Description
datées entre 1769 et 1774).
Dimensions des compositions hors marges : environ 510 x 890 mm.
Demi-basane rouge à coins du XIXe siècle, dos lisse orné de filets dorés. (Reliure légèrement frottée, coins émoussés.)
Spectaculaire suite complète, en premier tirage, des 16 estampes commandées à la France par l’empereur de Chine pour célébrer ses victoires militaires. À la suite de ses conquêtes en Haute-Asie menées de 1755 à 1759, l’empereur de Chine Qianlong voulut immortaliser ses faits d’armes en décorant le palais Zi Guang Ge de Pékin de 16 peintures illustrant ses propres poèmes relatant la campagne. Il confia le soin à quatre missionnaires établis à Pékin, les jésuites Giuseppe Castiglione, Ignatus Sichelbarth, Jean-Denis Attiret et Jean Damascène, d’en réaliser les esquisses préparatoires.
Pour que la commande impériale aboutît à un engagement de la couronne de France, il fallut un concours de circonstances extraordinaires. Lorsque les dessins furent terminés, Qianlong, décidé à les faire graver en Europe, chargea le vice-roi de Canton de prendre des informations à cet égard. Les Anglais furent d’abord pressentis, mais le père Le Febvre, supérieur de la mission française des jésuites à Canton, ainsi que la Compagnie des Indes, intercédèrent en faveur de la France, qui finit par emporter la commande grâce à l’intervention du ministre Bertin. Exceptionnelle dans l’histoire de l’art français, l’aventure éditoriale la plus exotique du règne de Louis XV fut exécutée sous la direction de Charles-Nicolas Cochin, garde des dessins du Cabinet du Roi, d’après les dessins originaux reçus de Chine. Les 16 compositions furent gravées à l’eau-forte et au burin entre 1767 et 1774, par Saint-Aubin, Le Bas, Aliamet, Prévost, De Launay, Choffard, Née et Masquelier. Fait unique dans l’histoire de l’estampe, quatre des planches portent la mention « c. n. cochin direxit » !
La commande de l’empereur était de 100 exemplaires, mais pour assurer la bonne réception d’un nombre suffisant en Chine, il en fut imprimé 200. Quelques épreuves, tirées en surnombre, restèrent en France. La livraison, chaotique, s’étendit de 1772 à 1775, date à laquelle l’ensemble des estampes avait atteint la Chine, avec les cuivres originaux et deux presses à taille-douce destinées à y diffuser la technique de la gravure sur cuivre. La série des Batailles, dessinée à Pékin, gravée à Paris, imprimée en France puis en Chine, dévoile un aspect inédit des échanges culturels et technologiques entre l’Orient et l’Occident.
♦ Rare exemplaire de ce monument de la gravure.
RÉFÉRENCES
Henri Cordier, « Les conquêtes de l’empereur de la Chine », Mémoires concernant l’Asie orientale, Paris, tome I, 1913, pp. 1-18 ; Paul Pelliot, « Les Conquêtes de l’empereur de la Chine », T’oung Pao, archives concernant les langues... de l’Asie orientale, XX, août 1920-1921; Pascal Torres, Les Batailles de l’empereur de Chine: gloire de Qianlong célébrée par Louis XV, une commande royale d’estampes, catalogue de l’exposition au Musée du Louvre, 2009 ; François Courbouin et Marcel Roux, Bibliographie de la gravure française, I, p. 47, 51, 52, 252 ; II, p. 123-124