Lot n° 158

INGRES JEAN-DOMINIQUE (1780 - 1867) — L.A.S. «Ingres», [Rome début août 1839], à Luigi CALAMATTA ; 4 pages in-4.

Estimation : 3000 - 4000
Adjudication : 2 730 €
Description
Très belle lettre sur le portrait gravé d'Ingres par Calamatta, la gravure de son Apothéose d'Homère, et sur Franz Liszt. Il n'a pas au monde «un plus sincère et dévoué ami» que Calamatta, et son seul regret «c'est d'être forcé de compter avec vous»...

Sa femme et lui vont mieux :
«C'est toujours elle, ma bonne, mon excellente femme ! À la vue du portrait admirablement gravé que vous avez fait de son Ingres, elle s'est un peu calmée sur la propriété du dessin, et vous remercie de tout son coeur. Quant à la liste de mes élèves, je suis assez embarrassé, je ne l'ai pas, et puis beaucoup ne payront pas»... Il recommande d'en donner aux amis intimes : Roger, Blondel, Marcotte, Gattaux, Dumond, Orsel, Roger, Varcolier, Saulnier, Franchet, etc., et de lui en faire passer : «ce portrait est admiré au possible par moi d'abord et par tous, qui me le demande de tous côtés et les 3 douzaines ne seront pas de trop : et altro che Calamatta lo potera fare !»... Il tient à payer «tout le matériel que cet ouvrage vous a fait dépenser»... Il presse Calamatta de finir sa gravure du portrait de MOLÉ, regrette qu'il ne veuille pas épouser la soeur de Mercuri, et évoque leur ami TAUREL, qui reste à son poste [Amsterdam] mais qu'il espère voir à Paris, «car je n'irai jamais dans un pays qui sent la république et où par conséquent le peuple n'y est même qu'insolent !»... Il sera «toujours heureux et glorieux d'être gravé par vous», et voudrait voir Calamatta graver son Apothéose d'Homère et son Colonna, mais il prévoit des difficultés, en particulier la nécessité de modifier le dessin «d'abord comme places de figures et caractère de figures, par conséquent déterminer un autre cadre et beaucoup plus grand, ce qui en devra faire la plus grande estampe connue». Il veut modifier, ajouter et enlever certains caractères : «Mon trait fait, et arretté, le dessin ne pourra donc être fait que par morceaux, d'après le tableau sur les morceaux qui ne devront subir aucune modification, mais les autres me devront être soumis à Rome ou à Paris, pour que j'en termine l'effet, le caractère et le modelé». Dans deux mois il pourra livrer en dessin «le fond fait entièrement à l'effet, et le trait et place définitive et du nombre des figures» ... Il est très déterminé à ne rien lâcher sur «ce qui me concerne dans mon goût et mes idées de Peintre de l'Homère, et parce que naturellement il n'y a que moi qui sait ce qui comme on dit, se passe dans mon soulier», afin que Calamatta fasse «la plus belle gravure du siècle»... Il termine en disant son bonheur de jouir à Rome de LISZT, «ce grand musicien» qui a insisté pour qu'Ingres l'accompagne : «J'étois comme l'agneau sous la protection d'un lion généreux ; enfin je suis enchanté, ravi, non seulement de son admirabilissime talent mais aussi comme homme très bon, très aimable, très instruit, plein d'esprit [...]. Sa compagne Me d'AGOULTnous a charmés par tout ce qu'une femme du plus grand mérite en savoir et en grâces peut-être. Je lui ai fait un mauvais portrait dessiné, que par cette raison vous ne graverez pas. Attendons que j'en aie fait un meilleur»...

— PROVENANCE :
- Collection Édouard Herriot (vente Ader 14 juin 2012 n° 148).
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