Lot n° 41
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Sélection Bibliorare

CORDAY (Charlotte). Manuscrit autographe intitulé « Adresse aux Français amis des loix et de la paix ».

Estimation : 80 000 - 100 000 EUR
Adjudication : 215 000, EUR
Description

CORDAY (Charlotte). Manuscrit autographe intitulé « Adresse aux Français amis des loix et de la paix ». 3 pp. in-4 sur un bifeuillet de papier vergé azuré monté sur onglet sur un feuillet de papier fort in-folio ; quelques piqûres d'épingle ; apostilles de l'époque. 

Le document fut Acheté le jour de la vente pour l'Abbaye aux Dames (Normandie) = 215 000, €

Rarissime document historique écrit de sa main, le seul conservé aujourd'hui avec quelques lettres LE MANUSCRIT QUI FUT TROUVE SUR ELLE LORS DE LA FOUILLE QU'ELLE SUBIT A SON ARRIVEE A LA PRISON DE L'ABBAYE. « Jusqu'à quand, ô malheureux Français, vous plairés-vous dans le trouble et les divisions [?] Assés et trop longtems des factieux, des scélérats ont mis l'intérest de leur ambition à la place de l'intérest général..., pourquoi, ô infortuné[e]s victimes de leur fureur, pourquoi vous égorger, vous anéantir vous-même[s] pour établir l'édifice de leur tyranie sur les ruines de la France désolée.

LES FACTIONS ECLATENT DE TOUTES PARTS, LA M[ON]TAGNE TRIOMPHE PAR LE CRIME ET PAR L'OPPRESSION, quelques monstres, abreuvés de notre sang conduisent [c]es détestables complots, et nous mènent au précipice par mille chemins divers, aveuglés par leurs assignats et plus encore par leurs insinuations perfides. Nous travaillons à notre perte avec plus de zèle et d'énergie que l'on ne nous en vit jamais pour conquérir la liberté ; ô Français, encore un peu de tems, et il ne restera de vous que le souvenir de votre existance passée.

DEJA LES DEPARTEMENTS INDIGNES MARCHENT SUR PARIS [plusieurs insurrections girondines avaient éclaté en province, notamment à Caen où Charlotte Corday avait vécu], déjà le feu de la discorde et de la guerre civile embrase la moitié de ce vaste empire ; il est encore un moyen de l'éteindre, mais ce moyen, pour être efficace, doit être prompt ; déjà le plus vil des scélérats, Marat, dont le nom seul présente l'image de tous les crimes, en tombant sous le fer vangeur, ébranle la Montagne et fait pâlir Danton, Robespierre et autres brigands assis sur ce thrône sanglant, environné de la foudre que les dieux vangeurs de l'humanité ne suspendent sans doute que pour rendre leur chute plus éclatante, et pour effrayer à jamais tous ceux qui tenteraient d'établir leur fortune sur les ruines des peuples abusés. FRANÇAIS, VOUS CONNAISSES VOS ENNEMIS, LEVES-VOUS, MARCHES, QUE LA MONTAGNE ANEANTIE NE LAISSE PLUS QUE DES FRERES, DES AMIS ; j'ignore si le ciel vous réserve un Gouvernement républicain, mais il ne peut nous donner un Montagnard pour maître que dans l'excès de ses vangeances.

Ô FRANCE, TON REPOS DEPEND DE L'EXECUTION DE LA LOI, JE N'Y PORTE POINT ATTEINTE EN TUANT MARAT, CONDAMNE PAR L'UNIVERS, IL EST HORS LA LOI ; quel tribunal me jugera ? Si je suis coupable, Alcide [autre nom d'Héraclès] l'était donc lorsqu'il détruisait les monstres, mais en rencontra-t-il de si odieux [?] O AMIS DE L'HUMANITE, VOUS NE REGRETTERES POINT UNE BETE FEROCE ENGRAISSE[E] DE VOTRE SANG, et vous tristes aristocrates que la Révolution n'a pas assés ménagés, vous ne le regretterés pas non plus, vous n'avez rien de commun avec lui.

