Lot n° 232

PROUST Marcel (1871 - 1922) L.A.S. « Bunnnn », Mardi [23 mai 1911, à Reynaldo HAHN; 4 pages …

Estimation : 3 000 - 4 000 EUR
Adjudication : Invendu
Description
PROUST Marcel (1871 - 1922) L.A.S. « Bunnnn », Mardi [23 mai 1911, à Reynaldo HAHN; 4 pages in-8 Belle lettre à son ami, à propos du Martyre de Saint Sébastien dansé par Ida Rubinstein. [Proust a assisté le 21 mai à la répétition générale du Martyre de Saint Sébastien de Gabriele D'ANNUNZIO, musique de Claude DEBUSSY, dansé par Ida RUBINSTEIN.] « Petit Gunimels, Pardonnez-moi monstrueux égoïsme de vous avoir mêlé à mes stupides agitations, mon état de santé était mon excuse. Et hélas, en revoyant votre lettre j'ai vu la nouvelle de cette mort [Leni Falk, née Seligman, nièce de Reynaldo Hahn, morte le 22 mai], faisant évanouir toute cette stérile agitation auprès des chagrins réels, de la vie terrible qu'on oublie trop. Depuis quelques jours je ne cessais de penser à votre pauvre petit neveu [Édouard Seligman, frère de Leni, mort en 1907] le sourd muet, à qui je pense souvent, dont je rêve souvent, un des seuls êtres pour qui je ne puisse pas croire que l'existence est finie et qu'il n'a pas ailleurs une compensation à son incomplète vie. [...] Cher Buncht, mêlé sans interruption à toute ma vie (je vous avais écrit plusieurs lettres hier). Tout ce qu'il y a d'étranger chez Annunzio s'est réfugié dans l'accent de Me Rubinstein. Mais pour le style, comment croire que c'est d'un étranger. Combien de Français écrivent avec cette précision. Comme je finis toujours par venir à vos opinions j'ai trouvé les jambes de Me Rubinstein (qui ressemble moitié à Clomenil [la courtisane Léonie de Clomesnil], moitié à Maurice de Rothschild) sublimes. Cela a été pour moi, tout. Mais j'ai trouvé la pièce bien ennuyeuse malgré des moments, et la musique agréable mais bien mince, bien insuffisante, bien écrasée par le sujet, la réclame et l'orchestre bien immense pour ces q.q. pets. Dans le temple du 3e acte, j'étais persuadé que c'était la marche des Petits Joyeux [chanson d'Aristide Bruant] qu'on jouait. Mais tout à la fin, sous le soleil aux rayons raides, après la mort de St Sébastien, il y a un bel instrument joyeux »... Et il ajoute: « C'est un four noir pour le poète et le musicien. On n'est même pas venu dire les noms ». Correspondance, t. X, n° 139, p. 288
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