Lot n° 88
Sélection Bibliorare

COURBET Gustave (1819-1877). — L.A.S. « Gustave Courbet », [Ornans 10 mars 1850, à son ami Francis WEY] ; 4 pages in-8.

Estimation : 1500 - 2000
Adjudication : 5 460 €
Description
Belle lettre sur l'achèvement d'Un enterrement à Ornans.

Il lui adresse « une truite de quatre livres »... Il craint que le silence de Wey ne soit la suite de sa négligence à lui écrire quand il a perdu son père. « Je ne sais si je vous ai dit ma manière de voir touchant les morts. D'abord je ne pleure pas les morts, convaincu que je suis qu'on ne les pleure pas pour eux, mais pour soi-même, par égoïsme - je les regretterais peut-être, si la vie d'un homme était directement utile à la vie d'un autre, mais je n'y crois pas, car je n'aprécirais pas un homme basé sur un autre - je ne regreterais pas un homme parce que le temps que je metterais à le regretter je l'employrais à m'en affranchir [...]. D'autre part je suis convaincu que la douleur est une bonne chose, en personne je pourais m'y associer par lettre jamais [...] Enfin si c'est pour cela que vous m'en voulez, je vous en prie, oubliez ; laissez-moi ma liberté de penser, prenez-moi pour ce que je suis, et non pas pour ce que je devrais être ; soyez persuadé que j'agis toujours avec connaissance de cause, et jamais par oubli »...
Il travaille toujours « comme un nègre mon tableau est au trois quart et demi fait j'y apporte une persévérance, une ténacité, et j'en éprouve une fatigue maintenant, de laquelle je me croyais incapable ». Mais c'est l'été après un long hiver, et il fait bon « courir dans la nature, surtout quand on est dans son pays, et qu'on n'y a pas vu de printemps depuis 12 ans ». Il espère être à
Paris dans un mois, « car sauf le soleil, Ornans n'a rien de bien amusant pour moi »...
Il prie Wey de le mettre au courant de l'époque précise de l'Exposition, et si « les peintres exempts du jury sont forcés d'envoyer leur tableau aussitôt que les autres »...

Correspondance (Flammarion, 1996), lettre 50-2.
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