, sans distinction, sans idéal sans cœur.
Il n’y a plus que de la vanité sotte et des boyaux dans ce lourd paquet
d’Europe »…
300 - 400 €
Détail du lot 28