Lot n° 180

MAGRITTE René (1898 - 1967) — L.A.S., Jette-Bruxelles 3 août 1946, à Joe BOUSQUET ; 2 pages in-4.

Estimation : 1500 - 2000
Adjudication : 2 210 €
Description
Très belle et longue lettre sur ses nouvelles œuvres, critiquant la peinture surréaliste. Il attend avec impatience les livres de Bousquet...

«J'ai repensé souvent à votre sentiment qui m'a mis un jour sur cette nouvelle voie dans laquelle je suis à présent engagé : vous saviez qu'en mangeant un fruit, c'était en quelque sorte du soleil qui entrait à l'intérieur de votre corps. Ce sentiment est du même ordre que celui qui donne un sens à un de mes derniers tableaux : La Vie privée (où une fenêtre donnant sur un paysage ensoleillé se trouve dans le corps d'une femme nue) et qui fait comprendre cette révolution dans ma peinture (révolution sentimentale d'abord qui prétend remplacer l'inquiétude par la joie, le soleil). Cette sévérité ancienne n'apparait plus, elle est plus cachée, plus essentielle et doit pouvoir supporter l'épreuve du soleil». C'est probablement l'influence des années de guerre, qui l'a amené à rechercher «les moyens d'obtenir des effets aussi grandioses que ceux du mal, mais cette fois ceux du bien ( je veux dire : qui charme, qui ennivre)»... Le «climat de charme» d'Alice au pays des merveilles, des Contes de Perrault, plutôt que «l'horreur, le dégueulasse» de Pas d'orchidées pour Miss Blandish... «Vous savez la peinture “surréaliste” telle que la pratique d'innombrables “artistes” est devenue insupportable, on y voit beaucoup de mains coupées, le sang coule à flot, les “inventions” sont écoeurantes d'ingéniosité, tous ces artistes me donnent l'impression d'être aveugles et de vivre dans un musée “surréaliste” poussiéreux où un bouquet de fleurs véritable ferait scandale. [...] Je déteste mon passé et celui des autres. J'aime le rire des jeunes enfants en liberté»... Etc.
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