Lot n° 198

[JOYES] Les QUINZE IOŸES DE MARIAGE.

Estimation : 4 500 - 5 500
Adjudication : 13 380 €
Description
Lyon, Pierre Mareschal et Barnabe Chaussard, 8 novembre 1504.
Petit in-4, maroquin bleu roi, grand fleuron central doré aux petits fers, dos à 5 nerfs orné de petits fleurons dorés, dentelle intérieure, tranches dorées sur marbrure ( Trautz-Bauzonnet ).

Barbier, III-1163 // Baudrier, XI-508 // Bechtel, 399/J-146 // Gültlingen, I,
p. 32, n° 24 // Tchemerzine-Scheler, IV-79-a // USTC, 64788 // Manque à Brunet.

(31f. sur 32, le dernier blanc manquant ici) / A-H4 / 32 longues lignes, car. goth. / 120 × 173 mm.

Très rare cinquième édition.
Longtemps faussement attribuées à l’écrivain satirique Antoine de La Sale, Les Quinze joies du mariage sont peut-être dues, toujours sans certitude, au jurisconsulte et canoniste Gilles de Bellemère (mort en 1409), qui fut successivement évêque de Lavaur, du Puy-en-Velay et d’Avignon. En parallèle de ses ouvrages de jurisprudence, il aurait donc rédigé cette satire mordante sur le mariage, un des monuments
« vraiment » précieux de la verve satirique de nos aïeux (Deschamps).
Sur le modèle des Quinze joies de la Vierge , qui sont un recueil d’oraisons dévotes, l’auteur, quel qu’il soit, raconte les peines et les misères d’un ménage pour en former un bréviaire conjugal moitié sérieux moitié plaisant (…) un petit chef-d’œuvre de style et de composition, variant la forme à l’infini (Larousse).
Dans son prologue, l’auteur compare les hommes « en liberté » au poisson q est en la riviere en frãchise qui sesbat ク va ク vient a son plaisir tant ql trouve une nasse en laqlle a plusieurs poissons q se sont prîs a la
pasture qui estoit dedãs (…) Et quant celluy poisson les veoit il travaille moult en alãt de ca ク de la por y entrer (…) Car il cuidoit que les aultres qui seans estoyent eussent tous leurs desirs … Rapidement désillusionné, il se retrouve en dueil ク en tristesse : la ou il se pêsoit avoir ioye ク liesse .
S’ensuivent quinze chapitres formant chacun une des « joies » du
mariage : la femme réclame des atours quand il faudrait acheter des bœufs ; vient le temps de la grossesse, la maison est envahie par les commères du voisinage ; en voyage, l’homme fait le chemin à pied, etc. Suprême joie, ou affront ultime, l’époux surprend sa femme en faute mais c’est avec sa belle-mère soutenue par les commères que se résoud l’affaire. À l’imitation des litanies religieuses, chaque joie se termine par une sentence faisant référence à la nasse dans laquelle l’homme s’est volontairement enfermé : Et ainsi le bon hõme est en la nasse de quoy il se repent, mais il nen est pas temps. Ainsi vivra en languissant tousiours. Et finira miserablement ses iours .
Ce texte antimatrimonial, comme un pendant grotesque aux récits d’amour courtois (Bechtel), connut un grand succès éditorial. Il parut pour la première fois à Lyon vers 1479-1480 et fut réimprimé trois fois avant 1500. Cette édition de Lyon, 1504, donnée par Mareschal et Chaussard, est la cinquième. Elle est illustrée d’un grand bois sur le titre, répété au verso du dernier feuillet de texte, représentant une demoiselle richement vêtue donnant un flacon (philtre d’amour ?) à un jouvenceau. Au verso du titre, un second bois montre l’envers du décor : un homme portant un berceau sur l’épaule, deux autres enfants pendus à ses basques dont l’un réclame sa bouillie et une femme le menaçant de sa quenouille. Ce bois est très proche, bien que légèrement remanié, d’un bois ayant servi à l’illustration du même texte dans une édition donnée par Trepperel avant 1499.
Très bel exemplaire de cette très rare édition, ayant appartenu aux bibliothèques Portalis et Fairfax Murray. C’est en tout cas le seul référencé par Bechtel et l’USTC.
Traces d’anciennes griffures sur un plat, presque invisibles aujourd’hui. Feuillet H1 en fac-similé et feuillet H4 (blanc) manquant.

Provenance :
Baron Roger Portalis (ex-libris, 1er-3 avril 1889, n° 263) et Fairfax Murray (étiquette, n° 468).
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