Lot n° 88

Sigmund FREUD (1856-1939). L.S., Vienne 3 mars 1927, [au docteur Gilbert Robin] ; 2 grandes pages in-4 dactylographiées à son en-tête Prof. Dr. Freud Wien IX, Berggasse 19 (traces de plis avec légères fentes) ; en allemand.{CR}Très...

Estimation : 2500 - 3000
Adjudication : 3 900 €
Description
intéressante lettre sur sa vie.{CR}Le docteur Gilbert Robin (qui, l’année précédente, avait publié chez Gallimard un livre sur Les Haines familiales, et, après de nombreux ouvrages, en 1966, Vocation spirituelle du psychiatre) a prononcé une conférence sur Freud, dont il lui a envoyé le texte. Freud le remercie de ce texte très aimable à son égard, peut-être trop aimable en plus d’un endroit. Robin a bien reconnu le caractère essentiel de sa vie, en ce qu’elle s’est déroulée sans épreuves extérieures marquantes : « Den Hauptcharakter meines Lebens, nämlich dass es ohne auffällige äussere Schicksale verlief, haben Sie richtig erkannt ».{CR}Mais Freud tient à relever quelques erreurs, sur huit points. Il n’a jamais regretté de ne pas avoir découvert lui-même l’anesthésie locale par la cocaïne : « die lokale Anaesthesie durch Kokain nicht selbst entdeckt zu haben ». Il avait en effet pressenti cette utilisation de la cocaïne, et a donné l’idée d’essayer cet usage de la cocaïne à un de ses amis, oculiste, alors qu’il partait en voyage... Pendant ce temps, un essai fut fait à la cornée par Karl Koller... L’ami de Freud a ainsi laissé échapper cette occasion.{CR}Ce n’est pas à vingt ans que Freud est venu à la Salpêtrière : en réalité il avait 29 et 30 ans quand il revint de Paris : « Sie schreiben, ich war 20 Jahre alt, als ich an die Salpetrière kam. In Wirklichkeit war ich damals 29 Jahre alt und 30, als ich von Paris zurückkam ».{CR}Il n’a jamais eu de chaire à la Faculté de Médecine de Vienne ; il n’a jamais été que professeur privé ; il a reçu en 1902 le titre de professeur extraordinaire, en 1920 le titre de professeur ordinaire. « Ich war immer nur Privatdozent, erhielt 1902 den Titel eines ausserordentlichen Professors, 1920 den Titel eines ordentlichen Professors ».{CR}Robin dit à la louange de la femme de Freud qu’elle a abandonné ses recherches et ses études en psychologie, quand elle a appris à le connaître, dans le vrai sens du terme, parce qu’il suffisait d’un psychologue dans la famille : « Sie wissen zum Lobe meiner Frau zu sagen, dass sie ihre psychologischen Interessen und Studien aufgab, als sie mich kennen lernte, in der richtigen Meinung, dass ein Psychologe für die Familie genüge ». Freud ne sait où il a pris cela. Dans ce qu’elle lui a toujours sacrifié, les questions psychologiques n’ont rien eu à faire : « Was immer für Opfer sie mir gebracht hat, psychologische Interessen waren nicht darunter ». Elle n’est pas fille de professeur, mais nièce de deux honorables universitaires : Jacob Bernays professeur de philologie ancienne, et Michel Bernays professeur d’histoire littéraire.{CR}Sa plus jeune fille [Anna] s’occupe de psychanalyse et a fait paraître ces jours-ci son premier ouvrage sur l’analyse des enfants : « Meine jüngste Tochter beschäftigt sich allerdings mit Psychoanalyse, und hat dieser Tage ihr Erstlingswerk über die Technik der Kinderanalyse erscheinen gesehen ».{CR}Il ne peut pas confirmer que son intérêt s’est porté ces dernières années vers la philosophie antique.{CR}Gilbert Robin le décrivant comme un chef de famille craint et vénéré, Freud réplique qu’il n’a jamais donné à un membre de sa nombreuse famille l’occasion de le craindre : « Ich glaube nicht, dass ich einem einzigen Mitglied meiner zahlreichen Familie Anlass gegeben habe, mich zu fürchten ».{CR}Robin raconte aussi que les enfants Freud ont été raillés à l’école à cause de son opposition envers les professeurs. Ce n’est pas vrai. Robin connait mal Vienne s’il peut supposer que, chez les Viennois, un simple intérêt intellectuel puisse avoir de telles conséquences. La principale caractéristique des Viennois est l’indifférence, et celle-ci inspire encore aujourd’hui leur attitude envers sa personne... « Sie kennen Wien schlecht, wenn Sie annehmen, dass bei den Wienern ein rein intellektuelles Interesse solche Folgen haben könnte. Der Hauptcharakter des Wieners ist die Indifferenz und diese beherrscht wohl auch heute das Benehmen meiner Landsleute gegen meine Person »….
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