Description
titre sur le pat sup.
♦ Précieux dossier de travail inédit pour le catalogue des tableaux du Roi.
Le graveur Bernard-François LÉPICIÉ avait été nommé secrétaire perpétuel et historiographe de l’Académie royale de peinture et de sculpture. Auteur d’un Recueil des vies des premiers peintres du Roi (1752), il fut chargé par Charles-François Le Normant de Tournehem, directeur général des bâtiments, académies et manufactures, oncle de la Pompadour, de rédiger le Catalogue raisonné des tableaux du Roi, avec un abrégé de la vie des peintres, dont deux volumes seulement ont paru en 1752 et en 1754, consacrés aux écoles florentine et romaine, vénitienne et de Lombardie. Dans l’Avertissement du premier volume, Lépicié écrivait : « Je divise d’abord cette collection par écoles : je donne un abrégé de la vie des Artistes dont les ouvrages se trouvent dans ce magnifique Recueil, ; je trace une légère idée de leurs talens, de leurs progrès & de leur façon d’opérer, & je finis par le Catalogue de leurs tableaux, dont j’indique le sujet, & dont je marque les grandeurs avec l’attention la plus scrupuleuse. […] Ce premier volume contiendra l’Ecole Florentine & l’Ecole Romaine ; je donnerai les autres Ecoles dans le même ordre ; elles sont déjà fort avancées, & je ne compte pas en interrompre le travail ». C’est le dossier de ce travail que nous présentons ici, consacré principalement aux Écoles du Nord, largement avancé, mais que le décès de Lépicié a laissé inachevé et inédit. Les notices sont rédigées à l’encre brune sur des feuillets simples ou des bifeuillets de papier vergé, écrits recto-verso ou au seul recto. Certains sont marqués au dos ou en marge « a revoir » ou « fait », ou portent le nom du peintre ; les feuillets devaient être pliés et classés de façon à faire apparaître le titre. Plusieurs notices présentent des rédactions successives, sur la même page ou sur des feuillets séparés : notice sommaire, brouillon, mise au net corrigée, version finale…. Une note sur un feuillet liminaire indique :« Vies de quelques Peintres que M. Dénard Avocat gendre de M. Le Moyne sculpteur avoit ecritte pour moy et que je me proposois de faire servir au catalogue raisonné des Tableaux du Roy ». Si ce dossier est de la main de Lépicié, on relève de nombreuses corrections ou remarques de diverses mains que nous n’avons pu identifier avec certitude. On sait par une note manuscrite de Pierre-Jean MARIETTE à la fin de son propre exemplaire du tome I du Catalogue publié (INHA 4° F 308), qu’il fut un des des collaborateurs de Lépicié («M. Lépicié, auteur de cette Description des Tableaux du Roi, étoit mon ami. Il me pria lorsqu’il eut été chargé de cet ouvrage, de lui aider & je m’y engageai d’autant plus volontiers, que c’étoit un travail tout à fait neuf pour lui, & duquel sa fortune dépendoit en quelque façon. Il me présenta son manuscrit, je le lus, & je retouchai quelques unes des Vies des Peintres qu’il avoit composées. J’allai plus loin j’en écrivis, ou plus tost j’en recommençai un certain nombre qui me parurent trop foibles, & il les fit imprimer telles que je les lui avois fournies. Des considérations particulières n’ont pas voulu que je révélâs ce secret, tant qu’il a vécu, mais aujourd’hui qu’il n’est plus, je crois qu’il m’est bien permis de réclamer un bien qui m’appartient ») Outre Mariette, on peut penser à Carle Van Loo, à Charles-Nicolas Cochin, qui fut secrétaire perpétuel de l’Académie de peinture, à Pierre-François Basan, ou à Claude-Henri Watelet, et aussi au commanditaire Le Normant de Tournehem. Un brouillon de deux lettres, en marge d’une notice sur Rubens, a fait avancer le nom de Jean-Marc Nattier, à qui ce manuscrit avait été d’abord attribué (son nom figure dans le titre gravé sur le coffret renfermant ce manuscrit) ; il s’agit de l’exécution et du paiement d’un portrait de la marquise de Pompadour: « Je suis incertain, M. si vous avez reçu la lettre que j’ai eu l’honneur de vous ecrire au sujet du portrait de Madame la Marquise de Pompadour et dans la quelle je vous priois de m’honorer d’un mot de reponse. Il s’agiroit de savoir si je dois presenter mon memoire a M. le Directeur General, ou bien si Madame la Marquise en ordonnera le payement comme elle l’a fait pour M. Boucher. […] Je ne vous parlerez point de mes peines ni de 9 mois de travail que j’ai employez a faire cinq [têtes biffé] portraits de suite pour parvenir a executer celui que j’ai eu l’honneur de presenter a Madame la Marquise. Cependant comme il n’en existe qu’un c’est aussi sur luy que je dois m’arrêter, et je ne puis mieux faire que de m’en rapporter a la bonté genereuse de Madame la Marquise. Tout ce que j’ai pû faire pour parvenir a le rendre tel qu’il est, doit s’oublier, amoins que par amitié pour un artiste chargé de famille vous ne voulliez y interresser la bonté genereuse de Madame la Marquise.
