Lot n° 45

MABLY (Gabriel Bonnot de). — Observations sur le Gouvernement et les loix des États-Unis d'Amérique. — À Amsterdam, chez J. F. Rosart & comp., 1784. — In-12, (2 dont la seconde blanche)-213-(une blanche) pp., broché sous couverture...

Estimation : 300 - 400 €
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Description
d'attente ; dos usagé avec trace d'étiquette manuscrite, quelques mouillures marginales, quelques feuillets froissés.
Plusieurs éditions furent imprimées en 1784, en Hollande, sans qu'il soit possible de déterminer laquelle fut véritablement l'originale.

UN OUVRAGE PUBLIE AVEC LA PARTICIPATION ACTIVE DE JOHN ADAMS. L'ouvrage se compose des lettres ouvertes que l'abbé de Mably adressa en 1783 au futur président John Adams, alors ministre plénipotentiaire des États-Unis en Hollande et chargé des négociations de la paix générale (signée en septembre 1783). John Adams joua un rôle en sous-main dans sa publication : il tenta de faire pression sur le comte de Vergennes, secrétaire d'État des Affaires étrangères, pour en obtenir la permission d'imprimer, mais celui-ci, qui était en froid avec lui depuis 1780, le renvoya au directeur de la Librairie pour suivre la procédure normale de censure. John Adams décida alors de faire publier les Observations en Hollande, et demanda au publiciste Antoine-Marie Cerisier (fixé dans ce pays-là) de corriger la version manuscrite du texte recopiée par l'abbé Chalut, puis d'envoyer les épreuves à l'abbé de Mably pour correction.

UN ELOGE DE LA DEMOCRATIE AMERICAINE, FONDEE SUR « LA DIGNITE DE L'HOMME » ET « LA PLUS SAGE PHILOSOPHIE ». L'abbé de Mably manifeste une grande admiration pour les Constitutions des États-Unis, même s'il se fonde en fait sur l'examen restreint de celles de Pennsylvanie, de Georgie et du Massachussetts : « Tandis que presque toutes les nations de l'Europe ignorent les principes constitutifs de la Société, & ne regardent les citoyens que comme les bestiaux d'une ferme qu'on gouverne pour l'avantage particulier du propriétaire ; on est étonné, on est édifié que vos treize Républiques ayent connu à la fois la dignité de l'homme, & soient allées puiser dans les sources de la plus sage philosophie, les principes humains par lesquels elles veulent se gouverner » (p. 2).

MAIS AVEC INQUIETUDES QUANT A L'AVENIR DU NOUVEAU REGIME : l'abbé de Mably exprime aussi des critiques en s'interrogeant sur la capacité de cette jeune démocratie à se prémunir contre les dérives populistes pouvant faire émerger un pouvoir autoritaire héréditaire (il observait en effet la révolution américaine à la lumière de l'expérience hollandaise du XVIIe siècle), contre la corruption, contre des tensions interconfessionnelles, et nie en quelque sorte l'intérêt d'une Constitution en ce qu'elle limiterait la liberté du législateur.

L'OUVRAGE CONDUISIT THOMAS JEFFERSON A REAGIR. En Europe à partir de l'été 1784 et ambassadeur à Paris de 1785 à 1789, Thomas Jefferson sollicita ses amis pour répondre aux observations de l'abbé de Mably sur le point des inquiétudes, ce qui donna lieu à la publication des articles sur les États-Unis par Jean-Nicolas Démeunier dans les volumes II à IV de l'Économie politique et diplomatique (1786-1788) au sein de l'Encyclopédie méthodique, et à la publication de l'ouvrage de Filippo Mazzei, Recherches historiques et politiques sur les États-Unis de l'Amérique (1788).

IMPORTANT HISTORIEN, MORALISTE ET ECONOMISTE DES LUMIERES, L'ABBE DE MABLY (1709-1785) évolua sur le plan politique vers un républicanisme intransigeant, et dans le domaine économique vers un proto-communisme tempéré.
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