Lot n° 567

Flore SINGER (1824-1915), salonnière et femme de lettres. 7 lettres autographes signées « Flore …

Estimation : 600 - 800 EUR
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Description
Flore SINGER (1824-1915), salonnière et femme de lettres. 7 lettres autographes signées « Flore » ou « F.S. » à Georges Rivollet. Neufmoutiers (Seine-et-Marne) [château du Chemin], sans date (vers 1914-1915). 32 pp. in-8, en-têtes « Neufmoutiers, n°1 Tournan Seine-et-Marne ». 2 enveloppes. Correspondance de sa toute fin de vie, écrite au crayon, d'une écriture chevrotante, pleine de désespoir et d'interrogations sur sa foi. Émouvantes lettres évoquant en particulier son fils unique, handicapé après un grave accident de chasse, dont elle s'occupa durant 30 ans. « Mon fils n'a pas encore retrouvé le don de prendre quelqu'intérêt aux choses et jamais, il ne parle le premier de quoique ce soit. Il y a quelques jours, je le vois entrer dans ma chambre, le Figaro à la main et il me montre du doigt l'article où il est question des fêtes d'Orange et de votre triomphe personnel. « Lis me dit Louis et lis haut ». N'est-ce pas aussi le triomphe de l'amitié […] Nous n'avons pas de fruits et les géraniums sont morts ; notre jardinier a envie de pleurer aussi […]. Je m'inquiète aussi, car je ne pense pas que ce soit pour calmer ma jalousie que l'on ne vous voit plus avenue Montaigne. Nous vivons ici dans une solitude profonde qui me permet la vision perpétuelle des champs de bataille, cette fabrique de mutilés. Plus je pense à la guerre, je ne parle pas de la nôtre, mais de la guerre en général, moins je partage vos espérances d'avenir pacifique. L'homme n'a jamais voulu rester seul ; il est fait pour vivre en société, mais jamais une société ne s'est constituée sans de terribles combats. La guerre est donc dans les desseins de Dieu. À chaque respiration, nous avalons des êtres imperceptibles qui ne voudraient pas être engouffrés ; à chacun de nos pas dans la campagne, nous écrasons des milliers d'insectes qui se promènent au soleil avec délice, mais l'amour est aussi dans le plan divin : la guerre et l'amour, comment concilier des principes si contradictoires ? On ne les concilie pas, me direz-vous. Mais alors, sans lois harmoniques, comment croire à la Providence ? On s'en passe, voilà tout. Mais que ce tout me désespère ! C'est si bon de croire au bon Dieu. Et presque aussi bon de croire en l'amitié […] ».
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