Au reste, Monsieur, je vous avoue que je tremble quand il faut mettre le prix a mes ouvrages. Si vous trouvez que ce soit trop de... vous aurez la bonté de retrancher ce que vous jugerez a propos, et tout ce que vous ferez sera bien fait [...] – Monsieur En vous accusant la reception du rescipicé de 1500 ll je ne puis que vous rendre mile graces de vos bons offices pour moi auprès de Madame la Marquise de Pompadour. Je vous supplie encore M. de vouloir bien lui temoigner combien je suis penetré de reconnoissance d’un payement si genereux, je n’aurois pas manqué d’aller moi même l’en remercier si je n’étois arreté par une maladie violente pour la quelle j’ai déja été seigné quatre fois en vingt quatre heures »... Ce dossier garde donc une partie de son mystère, et donnera du grain à moudre aux historiens de l’art.
Le dossier comprend des notices sur les tableaux, généralement numérotées (nombre 5...), avec un bref descriptif technique (technique, support, dimensions), et un commentaire détaillé, ainsi que des vies de peintres. On relève les rubriques suivantes :
« Tableaux a voir qui sont placés dans la Gallerie d’Apollon, ou plustot dans le Cabinet du Roy au Luxembourg ».
Un feuillet : « Rubens Une fuite en Égypte (nombre 26 fait) », brouillon et mise au net ; au dos : « Bamboche (Pierre de Laer, dit) un marechal ferrant », brouillon et mise au net.
En marge de ces 2 pages, les brouillons des deux lettres concernant le portrait de la Pompadour.
Le TITIEN : Le portrait du Marquis d’Elgouastre [du Guast]. Jupiter amoureux d’Antiope [différent du texte imprimé au t. II ; le commentaire de Crozat est ici copié sans indiquer la source] ; Paul Veronese : Rebecca. [École française]. Jeannet. Vouet. Le Sueur. Poussin. Le Brun. Mignard. Claude Gelée dit le Lorrain. Noel Coypel. Santerre. Antoine Coypel. Vivien. Rigaud. Puis Le Titien. Bassan. Abraham Mignon. HOLBEIN ou « Holbens ».
1 Warham archevêque de Cantorberi.
2 Anne de Clèves.
3 Le portrait d’un mathématicien.
5 Portrait de Thomas Morus.
6 Portrait d’Erasme.
7. Portrait de Cromwel.
8 Portrait d’homme.
9 Portrait d’homme.
10 Le Sacrifice d’Abraham. Le portrait d’Holben peint par lui-même (au dos, Netscher : Dame flamande à sa toilette).
BAMBOCHE. – Abregé de la vie de Pierre de Lare (dit Bamboche). –
1 Un maréchal ferrant. 3 Une fileuse et un homme endormi.
Abregé de la vie de Jean Guillaume Baur.
BERCHEM.
– Abregé de la vie de Nicolas Berchem.
– Un païsage orné
de figures d’animaux.
– Autre tableau de païsage orné de figures.
Abregé de la vie de Hans Bol.
BREUGHEL (Pierre).
