Lot n° 58
Sélection Bibliorare

ZOLA (Émile). — L’Assommoir. — Paris : G. Charpentier, 1877. — In-18, 183 x 114 : (2 ff.), III, 569 pp., couverture imprimée.

Estimation : 4 000 - 6 000 €
Adjudication : 11 626 €
Description
Maroquin brique janséniste, dos à nerfs, doublures de maroquin rouge bordé d’un filet doré, gardes de soie moirée rouge, doubles gardes, tranches dorées sur témoins, couverture conservée, étui bordé (G. Mercier sr de son père 1923).

Édition originale rare du septième roman de la série des Rougon-Macquart.

EXEMPLAIRE DE JORIS-KARL HUYSMANS (1848-1907), sur papier d’édition, avec cet envoi autographe signé de l’auteur sur le faux titre :

A mon confrère et ami Huysmans // son bien dévoué / Émile Zola

Cette provenance est importante lorsque l’on sait le lien d’amitié que ces deux grands romanciers entretenaient à l’époque. Ils s’étaient rencontrés au printemps de 1876 et Huysmans n’a pas hésité à défendre son ami dans une série d’articles, comme une sorte de manifeste, intitulés Émile Zola et L›Assommoir, parus dans le journal belge L’Actualité en 1877. Cependant l’auteur de À rebours s’éloigna peu à peu du mouvement naturaliste ce qui provoqua la rupture avec son ami. Les divergences se développèrent dès 1884 et leur séparation fut effective en 1891 avec la parution de Là-bas.

L’exemplaire est enrichi d’une superbe lettre autographe signée de Zola à Huysmans, datée de L’Estaque le 3 août 1877, 4 pages in-8. Il y parle notamment de son prochain roman Une page d’amour qui constituera le huitième titre de la série des Rougon-Macquart : « Je viens de terminer la première partie de mon roman, qui en aura cinq. C’est un peu popote, un peu jeanjean ; mais cela se boira agréablement, je crois. Je veux étonner les lecteurs de L’Assommoir, par un livre bonhomme. Je suis enchanté quand j’ai écrit une bonne petite page naïve, qui a l’air d’avoir seize ans. Pourtant, je n’affirme pas que, çà et là, un pet-en-l’air ne m’enlève pas dans des choses peu honnêtes. Mais c’est là l’exception. Je convoque les lecteurs à une fête de famille, où l’on rencontrera des bons cœurs. Enfin, la première partie se terminera par un Paris à vol d’oiseau, d’abord noyé de brouillard, puis apparaissant peu à peu sous un blond soleil de printemps, qui est, je crois, une de mes meilleures pages, jusqu’ici. Voilà pourquoi je suis content, et je le dis, vous le voyez, sur un ton lyrique. »
Il aborde ensuite le théâtre : « Je m’en occuperai cet hiver, si je termine vite mon roman. Puis, le théâtre continue à me terrifier. Je sens la nécessité de l’aborder, et je ne sais vraiment par quel point commencer l’assaut. Il faudra voir. »
Il termine en ayant une pensée pour ses amis : « Poussez Céard à abattre quelque besogne. Si vous voyez Maupassant, serrez-lui la main et dites-lui que je suis sans aucune nouvelle de Flaubert, auquel je vais écrire d’ailleurs. Des poignées de main à tout le monde. »

Cette lettre a été publiée dans la plupart des éditions de la correspondance de Zola depuis celle donnée chez Charpentier en 1908.

Exemplaire de premier tirage, achevé d’imprimer en fin d’année de 1876, dont les deux feuillets de la préface datée du 1er janvier 1877, ont été ajoutés après coup.

Très bel exemplaire en reliure doublée de Georges Mercier.
Dos légèrement passé. Petites traces de mouillures claires sur un bord des deux feuillets de la préface.

Provenance :
Joris-Karl Huysmans, avec envoi de l’auteur.
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