Lot n° 117

MESSIAEN (Olivier) — 7 manuscrits musicaux autographes dont 2 signés.

Estimation : 4000 - 5000 €
Adjudication : 6 250 €
Description
[1928-1929]. En tout, environ 23 pp. grand in-folio au crayon, ratures et corrections. LES HUIT PRELUDES POUR PIANO, CHEF-D'ŒUVRE DE JEUNESSE D'UN « MUSICIEN DU SON-COULEUR », selon sa propre expression.

Première composition majeure de son œuvre pianistique, et la première inscrite à son catalogue officiel, Huit préludes dénote encore, dans sa dimension synesthésique associant son et couleur, l'influence de Claude Debussy et Maurice Ravel, mais déjà y sont mis en application deux des principes qu'Olivier Messiaen formulerait plus tard dans son traité Technique de mon langage musical : la « valeur ajoutée » dans le traitement du rythme, et les « effets de résonance » harmonique. Le 6e prélude, « Cloches d'angoisse et larmes d'adieu », est à cet égard le plus significatif. Par ailleurs, le deuil qui avait frappé le compositeur en août 1927, quand il perdit sa mère, imprègne encore de mélancolie la plupart de ces pages.
Les Huit préludes furent créés en privé le 28 janvier 1930 par Olivier Messiaen lui-même, dans les salons des éditions Durand, puis en public par Henriette Roget le 1er mars 1930, salle Érard. Cette œuvre fut la première publiée par le jeune compositeur, grâce à l'appui de son professeur Paul Dukas.
Olivier Messiaen ne composerait pas d'autre morceau majeur pour piano avant quinze ans et les Visions de l'Amen ou Vingt regards pour l'enfant Jésus. Coup d'essai et coup de maître, Huit préludes rencontra un succès durable : c'est encore avec cette suite que Toru Takemitsu découvrit l'œuvre d'Olivier Messiaen qui compta tant pour lui dans son travail de composition.

Les présents manuscrits comprennent à la fois des idées de premier jet, des esquisses fragmentaires ou d'autres très avancées, souvent avec commentaires. Certains morceaux coïncident ici avec des entités matérielles autonomes, mais plusieurs des feuillets ont servi à inscrire des réflexions, des projets, des constructions harmoniques ou des thèmes musicaux sans rapport. Par ailleurs, un même feuillet peut réunir des ébauches pour plusieurs morceaux, de même que des ébauches d'un même morceau peuvent figurer sur plusieurs feuillets disjoints. La numérotation d'ordre des préludes n'y est pas encore définitivement arrêtée.

– 1er PRELUDE : « 1. LA COLOMBE » (p. de titre et 1 p. 1/2 de musique, grand in-folio).

– 4er PRELUDE, « INSTANTS DEFUNTS » : « 1° Faire avec les éléments contenus dans cette page un prélude très ému (dans le genre de Pas sur la neige [de Claude Debussy], une nuance pp tout le temps). Court, en 2 parties. 1ère partie ré min., triste, 2e partie si maj. calme. 2° Faire un prélude furieux (comme Ce qu'a vu le vent d'ouest [de Claude Debussy]) où je me peindrai entre 14 et 17 ans, le terminer par un thème d'amour pp. 3° Faire un prélude léger, gracieux (comme la Danse de Puck [de Claude Debussy]) sur le vent, les feuilles, etc. avec des superpositions de modes, des trilles. Jolie écriture de piano, genre Jeux d'eau [de Maurice Ravel] et Cloches à travers les feuilles [de Claude Debussy]. Au milieu de ce 3e prélude un canon par m[ou]v[emen]t contraire » (3 pp. sur un bifeuillet). En dernière page du bifeuillet, un fragmet musical, et une longue note programmatique détaillée « Écrire un morceau très long à 2 pianos intitulé "Essai" en forme de menuet à 2 trios (Schumann)... » (1 p.).

– 5e PRELUDE, « LES SONS IMPALPABLES DU REVE » : « 4e prélude pour piano (en style de virtuosité comme celui en mi maj. » (1 p. 1/2). Premières idées. Sur un bifeuillet comprenant également 1. p. 1/2 de musique notée variée dont une courte ligne harmonique « pour un autre prélude triste et ému ».

– 5e PRELUDE, « LES SONS IMPALPABLES DU REVE » (3 pp.). Première esquisse de composition. Avec quelques notations musicales sur la dernière page du même bifeuillet, et mention : « Ma nouvelle œuvre intitulée "Essai" où il y aura beaucoup de superpositions de modes et des passages écrits à 12 et 16 parties réelles pourra être écrite soit pour 2 pianos, soit pour piano et orgue. »

– 6e PRELUDE, « CLOCHES D'ANGOISSE ET LARMES D'ADIEU » (avec signature du compositeur, 7 pp. de musique dans une chemise avec titre autographe).

– 7e PRELUDE, « PLAINTE CALME », ici sous son premier titre de « Douleur » (p. de titre et une p. de musique).

– PRELUDE POUR PIANO, « LE BONHEUR IMMOBILE ET CHASTE D'UN RAYON » (avec signature du compositeur, p. de titre et 2 pp. de musique). Ce morceau n'a pas été retenu, en tout cas apparemment pas tel quel, pour la suite des Huit préludes.
Partager