1 Retour de chasse des Nymphes de Diane.
4 Orphée aux enfers.
5 Un tableau de païsage où sont représentés des chasseurs qui arrivent a une hotellerie.
7 Bataille de Prague. Une bataille.
BREUGHEL (Jean).
– Abregé de la vie de Breughel (Jean) dit Breughel de velours.
– Une tempête.
BRIL.
– Abregé de la vie de Paul Bril. –
1 Un païsage orné de figures.
2 Un marché de bestiaux dans le CampoVacino.
4 St Jean Baptiste dans un païsage.
5 Autre païsage avec St Jérôme.
6 Un paysage orné de figures (au dos Polenburg : Bain de Diane).
7 Autre païsage orné de figures.
8 Autre païsage où paroit Orphée.
9 Autre païsage avec le sujet de Rebecca et d’Eliezer.10 Autre païsage avec une chasse au cerf.
11 Autre païsage avec une marine.
12 Autre chasse au cerf.
13 Autre païsage.
14 Un païsage ou paroit Pan et Syrinx.
15 Autre païsage dans lequel paroit Diane et Calisto.
ELSHEIMER
« Adam Elseimer ». Une fuite en Égypte.
METZU Gabriel.
[Abrégé de sa vie].
MIGNON Abraham.
[Abrégé de sa vie].
NETSCHER. – Abregé de la vie de Gaspard Netscher. – Le maitre de
basse de violle. – Le maitre à chanter.
RUBENS. 9 La Vierge dans une gloire. 24 Un païsage orné de figures.
25 Tomyris. 26 Une fuite en Égypte. 27 Le portrait de Marguerite de Valois.
30 Fête de village à la flamande. Loth et ses filles sortant de Sodome. La
maison de campagne de Rubens. Plus une liste sommaire.
VAN DYCK. – Abregé de la vie d’Antoine Vandick (4 versions). –
1 Christ en croix.
2 Le Martyre de St Sébastien.
3 Le portrait de Marie de Medicis.
4 La Sainte Vierge et St Antoine de Padoue.
5 Une descente de croix.
6 La Vierge et l’enfant Jésus, accompagnés de deux figures.
7 Le portrait d’un seigneur.
8 La Vierge, le Roi David et la Magdeleine.
9 Les portraits de deux Palatins.
10 Le portrait de l’Infante Elisabeth.
11 Autre portrait de la Reine Marie de Medicis.
13 Le portrait de Vandyck.
15 L’Annonciation de la Vierge avec le St Esprit dans une gloire, copie d’après le Titien.
16 Vénus faisant forger des armes pour Énée.
17 Le portrait de Rubens et de son fils.
18 Le portrait de la femme de Rubens et de sa fille.
VAN MIERIS.
[Abrégé de sa vie].
VAN OSTADE (Adrien).
[Abrégé de sa vie].
Citons, à titre d’exemple, la version définitive de cette notice, écrite en marge du premier brouillon : « RUBENS. Nombre 9 fait. La Vierge dans une gloire. Tableau peint sur bois, ayant de hauteur 4 pieds 1 pouce
½ sur 3 pieds de large. Je ne sçais si je me trompe, mais j’ai toujours pensé que Rubens avoit voulu donner dans ce tableau une leçon sur le coloris. La composition en est singulière : cinq groupes d’anges liés par des nuages et par d’autres anges qui sont dans les intervales forment un tour ensemble qui entoure la vierge placée dans une gloire. Elle tient l’enfant Jésus qui l’embrasse et dont la tête est, pour ainsi dire, couronnée de chérubins. Dans le nombre de ces anges il y en a un prosterné qui adore le Sauveur. Quand j’ai dit que je pensois que Rubens avoit voulu donner une leçon sur le coloris, c’est que pour parler juste ce tableau n’est composé, que par la couleur. Ce sont les différens tons de chairs qui se trouvent dans ces cinq groupes d’enfans, plustôt que le choix de leurs attitudes, qui doivent décider le mérite de ce morceau, en faire l’objet de l’étude de tous ceux qui veulent devenir coloriste : en un mot ces enfans ne sont point l’ouvrage de l’art, c’est celui de la nature, [le sang y paroit circuler sous la peau, biffé] on y voit toute la molesse et l’indécision pour les contours de cette même nature à peine formée ».