Lot n° 226

[PROUST (Marcel)] — GIDE (André). Les Nourritures terrestres.

Estimation : 3000 - 4000 €
Adjudication : 4 375 €
Description
Paris, Mercure de France, 1897. In-12, bradel demi-percaline marron, pièce de titre rouge, non rogné (Reliure de l'époque).Édition originale.
L'ouvrage ne rencontra aucun écho à sa parution, avant de devenir le livre-culte de toute une génération.
Exemplaire sur vélin fort marqué d'un trèfle vert à la justification du tirage. Il n'a été tiré de ce livre que 3 exemplaires sur japon et 12 sur hollande.
Précieux exemplaire de Marcel Proust, avec cette note de la main de son ami Robert de Billy sur une garde : « Ce livre donné par Gide à Marcel Proust me fut donné par lui et j'en disposai pour Madame Politis qui avait été surprise de la valeur d'une édition originale. Certifié par moi Robert de Billy. »
Le volume comporte de nombreuses marques de lecture au crayon (soulignés et accolades) et deux annotations marginales, p. 17 et p. 22, qui semblent de la main de Proust.
La légende tenace d’une prétendue hostilité entre Gide et Proust se fonde sur l’épisode célèbre du refus de Gide de publier Un amour de Swann à la NRF, en 1912 – refus motivé, écrivit-t-il dans sa lettre de contrition de janvier 1914, par la réputation de « snob » et de « mondain amateur » qui avait pu être celle de Proust, ainsi qu’une lecture « distraite » de sa part du premier tome de la Recherche. Proust répondit que s’il avait désiré être édité par la NRF, c’était essentiellement pour le plaisir d'être lu par Gide : « Je me disais : “Si je suis édité à la NRF, j’ai grand’ chance pour qu'il me lise” » et se prétend même « extrêmement sincère » – ce dont on peut douter – en lui affirmant : « La joie de recevoir votre lettre passe infiniment celle que j'aurais eue à être publié par la NRF. »
Et pourtant, Gide est certainement de bonne foi lorsqu’il proclame à Proust : « Et maintenant il ne me suffit pas d’aimer ce livre [Swann], je sens que je m’éprends de lui et pour vous d’une sorte d’affection, d’admiration, de prédilection très singulières. » Il n’y a pas de raison, non plus, de douter de l’émotion de Proust à la lecture des Nourritures terrestres, un livre dont il loua les « plus secrètes beautés » dans une lettre à Gide de janvier 1918 (Kolb, XVI, 238), et dont l’appel à jouir de la beauté de l’instant et l’injonction à se libérer des carcans moraux n’ont pu que le toucher.
De la bibliothèque Robert de Billy (1869-1953), ami de longue date de Marcel Proust et un des modèles du personnage de Saint-Loup, diplomate et ambassadeur de France en Grèce et au Japon, avec ex-libris armorié.
Naville, n°34.
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