Description
Importante correspondance au sujet de l'achat et de l'aménagement de ses maisons de Marquayrol et Saint-Cirq-Lapopie, et de ses tableaux peints dans le Lot.
[C'est en 1899, lors de l'acquisition de sa propriété de Marquayrol, à Labastide-du-Vert dans le Lot, qu'Henri Martin se lia d'amitié avec Émile TOULOUSE (1860 - 1927), architecte du département du Lot, qui habitait Cahors, et son manoir de Porteroque à Saint-Cirq-Lapopie, où il accueillit souvent Henri Martin avant que celui-ci n'achète, en en 1920, une maison à Saint-Cirq Lapopie, la maison du Carrol (ou maison des Mariniers), qui sera plus tard habitée par André Breton.
Il peignit dans ces deux demeures ses plus beaux tableaux. Nous ne pouvons donner ici qu'un rapide aperçu de cette abondante correspondance.]
Henri Martin souhaite que Toulouse l'aide à faire de Marquayrol «un refuge agréable où j'aimerais me retirer pour travailler, car le pays m'a beaucoup séduit» ; il en fait son intermédiaire auprès des différents corps de métier et le charge de vérifier les travaux et payer les factures. Il suit le chantier de très près et donne ses instructions pour l'atelier qui «devra avoir 10 m sur 9 ou 10. Je crois ces dimensions suffisantes pour les toiles que j'aurai à faire à Labastide». Le travail des maçons ne le satisfait pas : les «3 fenêtres que vous avez placées inutilement vers Labastide me donneraient du soleil par conséquent de la mauvaise lumière. Donc suppression totale de ce côté et augmentation des ouvertures vers le Nord». Il s'inquiète aussi beaucoup de la captation des eaux et de la construction de la citerne, et dessine la voûte qui doit la recouvrir. Il s'insurge lorsqu'une Compagnie minière veut installer des wagonnets qui circuleront sur des fils et «placer les poteaux pour soutenir les cables dans ma propriété au-dessous de mon atelier». Il envisage plus tard de s'installer aussi à Saint-Cirq, au lieu de loger chez son ami à Porteroque : «Arriverai-je à trouver le pied-à-terre que je désire. Je recule un peu devant la bâtisse, pourtant le jardin de Lucie où je travaille me tente beaucoup, c'est la meilleure situation de St Cirq, à mon point de vue, n'est-ce-pas, les motifs y sont très très beaux»... Il tient son ami informé de son travail en cours, et de ses difficultés : il a «terminé ma grande toile, qui me satisfait assez, nous verrons la suite, et fait un deuxième tableau qui sera aussi au Salon»... «Mon panneau central de Marseille est en train. Je suis au moment effrayant, le début, avant de peindre : qu'est-ce que je vais faire ?». «Je commence une nouvelle toile, mon premier panneau pour la Sorbonne étant à peu près terminé» (1907).«L'État va me faire une chouette commande. J'ai donc du travail en perspective» (janvier 1908). «Je me débats sur le portrait de Mme Viviani qui est admirable à peindre» (février 1908). «Je suis lancé sur un des panneaux de Toulouse» (juin 1908). «Enchanté de faire le portrait de Mgr aux conditions que vous avez données». «J'ai pu travailler avec de la neige et avec du gris»... «Je suis absolument enchanté de l'enthousiasme provoqué par mon tryptique»... «Je vais tous les jours l'après-midi travailler à Puy-L'Évêque. C'est bien, mais pas plus épatant que Labastide, seulement plus nouveau dans ma production» (2 août 1912)...
16 juin 1915 : il visite les champs de bataille près d'Arras et espère y retourner «afin de prendre des notes et faire quantité d'études pour une œuvre future».
27 septembre 1915 : il accepte de faire partie du comité de patronage du Lot pour les œuvres de la guerre et envoie un tableau pour la tombola ; il est à Saint-Paul, pour «faire des études d'un bois de pin qui m'avait séduit à un séjour précédent» et «faire poser mon ami Rivière qui a une silhouette d'un si beau caractère» (il figurera dans sa toile les Rêveurs pour l'Hôtel de Ville de Toulouse)...
20 juin 1917, à propos de deux grandes toiles, «c'est-à-dire mes toiles d'exposition chez Petit. Elle se sont vendues assez bien, aux enchères, c'est toujours délicat».
