Lot n° 359

Charlotte, princesse de Rohan (1767-1841) fille du prince de Rohan-Rochefort, compagne du duc d’Enghien auprès de qui il vivait à Ettenheim (Bade) lors de son enlèvement.5 lettres autographes, dont une signée « Charlotte de Rohan »,...

Estimation : 800 / 1 000
Adjudication : Invendu
Description
[1804-1814], au chevalier Jacques ; 17 pages in-4, une adresse.Belle correspondance à l’ancien secrétaire du duc d’Enghien, pleine d’allusions au prince assassiné.20 novembre [1804]. « Il n’est surement pas de dangers que je ne brave avec plaisir si je pouvais ou vous être utile, ou soulager votre cruelle position par l’expression du plus tendre intéret »… Elle encourage le prisonnier à lui écrire, ou à confier au bon Roes…, tout ce qui le touche personnellement, et « tout ce que vous avez pu recueillir de cet objet si cher [le duc d’Enghien] si profondément regretté – si il a désiré quelque chose de moi, si il a pu former un vœu que je puisse remplir ne me laissez rien ignorer »… Elle le rassure : « On vous rend toute la justice que vous méritez et l’on est bien sensiblement occupés de vous, et de tous vos camarades d’infortune »… Il doit lui communiquer les noms sous lesquels elle peut faire passer des fonds pour lui et Schmidt (lieutenant à l’armée de Condé, arrêté en même temps que le prince) ; elle le prie de transmettre ses sentiments à M. de Verte pierre (le colonel baron de Grunstein)…30 avril 1805. Très embarrassée d’offrir si peu à celui qui mérite tant, elle sait qu’il la plaindra de ne pouvoir faire plus. « J’exige d’ailleurs que ce ne soit qu’un pis aller, et qu’il n’en soit question entre nous que lorsque vous aurez reçu les propositions de Mr le duc de Bourbon »… Cependant elle précise les siennes, avec un traitement qui serait doublé à l’époque du décès de son père, ou plus tôt si ses revenus le permettent. « Vous voudriez bien vous occupez de mes petites affaires veiller à mes intérets, et m’accompagner partoutt où les circonstances me forcerait à aller. – Vous me connaissez assez pour juger si mon caractère, si mon genre de vie peuvent vous convenir, quand à moi c’est parce que je vous apprécie parfaitement c’est parce que vous m’avez inspiré estime amitié et confiance entière que je vous offre du meilleur de mon cœur de partager mon sort. – Il ne peut qu’être triste mais le même sentiment affecte également votre ame, et c’est en le regrettant en le pleurant ensemble que nous pourons trouver quelqu’adoucissement à nos peines »…Presbourg 14 décembre [1813]. Elle l’entretient de Joseph, M. Roth… et M. Parent, à qui elle l’a recommandé ; si la demande réussit, elle lui donnera la croix de son père… Elle se plaint de la conduite de son frère Charles, de l’interruption depuis mai de sa pension de Russie, et de la nécessité de « solliciter comme grâce » la succession paternelle : « il faut employer le crédit des ministres d’Autriche, et de Russie pour l’obtenir », etc. ; puis elle fait l’éloge du général autrichien Jérôme Colloredo, dont la conduite dans cette guerre a été brillante. « Il est plein d’ame, plein d’honneur, et d’après ce que j’en ai oui dire […] je suis sure qu’il aura éprouvé une profonde et douloureuse impression en se trouvant dans la chambre de cet objet si cher, si profondément regretté »… Depuis que leurs succès permettent d’espérer un retour dans leur patrie elle éprouve des sentiments contradictoires : « Je sentais mille fois moins la douleur de sa perte alors qu’une suite de malheurs ont pesé sur son existence que lorsqu’un éclair de bonheur a semblé nous luire »… Presbourg 25 juin [1814]. Elle lui envoie la croix de Saint-Louis par le premier de la colonie qui se met en marche ; elle-même suivra dès qu’elle aura vu l’Empereur de Russie ; elle a hâte qu’il sache à quoi s’en tenir sur la place que le Prince (duc de Bourbon) lui destine. « Le Pce Louis que j’ai vu hyer m’a dit qu’il était dans une profonde mélancolie, et que sans son père, sans les liens qui le retiennent il ne pourait se décider à rester en France où tout lui rappelle si vivement cet affreux malheur. Chaque individu qu’il revoit, chaque lieu, chaque place, je conçois également qu’on puisse redouter, et desirer de les revoir. La douleur produit tant d’effets différents »… Elle aimerait voir le Prince, « mais je ne voudrais pas d’une consolation qui pourrait ajouter à ses peines »… Elle l’entretient encore d’une affaire à Carlsrühe, réclame des nouvelles d’Ettenheim, et confie son espoir de retrouver en France leurs bois, et la maison de la rue de Varenne : un « ordre du Roi » rend aux propriétaires des objets non vendus… Presbourg 4 juillet [1814]. Ce qu’il écrit de l’intérêt et de l’attachement que lui conservent les habitants d’Ettenheim l’a émue aux larmes. « C’est uniquement parce que j’ai crû qu’il pouvait vous être douloureux de revenir sur ce sujet que j’ai dit n’en parlons plus mais je dirais au contraire parlons en si vous croyez que cela puisse vous faire quelque bien, ou du moins quelque consolation »… Quant à ses propres affaires, « l’intérêt des créanciers doit passer avant tout mais […] il y aurait peut être moyen d’entrer en accomodement avec la cour de Bade et d’accepter une pension au lieu d’argent comptant »…Charavay, 1978.
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