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54

les collections aristophil

360

HUYSMANS (Joris-Karl) - LEPÈRE (Auguste).

À Rebours.

Paris : Pour les Cent Bibliophiles, 1903. —

In-8, 259 x 176 : (4

ff. premier blanc), XVII pp., (1 f.), 219 pp., (2 ff.), couverture

illustrée. Maroquin caramel, plats décorés d’une

composition géométrique de portions d’arcs de cercles

disposés autour de trois points alignés verticalement, le

tout de différents matériaux : maroquin vert, caramel et

bleu, laque noire, coquille d’œufs et nacre, points dorés

dans quelques compartiments ; dos lisse orné d’un décor

à répétition composé de « cercles perlés » et de gros points

dorés, doublures de maroquin noir orné de rangées de

gros points dorés, gardes de soie moirée noire, doubles

gardes, non rogné, couverture et dos conservés, étui

(

Pierre Legrain

).

50000/ 60000€

Remarquable édition ornée de 220 gravures sur bois en couleurs

d’Auguste LEPÈRE.

Il s’agit sans conteste du plus beau livre illustré par cet artiste, fruit

de 3 années de travail. Il réinventa, grâce en partie à cette édition,

une pratique oubliée à l’époque qui était la gravure au canif sur bois

de fil. Chaque page est ainsi ornée d’une figure ou d’un ornement

gravés selon cette technique.

L’édition, tirée à 130 exemplaires sur papier filigrané au titre de la

société «Les Cent bibliophiles», offre également un grand intérêt quant

à la typographie. Elle fut effectivement imprimée par Auguste Lepère

lui-même avec les caractères dessinés par Georges Auriol et gravés

par Georges Peignot. Elle contient en plus une préface importante et

inédite de Huysmans dans laquelle il marque sa rupture avec l’école

naturaliste et donne sa nouvelle conception de la littérature.

Précieux exemplaire spécialement imprimé pour Auguste Lepère,

revêtu d’une extraordinaire reliure de Pierre Legrain, unique dans

toute son œuvre, utilisant des matériaux aussi divers que la coquille

d’œuf, la nacre, la laque et le maroquin.

Nous rapportons le commentaire que fit Dominique Courvoisier à

propos de cette reliure dans le catalogue de la bibliothèque Marcilhac

où l’exemplaire avait été vendu en 2012 : «Cette reliure, si différente

de toutes les autres, nous incite à nous interroger sur sa conception :

il convient pour cela de nous remémorer cette profession de foi de

Pierre Legrain : «À mon avis, une reliure n’a pas en elle-même de

signification, le plat d’un livre n’est qu’un frontispice qui en résume

l’âme et nous prépare à sa lecture par le choix d’une nuance ou

d’un signe. » Jugement particulièrement éclairant dans le cas de

cette reliure baroque et précieuse, qui résume en effet l’univers du

personnage principal du roman Jean des Esseintes, et annonce son

goût des matières rares et des objets mystérieusement sophistiqués ;

un pendant en quelque sorte de sa célèbre tortue glacée d’or,

à la carapace incrustée des pierres les plus rares dont, nous dit

Huysmans, le mélange devait produire une harmonie fascinatrice et

déconcertante. On remarquera d’ailleurs que dans deux reliures de

Pierre Legrain (répertoire, n° 454 et 455) sur

A rebours

, l’artiste utilise

un jeté de triangles de maroquin et de nacre, matériau qu’il utilisera

exceptionnellement et qu’il semble bien avoir consacré à ce livre.

Du point de vue purement formel, on peut, semble-t-il, rapprocher

notre reliure de certains vases émaillés de Camille Fauré. Le dos est

orné de la répétition d’un fleuron «cercles perlés», tout à fait dans

l’esprit du vase de Dunand reproduit par Félix Marcilhac page 128,

Catalogue des œuvres de Jean Dunand

, n° 1045 » (

Bibliothèque Félix

Marcilhac

, vente Binoche et Giquello, 5 décembre 2012, n° 32).