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les collections aristophil
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DUTILLEUX HENRI (1916-2013).
MANUSCRIT MUSICAL autographe
signé,
Métaboles
(1964). ; 1 feuillet de
titre et 95 pages in-fol.
120 000 / 150 000 €
Précieux manuscrit de la partition d’or-
chestre des
Métaboles
, œuvre majeure
de la musique de notre temps.
Henri Dutilleux, auteur de deux symphonies
remarquées, avait reçu en 1959 une com-
mande du chef d’orchestre George SZELL
(1897-1970), directeur musical du Cleveland
Orchestra, à l’occasion du quarantième
anniversaire de l’orchestre. Dutilleux acheva
en 1964 ses
Métaboles
, cinq pièces pour
orchestre, qui furent créées à Cleveland le
14 janvier 1965 sous la direction de George
Szell. L’œuvre connut rapidement la célé-
brité et fut jouée dans les grandes villes
d’Amérique, avant d’être donnée en France
au Festival de Besançon par Charles Münch
le 13 septembre 1966. Elle a été publiée en
1965 chez Heugel.
Henri Dutilleux explique : « George Szell
m’avait demandé d’écrire tout spécialement
pour la plus grande formation de l’orchestre,
c’est-à-dire pour les bois et les cuivres par
quatre. Mais il me laissait évidemment toute
liberté quant aux dimensions et à la forme
de l’œuvre. Mon propos était de m’écarter
du cadre formel de la symphonie. […]
Méta-
boles
lui a plu parce qu’il s’agit, en somme,
d’un concerto pour orchestre. Chacune des
cinq parties privilégie une famille particu-
lière d’instruments, les bois, les cordes, la
percussion, les cuivres, et leur ensemble
pour conclure ». Quant au titre,
Métaboles
:
« Ce terme de rhétorique, adopté à propos
de formes musicales, trahit la pensée de
l’auteur de ces cinq pièces : présenter une
ou plusieurs idées dans un ordre ou sous
des aspects différents, jusqu’à leur faire
subir, par étapes successives, un véritable
changement de nature. Il y a
métabole
à
l’intérieur de chacune de ces pièces, mais le
même phénomène s’applique à l’ensemble
de l’ouvrage ».
Les cinq pièces s’enchaînent sans interrup-
tion, comme un concerto pour orchestre
continu, et portent l’art de la variation à
un haut degré de complexité, mettant en
valeur les différents groupes instrumentaux,
et donnant à chaque pièce une couleur ins-
trumentale particulière. La première pièce,
Incantatoire
, adopte la forme d’un rondo
où se répète un bref motif, comme une
incantation ; les bois dominent, en « foi-
sonnement sonore ». La deuxième pièce,
Linéaire
, est réservée aux cordes ; son
lyrisme (Dutilleux a parlé d’un lied) s’appuie
sur un contrepoint élaboré qui engendre une
riche polyphonie, par des divisions de plus
en plus nombreuses qui aboutissent à la
division des cordes jusqu’à quatorze parties
réelles.
Obsessionnel
, explique Dutilleux,
« adopte rigoureusement la forme d’une
passacaille dont l’ostinato, basé sur un
motif de douze sons, expose la plupart des
figures possibles », dans un mouvement et
une orchestration éclatante où dominent
les cuivres. La quatrième pièce,
Torpide
,
est construite « autour d’un accord unique,
formé de six sons et présenté dans un ordre
et des registres instrumentaux différents »,