Ô ma Patrie, tes infortunes déchirent mon cœur, je ne puis t'offrir que ma vie, et je rends grâce au Ciel de la liberté que j'ai d'en disposer. Personne ne perdra par ma mort, je n'imiterai point Pâris en me tuant [Philippe-Nicolas-Marie de Pâris qui, pour venger l'exécution de Louis XVI, avait assassiné le conventionnel régicide Louis-Michel Lepeletier de Saint-Fargeau, et s'était suicidé peu de jours après pour échapper à une arrestation certaine], je veux que mon dernier soupir soit utile à mes concitoyens – que ma tête, portée dans Paris, soit un signe de ralliement pour tous les amis des loix, que la Montagne chancelante voye sa perte écrite avec mon sang, que je sois leur dernière victime et que l'univers vangé déclare que j'ai bien mérité de l'humanité ; au reste, si l'on voyait ma conduite d'un autre œil, je m'en inquiette peu. "Qu'à l'univers surpris, cette grande action Soit un objet d'horreur ou d'admiration, Mon esprit peu jaloux de vivre en la mémoire, Ne considère point le reproche ou la gloire, Toujours indépendant et toujours citoyen, Mon devoir me suffit, tout le reste n'est rien. Allés, ne songés plus qu'à sortir d'esclavage." [citation de la tirade de Brutus dans la scène 2 de l'acte III de la tragédie de VOLTAIRE La Mort de César]

Mes parents et amis ne doivent point être inquiettés, personne ne savait mes projets. Je joins mon extrait de baptême à cette adresse pour montrer ce que peut la plus faible main conduite par un entier dévouement. Si je ne réussis point dans mon entreprise, Français, je vous ai montré le chemin, vous connaissés vos ennemis, levés vous, marchés et frappés. »

CHARLOTTE CORDAY, « L'ANGE DE L'ASSASSINAT » (Alphonse de Lamartine, ibid.). D'une famille aristocratique normande peu fortunée descendant de Pierre Corneille, Charlotte de Corday d'Armont vécut dans le grand Ouest français contre révolutionnaire. Sensible aux idées nouvelles, mais horrifiée par les massacres sous la Terreur. 

L’énigme du crâne de Charlotte Corday..….
Charlotte Corday a été exécutée ce jour, le 17 juillet en 1793. Après son exécution son corps fut enterré dans le cimetière de la Madeleine où 1343 personnes guillotinées ( dont Louis XVI et Marie-Antoinette ) furent ensevelies. A la Restauration de 1815, à la demande de Louis XVIII, les ossements du Roi et de la Reine sont envoyés dans la basilique de St-Denis et les autres ossements sont transférés dans une fosse commune du cimetière des Errancis puis dans les Catacombes. Le terrain est ensuite acheté par Louis XVIII qui va en faire ce qu'il est aujourd'hui, avec la Chapelle Expiatoire édifiée de 1816 à 1826 par Pierre François Léonard Fontaine.
Le corps de Charlotte Corday fut inhumé dans une fosse au centre du cimetière de la Madeleine qui fut désaffecté en 1794.
Son crâne, lui, n’est pas resté longtemps dans la fosse, s’il y a été un jour. On le retrouve assez rapidement chez le bourreau Sanson qui l’a certainement conservé de 1794 à 1806, date de son décès.
Le crâne de Charlotte Corday Fut-il donc subtilisé par son bourreau Charles-Henri Sanson qui l’ admirait pour son courage ou bien fut-elle déterrée de nuit par un admirateur ? Nul ne le sait mais ce qui est certain c’est que ce crâne va être connu dès les années 1820 chez le directeur du musée du Louvre, Vivant Denon. Voici d’ailleurs la liste de quelques différents propriétaires du crâne de Charlotte Corday :
1/Charles-Henri Sanson (1739-1806), exécuteur des hautes oeuvres de Paris.
2/Dominique Vivant Denon (1747-1825), directeur du musée du Louvre et collectionneur.
3/Un antiquaire du quai des Grands-Augustins.
4/Alexandre-Charles Rousselin, comte de Corbeau de Saint-Albin (1773-1847), ancien secrétaire de Danton. Mais il serait possible que ce soit son ami Danton qui l'ait obtenu directement par Sanson.
5/Auguste Gabriel Georges Duruy, dit Georges Duruy (1853-1918), historien et romancier.
6/Roland Napoléon Bonaparte, dit "Prince Bonaparte" (1858-1924), géographe et botaniste.
7/le prince polonais Dominique Radziwill (1911-1976), fils d'Eugénie de Grèce qui est la petite-fille du prince Roland Napoléon Bonaparte. Ici le crâne aurait pu être perdu avec la seconde guerre mondiale puisque pendant la guerre il est en Pologne. Mais d’après la rumeur il serait chez un descendant du prince Roland Napoléon Bonaparte ( sans garantie )..…

Il a existé 6 photos non datées du crâne de Charlotte Corday, dont l'une -  provenant des collections du Prince Roland Bonaparte, une autre photo prise pendant l'Exposition Universelle de 1889 à Paris. Sur l'écriteau, on peut lire : « Crâne de Charlotte Corday, donné au Prince Bonaparte par Victor Duruy »

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