Lot n° 382

Henriette BLANCHEUR (1797-après 1879) jeune fille de Nancy.Manuscrit autographe, Journal de Melle Henriette B. Nancy 2 janvier 1814 ; carnet in-8 de 71 pages, broché.Très intéressant journal d’une jeune fille de Nancy sur les événements de...

Estimation : 1 000 / 1 500
Adjudication : 1 000 €
Description
1814 et 1815. Henriette Blancheur, née en 1797, relate les événements qui eurent lieu à Nancy entre 12 janvier et le 8 juin 1814, puis entre le 10 mars et le 30 août 1815. Son journal débute avec le passage des troupes russes et prussiennes, l’entrée des cosaques à Nancy, « presque tous grands mais mal faits [...] habillés de peau de bêtes féroces [...] les Russes sont très méchants et nous ont fait bien du mal ». Après avoir craint de voir sa maison être la proie des flammes, la jeune fille plaint les pauvres Russes « toujours battus » et qui sont des hommes comme les autres... « On dit que les plaines de Chalon sont couvertes de morts » (1er mars). Elle voudrait voir le retour des anciens ducs de Lorraine. Le 19 mars, le comte d’Artois [futur Charles X] est arrivé à Nancy : « c’est un homme de 55 ans qui a l’air bien affable [...] je l’ai vu dans la rue St Didier cela m’a fait bien du plaisir ». Les nouvelles de la guerre entre Alliés et Français sont contradictoires, mais la ville est toujours pleine de soldats. Elle a de nouveau croisé le comte d’Artois à qui elle a voulu faire une révérence, « mais j’étois trop seisie je n’ai pas pu plier les jambes. Quand on pense que son bon frère a été guilliotiné pour avoir été trop bon ! Les monstres de parisiens. Je crois que si j’avois été au monde dans ce temps là je me serois fait guilliotinée avec lui » (31 mars). ...« On ne peut pas refuser de dire que Napoléon est le plus grand capitaine du monde car il a soutenu la guerre pendant trois mois contre toute l’Europpe mais il etoit trop ambitieux et son ambition l’a perdu. Il est malheureux maintenant et l’on est plus si coupable quand on est malheureux ». Le 10 avril, elle apprend la chute de Napoléon envoyé dans l’île d’Elbe. Les Prussiens vont quitter Nancy, mais il reviendra des Russes : « j’aimerois mieux voir arriver des loups, leur empereur est pourtant bien doux c’est domage que ses sujets ne lui ressemblent pas ». Elle espère que Louis XVIII « ce respectable Bourbon » leur rendra bonheur et tranquillité, elle se réjouit de la paix enfin signée (8 juin)... Après une interruption de 8 mois, Henriette Blancheur reprend son journal après que Napoléon eut débarqué « avec cent mille hommes de toute nation [...] commandés par le général Drouot qui est français natif de Nancy. [...] toutes nos troupes sont pour lui [...] si les soldats se rendent à Bonaparte on enverra surement les hommes mariés contre les soldats francais et alors voila la guerre civile ». 14 mars, Napoléon est entré à Lyon en force et se dirige sur Paris : « Dieu soit loué il ne passera pas par ici car nous serions perdu les Français sont plus méchants que les Russes ». On crie partout « Vive l’Empereur », on aborde la cocarde rouge. Les Alliés ont déclaré la guerre à la France, « ils ne nous ménageront pas cette fois ». Des aliments empoisonnés circulent en ville et on accuse les prêtres et les nobles, les hommes mariés sont réquisitionnés (8 mai). Les levées d’hommes sont impressionnantes bien que peu d’entre eux aient jamais touché un fusil, on parle de quelques révoltes royalistes menées par des femmes, et Henriette s’indigne de la versatilité des Français. Nancy se couvre d’ouvrages défensifs, « tout ne respire que la terreur et la mort » (12 juin). 14 juin : « l’empereur est partit de Paris pour se rendre à l’armée »... 18 juin : « on a annoncé aujourd’hui une victoire remportée par l’empereur et nous venons de voir une lettre de Strasbourg qui disoit qu’on voyoit l’ennemi et que dans huit jours il seroit ici »... Le 24 juin, elle évoque Waterloo : « Enfin toute espérance est perdue. Nous avons bien remporté quelques victoires [...] en voulant poursuivre une de ces victoires les français sont tombés dans une embuscade on les a presque tous hachés impitoyablement [...] ils criyoient en mourant vive Napoleon surtout sa garde les ennemis même vouloit les sauver mais ils repondoient la garde meurt et ne se rend pas. [...] L’empereur s’est retiré à Paris avec les débris de sa malheureuse armée »... Le soir même, un courrier annonce l’abdication de Napoléon. Puis c’est à nouveau l’entrée des Alliés, Bavarois, Russes puis Prussiens, dans Nancy, les troubles provoqués par les partisans de Napoléon, les pillages, la destruction des moissons... Le 5 juillet les Empereurs de Russie, d’Autriche et le Roi de Prusse sont à Nancy : « il paroit que nous serons encore français et nous le devons encore à Alexandre. Nous avons vu des proclamations du roi Louis 18 il montre toujours beaucoup de douceur ». Réquisitions russes, manque de vivres : « si le roi revient il reignera sur des pierres » (9 juillet). Le 13, les cloches ont sonné pour l’entrée de Louis XVIII à Paris. Toujours des passages de troupes avec brigandages et réquisitions : « Nancy a toujours été le souffre douleurs parce toutes les autres villes sont fermées et ne veulent se rendre qu’au roi ». Départ de Napoléon sous la garde des Anglais dans l’île Sainte Hélène (11 août)... Du 30 août 1815 au 3 mai 1817, Henriette n’écrit plus rien, puis à la dernière page : « le roi se soutient toujours sur les débrits de son trône mais je doute si nous pourons soutenir les impos enormes dont on est convenu de nous accabler [...] nous eprouvons une disette affreuse [...] il y a toujours des alliés en France mais pas dans notre département sans cela nous nous mangerions mutuellement » (3 mai 1817).On joint un autre carnet autographe où Henriette Blancheur a noté les principaux événements de sa vie : mariage, naissances, décès jusqu’en 1879, et a collé des faire-part et divers documents.
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