Lot n° 173

MAUPASSANT Guy de (1850-1893). POÈME autographe signé « Guy de Maupassant », À Madame la …

Estimation : 8 000 - 10 000 EUR
Adjudication : 6 944 €
Description
MAUPASSANT Guy de (1850-1893). POÈME autographe signé « Guy de Maupassant », À Madame la Comtesse Potocka» ; écrit sur le revers d'un éventail en soie brodée et peinte, à monture d'os incrusté.
Longueur : 26,5 cm ; largeur ouvert : 45,5 cm. (Un brin cassé, petits manques ou fentes à la soie, restaurations).
Précieux éventail enrichi par Maupassant d'un poème pour son égérie.
Un décor floral, des scènes champêtres peintes et enrichies de fils de soie colorée et de pierres dures ornent ce ravissant éventail.
Le poème compte deus quatrains, inscrits à l'encre noire au revers sur la soie blanche.
« Vous voulez des vers ?... Eh bien non. Je n'écrirai sur cette chose
Qui fait du vent, ni vers ni prose ; Je n'écrirai rien que mon nom.
Pour qu'en vous éventant la face Votre œil le voie, et qu'il vous fasse Sous le souffle frais et léger, Penser à moi sans y songer. »
Dans une lettre à la comtesse Potocka du 21 août 1889, Maupassant décrivait ce fameux éventail : « Je voulais vous envoyer d'ici un éventail avec quelques lignes. Je n'en ai trouvé qu'un, assez médiocre mais ancien et doublé de façon à me permettre d'écrire deux quatrains qui n'ont guère de sens, mais je n'ai pas la tête claire aujourd'hui. Jamais je ne me suis senti perdu comme je le suis à cette heure, et je vois devant moi tant de chagrins, de douleurs. [...] Votre dépêche qu'on vient de me monter m'a été un soulagement, quelque chose comme un sourire, une poignée de main, plus, une sympathie très douce qui m'a fait un bien infini. Elle est arrivée si juste qu'elle m'a semblé apportée par un esprit. J'ai été si surpris, ne vous ayant pas donné mon adresse, que j'ai failli croire à de la sorcellerie. J'ai compris enfin que le numéro d'expédition avait servi à me retrouver. Cela est ingénieux, gentil et délicat. Merci, madame. Voudrez- vous me dire si vous avez reçu mon éventail dont je suis un peu honteux, à tous égards. Si je vous le demande c'est que je ne connais pas la probité commerciale du marchand qui a fait l'expédition. Au milieu de toutes mes misères d'aujourd'hui j'ai pensé cent fois à ce petit dîner d'hier dans le buffet de la gare. Je n'avais jamais senti mon attachement pour vous si vivant et vibrant ».
Née princesse Pignatelli di Cergharia, séparée de son mari, le comte Nicolas Potocki, attaché à l'ambassade d'Autriche-Hongrie, la comtesse (1852-1930) était d'une rare beauté et d'une grande élégance. « La comtesse Potocka était une des reines de cette époque, célèbre non seulement par son esprit, son luxe, mais aussi par son salon qui fut, à partir de l'année 1882, le rendez-vous d'une élite d'hommes du monde, d'écrivains, d'artistes, de savants et de lettrés, bref du “Tout-Paris” » (Christoph Oberle). Exaspéré de céder malgré lui à son magnétisme, Maupassant se rendit bientôt tous les jours chez elle, rapporte le jeune Marcel Proust, et noua avec elle des relations ambiguës, peut-être moins superficielles qu'il n'y paraît. Il est à penser qu'ils voyagèrent ensemble par le train de Paris, arrivant à Lyon le mardi 20 août 1889 en fin d'après-midi. Ils prirent ensemble un repas au buffet de la gare de Perrache, avant que Maupassant ne rende visite à son frère interné à l'asile de Bron (près de Lyon) ; l'écrivain sombrera lui-même dans la folie dix-huit mois plus tard.
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