Lot n° 34

[PORTULAN]. ATLAS NAUTIQUE MANUSCRIT — Marseille, Honoré Boyer, 1648. — Atlas grand in-folio (570 x 380 cm) de 8 cartes doubles, dessinées à l’encre carbone, peintes à la gouache et rehaussées à la feuille d’or, sur parchemin...

Estimation : 100 000 - 200 000 €
Adjudication : 266 500 €
Description
contrecollées sur carton.
Première carte légèrement fendue en son centre, petites décolorations aux coins des cartes.

Pleine basane fauve d’époque, dos lisse, plats à la Du Seuil, double encadrement de filets dorés sur les plats avec fleurons dorés dans les angles, décor doré central fait d’une couronne et de fleurs, gardes de papier marbré. Mors largement fendus avec manques aux coiffes et aux coins, le plat supérieur est presque détaché et le dos porte de large déchirures, épidermures, frottement sur les plats et coupes, anciens liens manquants.

Précieux ensemble de huit cartes marines dites Portulan reliées en atlas, réalisées à Marseille en 1648 par un certain Honoré Boyer.
Ce volume est l’unique témoignage de l’ouvrage de ce talentueux cartographe auparavant inconnu.

TEXTE

L’atlas a été réalisé en 1648 par un carto - graphe marseillais inconnu avant l’apparition du volume, Honoré Boyer. Absent de tous les répertoires spécialisés, il paraît avoir été un cartographe amateur, puisant notamment ses sources dans les atlas espagnols, portugais et italiens pour les grandes cartes nautiques d’Eu - rope, de Méditerranée et d’Amérique comme le montrent les toponymes utilisés. Marseille était au XVII e siècle l’un des centres importants de production de cartes marines. On retrouve une famille Boyer de Fonscolombe, marchands de tissus présents près de Toulon au XVI e et à Aix à la même époque. Ces luxueuses cartes marines indiquent aux navigateurs les différents ports, les fleuves navigables, le relief des côtes avec ici les pays qui les administrent. Notre manuscrit contient les cartes pour l’archipel grec, la Méditerranée, la côte ouest européenne et la partie nord de l’Afrique de l’Ouest, les caraïbes et les côtes américaines, l’île d’Elbe, la Sicile, Malte, et une mappemonde. Elles sont ornées des blasons des pays, roses des vents fleurdelisées, navires, monstres marins, curiosités, monuments, ban - deaux et encadrement. Cette richesse d’orne - mentation indique que notre volume faisait partie des ouvrages de luxe, réalisés pour de riches clients et devaient probablement être consultables sur la terre ferme, en bibliothèque et conservés dans des collections sur terre ferme. Ces instruments, dont la production durera jusqu’au XVIII e siècle, ne seront détrôn és que par l’apparition des grands atlas nautiques imprimés aux Pays-Bas.

ICONOGRAPHIE
Liste des huit cartes :
− Archipel grec : à noter, plusieurs îles sont entièrement dorées ; Rhodes et Chios sont recouvertes de leur drapeau.
− Méditerranée : enrichie de deux scènes de chasse en Afrique du Nord (chasse à l’autruche et au sanglier), une représentation du Christ portant la croix et un Maure dans une tente. Armoiries d’Espagne, de France, d’Autriche et de l’Empire ottoman, une seule ville est représentée, sans doute Marseille : la vue cavalière du port est surmontée d’un drapeau, une croix blanche sur fond bleu. - on relève également la mention du Bastion de France en Afrique du Nord, concession fondée par les Marseillais au XVI e siècle que richelieu avait placée sous la protection royale.
− Façade ouest de l’Europe et du Maroc avec Terre-Neuve et l’Islande.: enrichie d’un dessin de chameau au Maroc. On remarque au large les archipels des Açores et Ténérife.
− Les Caraïbes entourées du continent américain depuis le Canada jusqu’au nord du Brésil : le cartographe y a représenté le Canada (Nove Franse), Terre- neuve, la Florida, le Mexique (Nove Espana, Mexica), toutes les îles des Caraïbes (Cuba, Spaignola, Barbudo, Granada, etc.), le Pérou jusqu’à Lima, l’Amazone et le nord du Brésil. La côte ouest du continent américain est représentée du sud du Mexique jusqu’à Lima. Enfin, à l’est, représentation d’une partie de la côte ouest de l’Afrique.
− Ile d’Elbe : « Le plan de lile de Lelbe Porte Ferraire et Plomb. Faict par moy Honnore Boyer de Marseille, 1648 ». Portoferraio (Porte Ferraire) et, dans une moindre mesure, Longone (Porte Lengon) sont assez précisément décrits avec vue cavalière de la ville et des fortifications. Dans cette carte et les deux suivantes, l’intérieur des îles est décrit, avec noms des localités et représentation de reliefs.
− Sicile et l’est de la Calabre : « Le Plan de lille de Sesille e par[tie] de la Calabre. 1648». Carte très détaillée indiquant la toponymie de toute l’île, avec des plans plus précis pour Messine, Palerme, etc., et une représentation de l’Etna en éruption.
− Malte. «Le plan de lile de Malte». Comme pour la Sicile, la carte relève toutes les localités, avec un plan de La Valette et la représentation d’une palmeraie et d’un jardin au nord. A l’est, représentation de l’île de Comino (Cumin) et façade ouest de l’île de Gozo.
− Mappemon : « Typus orbis Terrarrum ». En pied, calligraphiée en lettres capitales, fameuse énigme sous forme de poème évoquant la carte géographique : « Ma mer neut iamais deau mes chanps sont infertiles Ie nay point de maison mais iay des grandes villes Ie reduis en un poinct mille ouvrages
divers Ie ne suis presque rien et ie suis lunivers ». Superbe planisphère sous forme ovale ; la Nouvelle-Guinée est représentée à l’ouest. Plusieurs traits à la mine de plomb subsistent, laissant voir des légendes qui n’ont pas été reprises à l’encre, le quadrillage dont s’est servi le cartographe ainsi qu’un premier cercle non retenu pour contenir la mappemonde.
Toutes les cartes sont encadrées d’une bordure peinte en plusieurs couleurs avec rehauts d’or et portent, dans les angles, un drapeau sur fond bleu avec, au centre, une croix noire entourée
de blanc. (Cette bannière est utilisée dans une carte de François Ollive de 1662 pour figurer
la Provence).
Partager