Lot n° 276

Louise Mignot, Madame DENIS (1712-1790) nièce de Voltaire.Lettre autographe, des Délices 17 septembre [1755, au comte d’Argental] ; 4 pages in-4.Très intéressante lettre au sujet de son oncle Voltaire, du vol du manuscrit de la Guerre de 1741,...

Estimation : 2 000 / 2 500
Adjudication : 3 000 €
Description
et des coupures à effectuer dans la tragédie L’Orphelin de Chine. « J’ai mille graces à vous rendre Monsieur des soins que vous avez bien voulu vous donner pour les Campagnes [de Louis XIV]. Mr de M. [Malesherbes] est injuste d’etre faché. On s’est adressé a lui avant que d’en parler aux autres et comme il ne rendait pas justice jai pencé quil ne le pouvoit pas. Sil se plaint de ce que je lai compromis quil se plaigne aussi de ce que je n’ai pas le don de deviner. Ma sœur me mende positivement que c’est Chymene [marquis de Ximénès] qui a pris louvrage, que vous tennez ce fait de Mr de M. quil en a des preuves positives et elle ne me demende point le secret. […] A legard du manuscrit je n’en suis pas garante. Je suis a cent lieux de Paris et hors detat de le suivre ». Selon ce que lui apprend Collini, « il ne me paroit point certain que ce manuscrit vienne de Chymene. Je vous repete que sil a quelque suite et quil soit un peu etandu il ne peut vennir de lui, que les caiers que javois étoient pleins de feuilles dechirées et si eparses qu’il n’a pu avoir le temps de les choisir. Cest precisement la raison qui m’a causé le plus grand effroi lorsqu’on ma nommé Chymene. Jai jugé que louvrage devoit etre decousu et mauvais […] et jai mis tout en euvre pour le faire suprimer. J’ai senti qu’on ne manqueroit pas d’en attribuer toutes les fautes a mon Oncle, et que les gens qui favorisoient lédition seroient fort aises de dire pour leur excuse quil est de lui et qu’il se l’est fait voler. Par les precautions que jai prises on n’a point eu cette excuse la »… Pour l’instant, on n’a aucune preuve, seulement « des soupçons bien legers ». La lettre de Chymene « est de la derniere insolence. Cependant si cette affaire est conduite prudament, et qu’on letouffe, croyez que Chymene nosera pas souffler […] les eclats sont toujours facheux ; il faut les eviter […] A legard de ce que deviendra le manuscrit cest l’affaire de la Cour ce n’est plus la notre ».Puis elle parle de L’Orphelin de la Chine. « Primo je suis tres convincue de la necessité des retranchemens que vous avez bien voulu y faire, jai fait limpossible pour engager mon Oncle a les ratifier en y mettant quelqu’ordre, il m’a été impossible d’en venir a bout. Il me dit pour toute raison qu’il la faite comme cela et quil veut limprimer comme il la faite. 2ondo je n’ai jamais trouvé la derniere scene du 4ème acte poussée a sa perfection. Je lai prié avec instance de la travailler meme avant quil vous envoie la piece, je n’ai point reussi. Je n’ai obtenu que trois ou quatre vers quil vous a envoié mais je n’ai jamais pu lui faire auter les derniers vers de la tirade de Zamti ny lui faire dialoguer la scene qui laurait rendue plus fillée en developant le sentiment de Zamti qui pouvoit produire de grandes bautez si mon Oncle setoit donné la peine de le traiter ». Elle n’a pas non plus réussi à l’empêcher de donner l’ouvrage à son libraire pour les pays étrangers, et de le faire imprimer par Lambert pour la France : « Il dit pour ses raisons que sil ne la fait pas imprimer il sera prevenu et qu’on masacrera son ouvrage. Enfin Monsieur je suis tres faché de tout ceci, mais je n’ai jamais vu mon Oncle si indifferant et en meme temps si entier que dans cette occasion. Heureusement la pièce est si belle, quelle fera toujours grand plaisir. Il est desesperé de ce quon lui a changé ce vers il le croit le plus beau de louvrage Les loix vivent encor et lemportent sur vous »… Quant à Lekain, « je ne doute pas quil n’ait joué comme un ange. Je connais son talent, et ce role qui est rempli de combats de passion doit lui aller amerveille »…Ancienne collection Alfred Dupont (II, 18-19 juin 1957, n° 67).
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