22 septembre 1917 : «Revu les bords du Lot jusqu'à Bouzies et c'est très beau», et il insiste pour acheter une maison à Saint-Cirq : «Je voudrais l'aménager de façon à pouvoir venir travailler à St Cirq» (il achètera peu de temps après la maison du Carrol).
26 septembre 1918 : il demande à Toulouse d'aller «voir comment le motif des rochers est éclairé, si le soleil est encore en face et ne projette pas l'ombre de se sinuosités» afin qu'il puisse venir compléter son tableau. Il regrette de ne pouvoir «faire l'illustration du menu du banquet que le Conseil Général offrira à Poincaré»... Il assiste au défilé de la Victoire : «On était ému par la vue de ces braves poilus, par ces drapeaux tout déchirés, par Joffre, Foch, Gouraud, Mangin enfin tous ceux qui nous ont donné cette belle Victoire : « On
était ému par la vue de ces braves poilus, par ces drapeaux tout déchirés, par Joffre, Foch, Gouraud, Mangin enfin tous ceux qui nous ont donné cette belle victoire »… Il s’insurge contre le projet de monument aux morts de Cahors : « On préfèrera le socle avec son mauvais poilu en fonte […] Si encore, il venait d’un atelier Bourdelle, Bouchard ou enfin d’un beau sculpteur. On s’inclinerait, mais le Poilu en série – Merci »
En 1922, il demande le classement du Carrol aux Beaux-Arts, et le met en vente « tellement à regret » qu’il en demande un prix excessif ; « mon but d’ailleurs a été atteint puisque quand j’achetais cette maison, mon
désir avait été de la sauver de la destruction projetée ». Il vient d’acheter une maison à Collioure qui nécessite aussi des travaux.
30 mars 1925 : Il va de Saint-Cirq à Labastide : « je descendrai à Cabessut pour voir les silhouettes de Cahors qui m’ont intéressé dernièrement »…
30 septembre 1926 « Le critique de l’Illustration veut accompagner les reproductions de 3 de mes peintures de St Cirq d’un texte, il aurait voulu causer avec moi et avoir quelques renseignements historiques sur ce village moyenâgeux »…
La grande affaire, après la guerre, est la commande des peintures de la Ville de Cahors, pour la Mairie et la Préfecture, dont la confirmation ne vient pas, à cause de gros problèmes de financement entre la Ville et
l’État, bien que le peintre se montre assez accommodant à ce sujet. En 1923, il attend avec impatience la décision de Paul Léon et de Monzie, mais y travaille dès 1924 : « Je peins dedans, mais hier j’avais commencé des vignes en vue du bel escalier préfectoral et zut aujourd’hui il a fallu changer de chantier ». 4 janvier 1925 : il se réjouit de la décision du conseil municipal de Cahors, mais s’inquiète du manque d’engagement de l’État qui ne peut même pas lui payer un acompte pour le Conseil d’État ; il demande cependant « la forme avec les mesures des 3 panneaux. Est-ce que les 3 arcades qui donnent accès à ce vestibule ont des portes vitrées.
Ce sera presque indispensable si je fais des peintures ». En juillet, il est à Collioure et se désespère : « J’ai peur d’être bientôt trop vieux et auparavant je voudrais peindre pour notre chère ville de Cahors un ensemble assez important. […] Ce pays m’enthousiasme, mais je vous assure, pas davantage que St Cirq et Labastide, mon cher Marquayrol ».
19 octobre 1925 : il n’y a plus le soleil « qui m’était si nécessaire pour mes études de
vendanges. J’ai tout de même pu en faire quelques-unes ».
1927 : il arrive à Saint-Cirq « J’ai hâte de retrouver non pas du repos mais une autre fatigue que celle de mon grand tryptique qui décidément va aller au salon »…
Il mentionne aussi des voyages à Londres, où il expose, à Venise, en Espagne, une journée à Marquayrol avec J.-P. Laurens, son travail pour Maurice Fenaille, qui l’attend dans l’Aveyron… Il évoque aussi le travail de ses deux fils : René fait le portrait de M. Permezel et Jacques celui de Madame (1920).
— On joint :
- 20 lettres de sa femme Marie Martin à Émile Toulouse ou Mme Toulouse, et une de leur fils René Martin à Toulouse.